LES
SPOROZOAIRES
COURS D'EMBRYOGÉNIE COMPARÉE
DU COLLÈGE DE FRANGE.
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-B^^
LEÇONS
SUR LES
SPOROZOAIRES
PAR
G. BALBIANI
Professeur au Collcqe de France.
Recueillies par le Docteur J. PELLETAN.
.EWEftt P.%H I^K PROFEi»HEt;R.
AVEC 52 FIGURES INTERCALÉES DANS LE TEXTE
ET 5 PLANCHES LITHOGRAPHIÉES HORS TEXTE.
PARIS
OCTAVE DOIN, ÉDITEUR,
8 Place de l'Odèon, 8.
1884
MAÎHABD M. ItETCALT,
AVANT- PROPOS. ''^
La classe des Sporozoaires a été fondée , il y a quelques
années , par Leuckart , comme nouvelle grande division
naturelle du vaste sous -règne des Protozoaires (i). Il y
comprenait , outre les Grégarines , tous ces organismes
parasites unicellulaires qui ont été décrits sous le nom
général et vague de Psorosper.mies : Psorospermies oviformes,
Psorospermies titriculif ormes, Psorospermies des Poissons. Ce
mêuie nom de Psorospermies a été donné aussi par quelques
auteurs aux spores ou pseudonavicelles des Grégarines. Il en
est résulté que ce terme, primitivement créé par Jean Muller
pour désigner spécialement les Sporozoaires des Poissons , a
été appliqué à des choses fort peu équivalentes ; de là une
confusion dans le langage scientifique qui rendait urgente
une réforme dans la nomenclature de ces êtres. Leuckart
(1879) proposa d'abord le mot de Cogcidies pour les Psoro-
spermies oviformes ; puis Bûtschli (1881) celui de Myxospo-
RmiES pour les Psorospermies des Poissons. Dans mes leçons
du semestre d'été 1882, j'ai proposé moi-même de changer
(1) Die Parasiten des Menschen, 2. Aufl. I. Bd. 1879, p. 230.
VI LES SPOROZOAIRES.
en Sargosporidie les expressions de Psorospermies utriculi-
formes , tubes de Miesoher ou de Rainey. En outre , j'ai
fait rentrer dans la classe des Sporozoaires un cinquième
groupe, que j'ai désigné sous le nom de Migrosporidies ,
comprenant les co7'puscules vibrants des Vers à soie et autres
organismes analogues , regardés depuis longtemps comme
des Psorospermies par Leydig et par moi (Psorospermies
des Articulés).
Les divers groupes composant actuellement la classe des
Sporozoaires ne se rattachent pas tous les uns aux autres par
des caractères naturels bien évidents. Si les Grégarines , les
Coccidies et même les Microsporidies ont entre elles des
affinités incontestables^ il n'en est pas de même de la
parenté de ces trois groupes avec les deux derniers, ceux des
Sarcosporidies et des Myxosporidies. Celles-ci surtout, par
la structure compliquée de leurs spores (?) et les phénomènes
qu'on y observe, présentent des différences importantes
avec les autres Sporozoaires. Je ne serais même pas étonné
qu'une étude plus approfondie de ces organismes conduisît à
les éliminer de la classe des Sporozoaires et même du règne
animal , pour les faire considérer comme des végétaux ,
confirmant ainsi l'idée que je m'étais faite autrefois de la
nature de ces corps (i).
Les Sporozoaires sont des parasites très répandus ; on les
â rencontrés chez tous les animaux, depuis les Infusoires
jusqu'à l'Homme. Quelques-uns peuvent engendrer des
maladies mortelles par leur extrême multiplication dans les
(1) Comptes rendus de l'Académie des Sciences , t. 57, 1863.
AVANT -PROPOS. vil
organes ; par exemple , les Coccidies du foie du Lapin ,
qu'on a observées également chez l'Homme. Plusieurs se
propagent aussi épidémiquement et donnent lieu à des
épizooties plus ou moins meurtrières ; telles sont les Sarco-
sporidies des Moutons et des Volailles, qui déciment parfois
les bergeries et les basses -cours. Un grand nombre de
Poissons d'eau douce meurent par le développement des
Myxosporidies dans leurs tissus, cause de destruction de
ces animaux dans nos viviers encore généralement ignorée.
Enfin, l'invasion épidémique des Microsporidies dans les
magnaneries donne lieu à la maladie de la pébrine qui , il y
a une vingtaine d'années, faillit ruiner l'industrie séricicole
dans le monde entier.
Par leur importance économique, comme par les phéno-
mènes de leur évolution biologique, les Sporozoaires sont
donc dignes de tout l'intérêt des naturalistes. En consacrant
à leur histoire quelques-unes de mes leçons , et surtout en
publiant celles-ci par les soins de M. le Docteur J. Pelletan ,
j'ai voulu appeler de nouveau l'attention sur ces organismes,
un peu négligés en ce moment pour les Schizomycètes ,
qui ont une importance bien plus grande pour la pathologie
humaine et comparée.
Je me suis attaché à présenter le plus complètement
possible l'état actuel de nos connaissances relatives aux
Sporozoaires, ce qui m'a amené à exposer les faits importants
dont MM. Aimé Schneider et Bûtschli ont enrichi récemment
l'histoire des Grégarines et des Coccidies. Mes contributions
personnelles concernent principalement les Myxosporidies
et les Microsporidies auxquelles se rapportent la plupart
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ujlLIBRARYla,
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Vm LES SPOROZOAIRES.
des figures originales des trois dernières planches jointes
à ce volume. Si sa publication pouvait engager quelques
observateurs à diriger leurs recherches sur l'un ou l'autre
des groupes de Sporozoaires , notamment sur celui des
Myxosporidies , si intéressant et encore si mal connu , j'aurais
pleinement atteint le but que je m'étais proposé.
G. Balbiani.
1" Septembre 1883.
COURS D'EMBRYOGÉNIE COMPARÉE ,^Vo .,.
DU COLLÈGE DE FRANGE. /^^ o^"^"^ ''^^^^\
LES
SPOROZOAIRES
I
LES GRÉGARINES.
I
Pour suivre l'ordre que nous avons indiqué dans notre tableau des
organismes unicellulaires , nous aurions , après avoir étudié les Infu-
soires ciliés, flagellés et cilio-flagellés, à nous occuper maintenant des
Infusoires suceurs ou Acinétiens , puis des Rhizopodes , des Labyrin-
thulés , etc., mais pour pouvoir donner à l'étude des autres classes
de Protozoaires qui nous restent à examiner, le développement
que nous avons consacré aux trois premières classes des Infusoires,
il nous faudrait employer, non seulement tout ce qui nous reste
de leçons cette année , mais encore toutes celles de l'année pro-
chaine. En effet, l'histoire des seuls Rhizopodes exigerait beaucoup
de temps, car ces êtres forment évidemment la classe la plus im-
portante et la plus vaste des Protozoaires , plus vaste même que
celle des Infusoires ciliés. Je pourrais , me dira-t-on , me borner
LES SPOROZOAIRES.
à l'étude de la reproduction chez ces organismes , étude qui rentre
plus spécialement dans le cadre de mon enseignement , mais cette
étude , pour être fructueuse et même intelligible , nécessite celle
de leur organisation tout entière , car c'est surtout chez les Proto-
zoaires que l'histoire du développement ou l'ontogénie se confond avec
l'étude même de l'organisation. Malgré la simplicité de leur structure,
je me trouverais ainsi entraîné à entrer dans de très grands détails
sur cette structure même , en raison de la variation considérable des
types de cette classe . où l'on ne compte pas moins de quatre ou cinq
groupes, dont quelques auteurs, comme Hseckel, ont fait autant de
classes spéciales : Amibiens, Foraminifères, Radiolaires, Héliozoaires,
etc. Je ne pourrais guère me dispenser d'entrer dans cette étude
morphologique, car les formes de ces Protozoaires nous sont bien moins
famihères que celles des Métazoaires. En parlant de ceux-ci , je n'ai
pas besoin, le plus souvent, de vous rappeler la constitution de leurs
organes de reproduction ; pour les Protozoaires , il en est tout autre-
ment, et, à peu près pour chaque être , il faut décrire Torgauisme tout
entier. Je n'avais pas calculé toute l'étendue de ce travail , quand j'ai
pensé à vous le présenter en un seul cours, alors qu'il me faudrait plu-
sieurs années , en même temps que je serais obligé de laisser de côté
l'étude des Métazoaires qui , au point de vue ontogénique , méritent
beaucoup plus d'attention. Le peu de temps qui me reste cette année
ne me permet pas d'entamer l'histoire de ces derniers , je n'ai donc
plus qu'à choisir , parmi les organismes unicellulaires , le groupe le
plus intéressant au point de vue où nous nous plaçons. J'ai pensé que
c'était celui des Sporozaires , qui comprend , d'après Leuckart , les
Grégarines et les Psorospermies.
Dans le tableau que nous avons donné antérieurement , nous
avions placé ce groupe parmi les Protophytes; je reconnais volontiers
que c'est une erreur et qu'il faut le placer parmi les Protozoaires.
D'ailleurs , il faut reconnaître aussi que , quand on étudie certaines
formes de Sporozoaires , il est très difficile de déterminer si l'on a
affaire à des animaux ou à des végétaux. Pour d'autres , comme les
LES GREGARINES.
Grégarines , il n'est pas douteux que ce soient des animaux ; mais
toutes ne sont pas aussi faciles à définir, et il en est qui se rattachent
d'une manière manifeste au règne végétal. Telles sont les Psorosper-
mies. Mais ce sont là pour nous, au point de vue où nous nous pla-
çons, des considérations tout à fait secondaires, et j'attache si peu
d'importance à ces questions de classification que je ne crois pas
nécessaire d'insister sur la place qu'il faut attribuer à ce groupe dans
notre tableau.
Ce qui m'a surtout dicté ce choix des Sporozoaires, c'est leur mode
d'existence. En effet . ce sont des parasites , et leur histoire se relie à
celle de certaines maladies des animaux domestiques et même de
l'homme. Et, pour vous donner un exemple du rôle qu'ils peuvent jouer
comme cause pathologique, je n"ai qu'à vous rappeler qu'un organisme
de ce groupe produit cette épidémie terrible qui a presque ruiné notre
industrie séricicole et coûté à la France plus d'un milliard. Cette
histoire a donc, en outre, un intérêt éconoinique tout spécial, et quand
nous étudierons la pèbrine , vous comprendrez combien elle est inté-
ressante, bien qu'elle soit encore si pou connue.
Ma's c'est assez de préambules, entrons tout de suite dans notre sujet.
Les Sporozoaires ])euvent être, eux-mêmes , divisés en cinq groupes
ou ordres que nous étudierons successivement : les Grégarines , les
Psorospermies oviformes ou Coccidies, les Psorospe7^mies tubuli-
f ormes ou Sarcosporidies , les Psorospermies des Poissons ou
Myxosporidies et les Psorospermies des Articulés ou Microsporidies.
Quelles sont les relations qui existent entre ces cinq groupes? Nulle-
ment douteuses pour les deux premiers ; — quant aux trois autres ,
comprenant les Psorospermies utricuUformes , celles des Poissons et
celles des Articulés , avec les précédents , elles sont bien moins
manifestes. Nous commencerons donc par le groupe des Grégarines,
Qu'est-ce qu'une Grégarine ? D'une manière générale , on peut la
définir comme un organisme qui a la constitution d'une simple cellule,
comprenant une paroi extérieure ou membrane d'enveloppe
1uj!LIBRARy)3
LES SPOROZOAIRES.
contenu et un noyau. C'est, en effet, sous cet aspect très simple qu'appa-
raissent quelques Grégarines. Quelquefois, la cellule peut se compliquer
dans sa forme extérieure et dans sa constitution intime. D'abord, la
cavité peut être divisée en deux ou trois cavités secondaires par une
ou deux cloisons transversales. Cette cellule peut présenter aussi à son
extrémité antérieure des appendices de diverse nature , des dents ,
crochets, tubercules, disques entourés de pointes radiées, en un mot ,
des appendices très variés qui caractérisent certains types. On a signalé
aussi d'autres types portant des appendices ayant la forme de longues
soies rigides et constituant autour de l'animal un revêtement complet.
Ce sont des soies immobiles et nullement vibratiles ; la nature de ce
revêtement a, d'ailleurs, été contestée, et nous verrons , en effet , que
'on doit considérer ces appendices comme purement accidentels. De
sorte que la définition des Grégarines subsiste comme des organismes
n'ayant jamais de cils vibratiles, ainsi que nous en avons vu chez les
Infusoires ciUés, cilio -flagellés et flagellés.
Si la forme extérieure peut se modifier dans certaines circonstances,
elle peut même se modifier jusque dans sa constitution intime ; de sorte
que parmi les couches d'enveloppe, on peut quelquefois distinguer des
fibres longitudinales et , plus souvent , transversales , plus ou moins
analogues à celles que nous avons trouvées chez plusieurs Infusoires
ciliés et que nous avons comparées aux fibres contractiles. Mais il
n'est pas certain qu'elles jouent le même rôle chez les Grégarines.
De plus, cette cellule grégarinaire se reproduit, mais jamais par des
phénomènes aussi simples que les cellules ordinaires ou , môme , les
Infusoires ciliés ou flagellés , c'est-à-dire par division , ordinairement
transversale, en deux autres cellules. Les.Grégarinesnesemultiphent
jamais par simple division , leur propagation s'accompagne , au con-
traire , de phénomènes excessivement comphqués et que nous étudie-
rons avec détail.
Enfin, ce sont des animaux constamment astreints à la vie parasi-
taire : ils ne présentent jamais , à l'état adulte , une phase d'existence
libre dans le monde ambiant ; que si , quelquefois , leurs propagules
LES GREGARINES.
peuvent }■ paraître, ils ne font jamais que le traverser, et c'est dans
l'intérieur des Invertébrés que se passe presque toute leur existence.
Quelques espèces sont complètement inertes et immobiles, dans
toutes les phases de leur existence. D'autres , au contraire , ont des
mouvements plus ou moins prononcés , et nous verrons plus tard quel
est l'agent spécial de ces mouvements.
Avant d'entrer dans l'étude plus approfondie de ce groupe , il est
utile de jeter un coup d'œil général sur la marche de nos connaissances
relatives à ces organismes.
Les Grégarines, au moins d'après ce que l'on sait aujourd'hui sur les
auteurs qui les ont mentionnées les premiers , ont été vues , pour la
première fois, par F. Cavolini, {Mémoire sur la génération des Pois-
sons et des Crustacés, édition italienne, 1787-1789) dans les appen-
dices de l'estomac d'un Crustacé , un Crabe , le Cancer depressus.
Cavolini a figuré les tubes appendiculaires de cet estomac avec les
Grégarines qu'ils renferment. (Voir la traduction allemande de
Zimraermann, 1792).
Ensuite, elles ont été observées, dans le premier quart de ce siècle,
par Ramdohr et par Gaede , entomologistes allemands , qui ont fait des
travaux nombreux sur l'anatomie des Insectes et qui, dans le cours de
ces travaux , ont rencontré des Grégarines , car les Insectes sont
une des classes d'animaux qui renferment le plus de ces parasites.
Le môme fait s'est présenté pour notre célèbre entomologiste Léon
Diifour , qui a passé toute sa vie à disséquer des Insectes et a trouvé
ainsi un grand nouibre de formes de Grégarines (voir les Annales
des Sciences naturelles de 1826 à 1837). Il a décrit et figuré diverses
formes de Grégarines ainsi observées chemin faisant. C'est même
Léon Dufour qui a donné à ces organismes le nom de Grégarines , du
mot grex , troupeau , parce que c'est par troupes plus ou moins nom-
breuses qu'on les trouve ordinairement réunies dans le tube intestinal.
Léon Dufour se trouvant , pour la première fois , en présence d'orga-
nismes qui lui étaient inconnus, chercha aies classer et en fit des Vers
voisins des Distomes ou Douves ; il leur décrivit même une bouche ,
LES SPOROZ AIRES.
située comme chez certains Distomes, vers la partie moyenne du corps.
Cet espace clair central qu'il prit pour une bouche, c'est le noyau. Il
est curieux que la même erreur ait été commise par Cavolini , dont
Léon Dufour ignorait la découverte. Cavolini a considéré aussi les
Grégarines comme des Vers , et , les trouvant placées à la suite l'une
de l'autre, il a cru voir un petit Tsenia composé de deux articles, dont
chacun aurait une bouche. C'étaient les noyaux des deux Grégarines
placées l'une devant l'autre.
En 1837 . Siebold prenait encore les Grégarines pour des œufs
d'Insectes, près de dix ans après L. Dufour, dans son Mémoire sur les
spermatozoïdes des Invertébrés [Aixh. de Mùller , 1837) ; il parle
incidemment, dans une note, de Grégarines, qu'il considère comme des
œufs d'Insectes. Cependant , il n'a pas lardé à reconnaître son erreur,
et , en 1839 , dans ses Contributions à l'histoire des Animaux
invertébrés, il les reconnaît pour des animaux. C'est même lui qui a
signalé l'extrême intérêt que présente leur étude. Aussi, est ce à cette
époque que les travaux se multiplient, et l'on peut en citer un grand
nombre dus à Henle, KôUiker. Meckel. Franlzius, Stein. etc. — Stein.
avant de s'occuper de ses vastes travaux sur les Infiisoires . était un
entomologiste très distingué, et s'était beaucoup occupé de l'anatomie
des Insectes. Il a indiqué ainsi pas moins de 68 espèces de Grégarines.
Frantzius, comme Stein, a trouvé des Grégarines chez les Myriapodes ;
mais Siebold est le premier qui, depuis Cavolini, les ait observées chez
les Crustacés : il en a trouvé une belle espèce dans la Crovettine
d'eau douce, le Garmnarus pulex. Léon Dufour avait décrit une
espèce dans le Lombric terrestre , sous le nom de Proteus teviax.
Kôlliker en avait signalé beaucoup dans un grand nombre de Vers de
la côte napolitaine.
Stein et ses devanciers connaissaient au moins quatre-vingts espèces
de Grégarines , et , depuis cette époque, ce nombre n'a fait que s'ac-
croître. Nous verrons , quand nous traiterons des conditions de leur
existence , pourquoi on trouve des Grégarines dans certains Insectes ,
tandis que chez d'autres on n'en rencontre jamais.
LES GREGARINES.
A une époque plus rapprochée de nous, un grand nombre de natura
listes se sont occupés aussi de la structure et du développement des
Grégarines, questions sur lesquelles Stein, en 1848, avait déjà jeté une
vive lumière.
Nous trouvons d'abord un mémoire très intéressant de Lieberkiihn ,
écrit en français, pour concourir à un prix institué par l'Académie des
Sciences de Belgique , ( Mémoires couronnés de cette Académie ,
1854). C'est la monographie d'une espèce de Grégarine du Lombric
terrestre, indiquée antérieurement par Léon Dufour , Henle , Stein.
Nous verrons quelle est l'idée qu'il s'est faite de l'évolution de cette
espèce, idée adoptée depuis par beaucoup de naturalistes, qui n'ont pas
cherché à la vérifier, mais critiquée depuis peu par M. Aimé Schneider,
professeur à la Faculté des Sciences de Poitiers. (Thèse pour le
doctorat es sciences naturelles '4875). Nous aurons, en effet, à revenir
sur ce sujet.
Après Lieberkiihn, nous trouvons Ed. van Beneden, qui a publié une
petite iiionographie sur une espèce trouvée par lui chez un Crustacé ,
la Grégarine géante du Homard , laquelle ne mesure quelquefois pas
moins de seize millimètres et qui, par conséquent, est , non seulement
la plus grande espèce de Grégarine que l'on connaisse, mais encore le
plus grand des Protozoaires.
Ray Lankester, dans un travail sur les Grégarines ou Monoct/s^es du
Lombric et du Siponcle (Quart. Jow^n. of. Micr. /Se, 1866 et 1872) est
généralement favorable aux idées de Lieberkiihn, qui sont aussi celles de
Van Beneden. Enfin, se présente un mémoire beaucoup plus important
que les précédents , la thèse de M. Aimé Schneider, dont nous venons
de parler plus haut. C'est une monographie du groupe tout entier des
Grégarines, non seulement au point de vue de leur structure , de leur
organisation et de leur développement , mais encore relative à la des-
cription d'un grand nombre d'espèces nouvelles. Mais elle ne donne
pas de classification de ces êtres, l'auteur trouvant ces essais de classi-
fication encore prématurés.
Le dernier mémoire, ou le plus récent, que je citerai, est de Biitschli
. . I i I D 0 A P V I
8
LES SPOROZOAIRES.
[Arch. de Siebold et de Kôlliker, T. XXXV, 1881). C'est un travail
approfondi ; et , en effet , c'est la le point faible de la plupart de ces
études : beaucoup d'auteurs ont vu, mais ont vu superficiellement,
Biitschli s'est attaché à examiner avec attention certains points de
l'histoire de ces animaux, et c'est à quoi il a consacré ce mémoire.
F G. 1. — Gregarina gigantea ,
d après E. van Beneden.
•iifi
FiG. 2. — Céphalin du Geneio-
rhynchus Monnieri (d'après A.
Schneider u
Dans cette énumération , je n'ai cité que les travaux principaux et
j'ai passé sous silence ceux dans lesquels il n'est question des Gréga-
rines que d'une manière incidente. P. Hallez en a décrit plusieurs for-
mes dans la Planaria fusca (Contribution à Vhistoire naturelle des
Turbellariés, 1879), et A. Giard , dans une Ascidie composée, YAma-
roecium punctum.
LES GREGARINES.
Ajoutons encore des observations de Gabriel, qui eut des idées très
singulières sur tous les points. D'ailleurs . nous ne connaissons qu'une
ou deux communications préliminaires {Zoologischer Anzeiger, 18S0).
Gabriel , qui malheureusement est mort depuis , a proposé une
classification des Grégarines , basée , non plus comme celle de ses
devanciers, sur la morphologie, mais sur l'histoire du développement.
Mais comme l'histoire du développement des Grégarines n'est connue
que d'une façon assez sommaire, on trouve dans ce travail des idées
très singulières et très éloignées de celles qui sont généralement
reçues, non-seulement à propos des Grégarines , mais encore à propos
du groupe entier des Protozoaires.
Après ce court exposé historique sur cette famille , nous avons à
rechercher d'une manière générale , mais cependant suffisamment
approfondie, quels sont les caractères des Grégarines qui, depuis 4845,
avaient déjà été assimilées par Kôlliker à de simples cellules, comme
tous les Pro'ozoaires , car Kôlliker et Siebold sont les principaux
champions de la doctrine de l'unicGllularité dos Protozoaires, doctrine
adoptée ensuite par presque tous les naturalistes.
La forme extérieure de ces êtres est celle d'un sac allongé, cyhn-
drique, plus ou moins long, formé par une enveloppe close de toutes
parts, sans ouverture aucune et, par conséquent, sans bouche ni anus,
sans trace de tube digestif. Les Grégarines se nourrissent donc par
endosmose, comme de simples cellules , à travers la paroi qui forme
l'enveloppe du corps. Ce sac présente une longueur variable et peut
atteindre, comme nous l'avons dit, jusqu'à seize millimètres. D'autres
espèces ne mesurent que quelques centièmes de millimètre.
Dans la plupart des espèces , ce sac ou tube subit . à sa partie anté-
rieure, un étranglement qui sépare . en avant, un petit segment tantôt
hémisphérique, tantôt en Ibrme de cou plus ou moins allongé. Ce
petit segment antérieur est ce que Stein désigne sous le nom de tète
ou partie céphalique ; le reste est le corps. Telles senties désignations
qu'emploient les auteurs allemands. Cette cloison transversale qui
divise la cellule en deux parties a été observée, pour la première fois.
10 LES SPOROZOAIRES.
par Stein , et c'est lui qui a proposé les termes pour désigner les diffé-
rentes parties. Quelquefois , il y a deux cloisons , de sorte que le corps
est divisé en trois segments. Les Grégariiies ainsi divisées en plusieurs
cavités sont réunies dans le groupe des Polycystidèes ^ par opposition
aux Monocystidées qui n'ont qu'une cavité intérieure. Ces dénomina-
tions de Stein ont été généralement adoptées et acceptées par les
auteurs, jusqu'au moment où M. A. Schneider a publié sa thèse , dans
laquelle il propose de nouvelles dénominations. Quand la Grégarine
présente trois segments , et c'est le nombre maximum , ces segments
sont désignés par lui , d'avant en arrière , par les noms à'êpimèrHe ,
protomérite eldeutoméi^le. Quand il n'y a que deux segments , c est
le segment antérieur ou épimérite qui manque ; c'est lui qui peut se
surajouter aux autres ou s'en séparer, et c'est lui qui porte ces
appendices divers , crochets , disques étoiles , etc. , dont nous avons
parlé. Ces appendices rappellent beaucoup les organes de fixation
qu'on trouve chez quelques Vers intestinaux, chez les Echino-
rhynques, et c'est pour cela que certains auteurs anciens avaient pris
les Grégarines pour des Vers intestinaux.
Quant aux appendices consistant en des poils ou soies raides qui for-
ment un revêtement à l'animal tout entier, comme on l'a observé chez
quelques individus de la Grégarine ou Monocysiis du Lombric , par
exemple , Stein et Lieberkiihn les ont considérés comme normaux ;
mais Lieberkiihn avait admis que l'animal pouvait subir une mue, parce
qu'il avait vu souvent des Grégarines de cette espèce libres et nues
dans leur enveloppe villeuse. M. Schneider doute beaucoup de la
réalité de cette mue , et il a raison , mais il ne sait comment l'inter-
préter. Cependant, Adolf Schmidt l'avait déjà expliquée, en 1854, dans
un très bon travail sur ce Monocysiis. 11 avait très bien vu ce qui se passe
dans ce cas. Cette Grégarine vit dans le testicule du Ver de terre, à
l'intérieur des cellules où se développent les spermatozo'ides. Or , on
sait que pendant le développement des spermatozo'ides, chez presque
tous les animaux , et notamment chez le Lombric , on trouve des vési-
cules claires qui portent à leur surface des cellules filles nées par
LES GREQARINES.
ii
bourgeonnement: c'est dans ces cellules que se trouvent les jeunes
Grégarines En grandissant, les spermatozoïdes leur forment une
enveloppe villeusc qui n'appartient pas au tégument de la Grégarine ,
et qui lui appartient même si peu, que quand celle-ci est complètement
développée, elle la rejette. C'est ce qu'avait vu Lieberkûhn. et ce qu'il
avait pris pour une mue.
FiG. 3. — A, Céphalin de VHoplorhynchus oligacanthus; — B, G, Bothryopsis hislri.
— D, E, Dufouria agilis, d'après A. Schneider.
Les Grégarines présentent , quand on les examine au microscope
^2 LES SPOROZOAIRES.
certains phénomènes qui jettent un grand Jour sur leur vie normale.
D'après M. Schneider, en examinant la partie antérieure, par exemple,
de certaines Grégarines munies d'appendices , dents ou crochets ,
comme Y Actinocephalus Dujardini , qui porte un disque entouré de
dents, on peut voir l'animal se dépouiller de son disque, qui tombe
avec répimèrite. Gela paraît être une mutilation volontaire, comme dit
M. Schneider, de l'animal qui continue à se mouvoir, comme s'il n'avait
subi aucune modification. La place se cicatrise et l'animal prend une
forme beaucoup plus arrondie. Or, cette mutilation à laquelle on assiste,
paraît se i)roduire dans la vie normale de l'animal, qui comprendrait
dès lors deux phases : une première phase avec l'appareil fixateur , et
une seconde phase sans cet appareil. Pendant la première , l'animal
s'attache à la paroi des organes, du tube intestinal, etc., et reste com-
plètement immobile. Puis , il se débarrasse de cette partie avec son
épimérite, prend une forme plus arrondie et devient errant dans la
cavité du corps de l'hôte qu'il habite. M. A. Schneider, qui, le premier,
a distingué ces deux phases et les deux formes qui les caractérisent ,
désigne sous les noms de cèphalin la forme stationnaire munie de
l'appareil fixateur ( Fig. 2 et 3, A), et de sporadin , la forme libre dé-
dépourvue de cet appareil. La partie qui se détache n'est pas seulement
l'appareil lui-même, mais l'épimérite qui se sépare en totalité ou en
partie , laissant un petit cône qui se confond bientôt avec le protomé-
rite. Ainsi, pour connaître la forme réelle d'une Grégarine , il faut la
connaître à l'état de cèphalin, c'est-à-dire complète.
Jusqu'à une époque toute récente , on ne connaissait l'état séden-
taire que chez les Polycystidées, munies d'appareil fixateur. Biitschlia
signalé un état sédentaire chez une Monocystidée ou Grégarine à un
seul segment. C'est une Grégarine du Lombric {Monocystis magna),
qui atteint jusqu'à cinq miUimètres de longueur. Pendant le jeune âge,
cette Grégarine vit la tête enfermée dans les cellules épithôliales du
testicule du Lombric. Ces cellules épithéUales sont de deux sortes ,
quoique toutes vibratiles : les unes sont de petites cellules formant une
couche continue : les autres sont des cellules caliciforraes saillantes
LES GRÉGARINES.
43
au-dessus de celles-ci. C'est dans ces dernières que la Grégarine
enfonce sa tête, pendant que son long corps sort et pend dans la cavité
du testicule. Plus tard, elle se détache et vit libre dans cette cavité.
Il y a des espèces qui vivent associées par couples à côté d'autres
individus solitaires ; il en est qui sont toujours accouplées. Les deux
individus peuvent être fixés l'un à l'autre par des
extrémités semblables , la tête toujours ; elles
sont alors dites en apposition. C'est un mode
fréquent chez les Monocystidées. Stein avait vu
cette réunion chez une Grégarine du Lombric ,
et avait pris le couple pour un animal unique ; il
avait fait de ces formes le genre Zygocysiis
[Z. corneia). M. Schneider a observé aussi, chez
la Blatta laponica, une Grégarine monocystidée
en apposition, le Gamocystis ienax (l).Chez les
Polycystidées , la réunion a lieu par des extré-
mités dissemblables , la tête d'un individu à la
partie postérieure de l'autre , en opposition
(Fig. 4.1. Stein avait fait de ces Grégarines, qui
vivent toujours deux à deux , le type du genre
Gregarina, prenant l'état de réunion pour
l'état normal ; exemple : G. ovata du Perce-
oreille.
Quand les individus sont réunis par la tête,
en apposition, ils sont toujours immobiles ; mo-
biles , et souvent même très mobiles , comme
s'ils étaient isolés, quand ils sont réunis en oppo-
sition. M. A. Schneider pense que les Grégarines
réunies ainsi , en opposition ou en apposition ,
finissent ordinairement par se séparer au moment de la reproduction,
Fig. 4. — Clepsidrina
Blattarum, individus
eu opposition (d'après
A. Schneider).
(1) A. Schneider a reconnu depuis que les deux individus de Gamocystis sont placés en
opposition comme chez les Clepsidrina et autres genres. ( Voy. Archives de Zool. expér.,
t. X, p. 443. 1882).
i4 LES SPOROZOAIRES.
et que chaque animal se reproduit alors isolément et pour son compte,
dans son kyste ; de sorte que le fait même de la réunion deux par deux
lui offre une signification inconnue au point de vue physiologique.
D'après les observations de Biitschli , il paraît que c'est une véritable
conjugaison , une réunion qui commence de très bonne heure dans le
jeune âge ; les individus réunis finissent par s'envelopper d'un kyste
commun, dans l'intérieur duquel leur substance se mélange. Le phéno-
mène peut donc être considéré comme une reproduction sexuelle.
M. A. Schneider ne nie pas que plusieurs individus puissent se réunir
dans un même kyste, mais il pense qu'ils étaient d'abord séparés, avant
de se réunir dans le kyste commun.
Outre ces deux groupes des Monocystidées» et des Polycystidées,
Stein en a admis un troisième , celui des Didymophyides composé de
Grégarines présentant une seule tête , deux corps et deux noyaux ,
c'est-à-dire trois cavités et deux noyaux. Mais KôUiker et M. Schneider
ont reconnu que ce n'est pas une forme typique ni générique, mais un
mode d'agrégation particuher de deux individus , l'individu postérieur
refoulant avec sa tête la partie postérieure de l'animal antérieur,
s'invaginant, pour ainsi dire , dans son intérieur et simulant une sorte
de cloison. Il en résulte un ensemble qui paraît contenir trois cavités
et deux noyaux. C'est le genre Didyinophyies , de Stein , qu'il faut
supprimer. D'ailleurs ces espèces n'ont jamais été rencontrées depuis.
LES aREOARINES. 45
II
Abordons maintenant l'étude de la structure intime ou de l'histologie
des Grégarines.
Les anciens auteurs, et Stein en 1848, ne distinguaient, dans les
Grégarines, que deux parties, une paroi et un contenu. La paroi est
formée, suivant Stein. par une membrane simple et facilement permé-
able. En effet, cet auteur remarque que toutes les Grégarines. placées
au contact de l'eau , se gonflent par absorption du liquide et finissent
par éclater. Le contenu est une substance albumineuse. renfermant un
grand nombre de corpuscules foncés . à double contour, de forme et
d'aspect variables dune espèce à l'autre et tellement abondants qu'ils
donnent à l'anirnî»! une couleur laiteuse ou crayeuse. Stein nie l'exis-
tence de muscles et de nerfs, et explique les mouvements qu'exécutent
les Grégarines par des contractions de la substance centrale du corps.
Il s'était donc fait de ces animaux une idée très simple . celle d'une
simple cellule.
En 1853. le professeur J. Leidy. naturaliste américain, qui s'est
beaucoup occupé des Protozoaires, distingue, entre la membrane
d'enveloppe et la substance centrale, une couche spéciale qu'il décrit
comme striée longitudinalement, et qu'il appelle couche musculaire ;
Leuckart. rendant compte du travail de Leidy dans un des ses Be-
richie annuels de VArchivfûr Naturgeschichte (1848-1853). dit qu'il a
réussi à confirmer cette observation, mais attribue à la striation une
autre signification. Pour lui, elle représenterait un plissement de la
tunique, c'est-à-dire serait l'indication d'un état passager. Cette inter-
prétation est confirmée par Ray Lankester et E. van Beneden , qui ,
tous deux, confirment l'existence de cette couche, mais lui donnent
une autre signification que Leidy.
En 1872 , E. van Beneden fait un pas de plus dans la connaissance
des Grégarines, en étudiant la Grégarine géante du Homard. Il place
46 LES SPOROZOAIRES.
une nouvelle couche entre la membrane externe et la masse centrale,
couche qu'il considère comme la véritable couche musculaire des Gré -
garines, mais qui n'est point la couche de Leidy, et se trouve entre
cette dernière et la membrane extérieure.
Stein n'admettait donc que deux éléments, la membrane d'enveloppe
et la masse centrale. Leidy découvre, entre ces éléments, une couche
qu'il considère connue musculaire, couche que Leuckart, Ray Lankes-
ter et E . van Beneden reconnaissent , mais dont ils attribuent la stria-
tion à un plissement et non à des fibrilles. Puis , E. van Beneden dé-
crit une autre couche intermédiaire;, sous-cuticulaire, très mince ou à
peine plus épaisse que la cuticule homogène, transparente et présen-
tant des fibrilles transversales très réfringentes. Ces fibrilles forment
des anneaux séparés ou une spirale autour du corps de la Grégarine,
et elles apparaissent quelquefois, notamment dans les grandes espèces,
avec autant de netteté que la striation des fibres musculaires des Ar-
ticulés et des Vertébrés. Pour E. van Beneden, cette striation trans-
versale ne serait pas due à des plissements, mais correspondrait à de
véritables fibrilles qui seraient situées dans la couche sous-cuticulaire.
Il décrit chaque fibrille comme formée de petits corpuscules allongés
transversalement, rapprochés les uns des autres et constituant ainsi
des anneaux circulaires. Mais la constitution intime de chaque fibrille
ne peut être décelée que par de très forts grossissements. En somme,
il compare ces fibrilles à celles que l'on observe, tantôt transversales,
tantôt longitudinales, chez un grand nombre d'Infusoires ciliés et qui
sont considérées comme des fibres contractiles ; et il établit une grande
analogie de structure entre les Grégarines et les Infusoires, trouvant,
chez les uns et les autres, une cuticule, une couche striée musculaire,
une couche de Leidy, qu'il désigne sous le nom de couche corticale ,
puis, la masse interne correspondant au parenchyme des Infusoires.
Cette interprétation, faite par E. van Beneden, des fibres annulaires
des Grégarines n'a pas eu l'approbation de Ray Lankester ni de
A. Schneider. Suivant Ray Lankester, ces fibres contractiles ne seraient
que des épaississements ou saillies circulaires de la cuticule, d'après
LES GREGARINES. 11
ses observations sur la Grégarine du Siponcle. Quant à A. Schneider,
il ne partage pas non plus l'opinion de E. van Beneden , mais nous
devons auparavant exposer ce que dit A. Schneider sur l'organisation
des Grégarines, car c'est l'auteur qui les a le mieux étudiées et avecle
plus de soin.
11 distingue quatre parties différentes auxquelles il donne des dési-
gnations nouvelles. Ce que tous les auteurs appellent cuticule est pour
lui Vépicyie ; c'est l'enveloppe de la cellule, sans structure, transpa-
rente, quelquefois assez épaisse pour montrer un double contour, et
présentant souvent ce que Schneider appelle des stries d'ornement.
Ce sont des stries très fines, très serrées, parcourant longitudinalement,
quelquefois , mais plus rarement obliquement, l'enveloppe de l'animal.
Pour cet auteur , ce sont de simples dispositions ornementales sans
signification physiologique. L'épicyte est une membrane azotée ,
soluble dans l'ucide acétique et dans les alcalis. Au-dessous, est le
sarcoci/te , le parenchyme cortical de van Beneden , la couche de
Leidy, substance formée par une matière consistante , homogène ou
finement granuleuse. Cette couche n'est pas constante; elle peut
manquer chez diverses Grégarines . et généralement dans le segment
postérieur du corps.
Puis, vient la couche que Schneider indique sous le nom de couche
fibrillaire. Ces fibrilles , annelées, spirales , quelquefois anastomosées
en réseau à mailles allongées transversalement , seraient placées dans
la couche corticale et formeraient avec elle une seule et même couche.
Elles ne sont pas non plus un élément constant et manquent chez beau-
coup de Grégarines. Elles représentent évidemment ce dont E . van Bene-
den fait des éléments contractiles. Nous avons vu que Ray Lankester ne
veut y voir que des épaississements ; la manière de voir de Schneider
se rapproche beaucoup de celle de Ray Lankester : il ne la considère
pas non plus comme contractile , mais pense qu'elle forme comme un
appareil de soutènement ou un squelette élastique qui maintient le
corps et l'empêche de s'aftaisser. En effet , il donne des raisons très
admissibles : elle ne joue pas le rôle d'un élément contractile, car elle
18
LES SPOROZOAIRES.
manque chez les Grégarines les plus agiles ; ces espèces , qui man-
quent de fibrilles , et même de couche corticale . sont précisément les
plus actives . celles qui changent de forme à chaque instant , par
exemple , le Boihryopsis hisirio des Coléoptères aquatiques. (Fig. 3,
B,C).
Il y a aussi des Grégarines qui présentent des dispositions in-
verses , c'est-à-dire qui montrent tous les détails des fibrilles d'une
manière très nette, par exemple, le Clepsidrina Munieri, et qui n'ont,
au contraire, que des mouvements très lents, quelquefois nuls. D'autres
fois encore , le protomérite , c'est-à-dire la partie qui le plus souvent
est nmuie de la couche fibrillaire , reste immobile, tandis que le deu-
tomérite, dépourvu de fibrilles , est actif.
M. A. Schneider distingue, dans la structure des Grégarines, quatre
types difl'érents.
Fig. 5. — Figures schématiques des quatre types de structure, d'après A. Schneider.
Dans un premier type , (Fig. 5, A) on reconnaît les deux couches :
épicyte et sarcocyte avec fibrilles ainuilaires dans les deux segments.
C'est une couche d(3sarcocy te pur qui forme la cloison, tantôt simple ,
tantôt double, qui sépare le corps de la Grégarine en épimérite, proto-
mérite et deutoraérile. La cloison ne renferme jamais de fibrilles ,
— ce que E. van Beneden avait déjà signalé {Clepsidrùm Munieri).
LES GREGARINES. ^9
Dans un deuxième type , {B),on trouve les mêmes couches , mais ^es
fibrilles manquent. Tel est le Geneiorhynchus Monnieri , des larves
des Libellules. (Fig. 2.)
Un troisième type (G) présente les mêmes caractères dans le segment
antérieur, mais dans le segment postérieur on ne reconnaît que la
cuticule et la masse centrale {Stylorhynchus , etc.)
Enfin, dans le quatrième type (D), il y a absence complète de sarco-
cyte. dans le protomérite comme dans le deutomérite, et l'épicyte ou
cuticule s'applique partout sur la masse interne. La cloison est ici
membraneuse, très mince, quelquefois très flasque, presque flottante,
s'élevant comme un diaphragme. 11 est probable qu'elle est alors
formée par un prolongement de la cuticule. Tels sont les Actino-
cephalus Dujat^dini, Dufouria agUis{Fig. 3, D. E.), etc.
Examinons maintenant la structure de la masse centrale , que Stein
appelle tout simplement le contenu , le parenchyme médullaire de
E. van Beneden, Yentocyte de Schneider, — et à propos de ce dernier,
je ne puis m'empêcher de faire remarquer que ces nouvelles dénomi-
nations étaient inutiles , car elles désignent des parties que nous
connaissons chez d'autres Protozoaires : l'épicyte est la membrane
d'enveloppe, la cuticule que l'on trouve chez les Infusoires, les Rhizo-
podes , etc., le sarcocyte est l'ectosarc ou ectoplasme, l'entocyte
est l'endosarc ou endoplasme. Il n'était donc pas utile de créer
de nouveaux noms quand il en existait déjà qui s'appliquaient
fort bien.
L'entocyte renferme deux parties : d'abord , des granulations
très abondantes , sphériques ou irrégulières , très réfringentes qui ,
dans certaines situations du microscope , présentent un double
contour , par exemple , quand on ajuste le foyer sur un point de la
périphérie. Ce caractère optique avait conduit Stein à voir dans les
granules des globules graisseux. Ceux-ci, très abondants, donnent
quelquefois à l'animal une apparence laiteuse et même peuvent le
rendre aussi opaque que la craie. Outre ces corpuscules, l'entocyte
renferme un liquide qui tient les granules en suspension. C'est le
20 LES SPOROZO AIRES.
mètaplaume de Schneider et c'est lui qui jouerait peut-être le rôle
contractile. Cette interprétation mérite, en effet, d'être vérifiée.
Antérieurement à Stein, Henle croyait que les granulations étaient
formées par des sels de chaux : il les avait vues entrer en effervescence
avec l'acide sulfurique, (ce qui doit être une erreur). Biitschli a publié
un travail spécial {Arch. f. "tnikr. Anat. 4870) sur ce sujet et sur les
granules de certains Infusoires parasites. Il a reconnu qu'ils sont
insolubles dans les acides organiques , même forts . et dans les acides
minéraux faibles , mais très solubles dans les acides minéraux concen-
trés ; — insolubles dans l'alcool , l'éther, et le mélange de ces deux
liquides . même à chaud. Mais ils sont très rapidement solubles dans
les solutions alcalines : les granules se gonflent et disparaissent com-
plètement ou presque complètement. L'iode donne la réaction la plus
caractéristique : les granules prennent une teinte rouge brun , vineuse
ou violacée , et avec l'acide sulfurique passent au bleu violet". Biitschli
en conclut qu'il s'agit là d'une substance animale, amyloïde, substance
azotée , mais qui présente quelques réactions de l'amidon. Ces sub-
stances amylo'ides , dont l'origine est ordinairement pathologique et se
trouvent dans certaines dégénérescences du foie ou de la rate ( Kiihne
etRudnew), — ainsi que leur coloration en violet ou en rouge brun
par l'iode, étaient déjà connues : moi-même et Leidy les avions signa-
lées, il y a longtemps.
Il y a des Grégarines qui , sans l'emploi des réactifs , sont très
colorées , en jaune , rouge , orange , etc. — Ce n'est pas la couleur
naturelle de l'animal , mais le résultat d'une imprégnation par une
matière colorante qui se trouve dans l'intestin de l'hôte. Ainsi, il y a un
Chrysomchen, le Timarcha tenebricosa, dont l'intestin est imprégné
d'une matière colorante rouge ou orangée. Cet insecte héberge une
Grégarine, le Clepsidrina Munieri , que l'on trouve alors colorée
en rouge ou en orange.
Une autre Grégarine, très connue, se trouve à volonté dans
les vers de farine, c'est-à-dire les larves du Tenehrio molitor ,
insecte qui infeste toutes les boulangeries mal tenues ; c'est une
LES GREGARINES. 2<
Grégarine très curieuse , le Clepsidrina polymorpha , qui a absolu-
ment la forme d'un canon. Elle présente deux parties , un protomérite
qui forme la bordure de la gueule du canon et qui renferme à peine
quelques granules , et un deutomérite qui représente tout le corps du
canon et la culasse, et qui contient , au contraire, un si grand nombre
de granulations qu'il est opaque et crayeux.
Un élément constant est le noyau. Les premiers observateurs avaient
vu ce noyau , mais sans l'interpréter. Gavolini l'avait signalé , mais
l'avait pris pour la bouche. L. Dufour l'avait vu , mais avait commis la
même erreur, le prenant aussi pour la bouche d'un Distome. Kôlliker
l'a reconnu comme noyau de cellule , ce qui l'a conduit à considérer
les Grégarines comme des cellules simples. lien est de même de Stein,
qui, en raison du volume de ce noyau, le compare à la vésicule germi-
native de l'œuf. Mais il ''efuse, néanmoins, de voir dans les Grégarines
de simples cellules , à cause des cloisons qui les segmentent , et qu'on
ne voit jamais dans les cellules ordinaires. Aujourd'hui , ce ne serait
pas une raison . car les cellules des Protozoaires s'éloignent des
cellules simples par bien d'autres caractères , ce qui n'empêche pas
qu'on les regarde généralement comme des cellules simples. Ce noyau
est toujours situé dans le deutomérite ou deuxième segment du corps.
Quelquefois , il est très rapproché de la cloison du protomérite ,
mais il ne la franchit jamais, circonstance déjà observée par Stein.
Les Grégarines n'ont ordinairement qu'un seul noyau , mais on a
décrit des Grégarines sans noyau et d'autres avec deux noyaux. C'est
Stein qui a signalé ces dernières , et qui a décrit les Didymophyies ,
Grégarines qui ont une tête et deux cavités abdominales dont chacune
renferme un noyau. Nous avons dit que ce n'est pas un animal ,
mais deux animaux réunis et dont l'un emboîte sa partie antérieure
dans la partie postérieure de l'autre. Stein a décrit le Didymophyies
gigantea, dont les deux segments n'ont pas de noyaux, puis, le D.
paradoxa qui possède deux noyaux. Ces deux noyaux appartiennent
à deux individus réunis bout à bout. Cependant quelques auteurs
ont décrit des Grégarines de forme simple possédant deux noyaux.
LES SPOROZOAIRES.
La Térebelle, d'après Kôlliker, contiendrait une Gregarina Terebellœ
à deux noyaux. Leidy a vu aussi une Grégarine à deux noyaux chez
un Myriapode , YTulus 7narginatus . Udekem a vu aussi deux noyaux
chez le Monocysiis du Lombric . et enfin . Schneider kii-même dit
avoir rencontré quelques exemplaires de la Grégarine géante , de
van Beneden , présentant aussi deux noyaux. Tous ces individus à
deux noyaux peuvent être considérés comme des formes anormales ;
comme règle générale , il n'y a qu'un noyau qui est placé dans le
segment postérieur.
La forme ordinaire du noyau est sphérique , ovoïde , elliptique ; sa
membrane paraît élastique ; il est flottant dans la mase du corps et se
déplace suivant les mouvements de l'animal. Presque toujours , il est
muni d'un nucléole central. C'est un nucléole histologique ordinaire ;
Y endoplastule des Infusoires n'existe pas chez les Grégarines. Le
nucléole est ordinairement simple , sphérique , quelquefois multiple ,
{Bothryopsis , Geneiorhynchus). Si l'on suppose les nucléoles très
nombreux . très petits , on arrive à une sorte d'amas de granulations
très fines . figurant comme une poussière au centre du noyau.
[Aciinocephalus). On trouve des variations analogues dans les cellules
ordinaires, notamment dans les œufs, et cela, non seulement entre des
œufs de même âge , mais entre des œufs d'âge différent (Auerbach).
Mais E. van Beneden a fait, relativement au nucléole , une observa-
tion bien plus intéressante : il a vu que . chez le même animal . le
nucléole se transforme incessamment.
Ainsi . la Grégarine géante possède à un moment donné un gros
nucléole; un moment après, il apparaît dans le noyau des corpuscules
qui grossissent à vue d'œil, pendant que le nucléole s'efiace et finit par
disparaître , remplacé par un plus ou moins grand nombre de corpus-
cules, dont les uns prennent le même volume que le nucléole disparu,
tandis que les autres s'effacent. Il y a même un stade où le noyau
paraît complètement dépourvu de nucléole, Ed, van Beneden a vu
toutes ces variations se produire dans l'espace de vingt-cinq minutes.
Ce sont là des phénomènes histologiques très curieux . et il paraît
LES GREGARINES. 23
que des faits analogues d'apparition et de disparition de nucléoles ont
été observés par un observateur russe, Svierczewski, dans les cellules
ganglionnaires de la Grenouille {Med. Ceniralhlatt, 1869).
En dehors du noyau, la masse centrale ne renferme aucun autre
élément défini : pas de vésicule contractile, — ce qui différencie les
Grégarines des autres Protozaires, les Infusoires et les Rhizopodes, par
exemple, chez qui les vésicules contractiles sont ordinaires. Quelle
que soit la fonction qu'oji attribue à ces vésicules, il faut admettre que,
chez les Grégarines, cette fonction s'exerce par la peau, qui respire,
excrète, absorbe, car elles sont dépourvues de tout appareil digestif.
Ce sont donc les Protozaires les plus simples, puisque la seule diffé-
renciation qu'on remarque dans leur corps se réduit, chez certaines
espèces, à une division du contenu en deux ou trois parties, par une
ou deux cloisons.
Jetons un coup d'œil rapide sur la façon dont s'accomplissent les
fonctions de la vie animale, sensibilité et mouvements. Ces fonctions ne
manquent pas ; les mouvements sont, souvent même, assez énergiques
Cependant, ils diffèrent beaucoup, au point de vue de la vivacité , sui-
vant la période de la vie de l'animal. On sait que les Grégarines pas-
sent une partie de leur existence fixées h la paroi des organes do leur
hôte. Pendant ce temps, elles n'exécutent que quelques très légers
mouvements volontaires, mais elles sont beaucoup plus actives quand
elles ont abandonné leur point d'appui et vivent libres dans le tube
intestinal ou la cavité du corps de l'hôte. Cependant, quelques-unes ;
même dans cet état, paraissent absolument inertes, les Zygocyslis et
les Gamocystis, par exemple, qui vivent réunies deux par deux.
A l'état solitaire, la plupart des Grégarines se meuvent, et-même, quel-
quefois, avec beaucoup d'activité, comme \e Monocystis agilis. Ce n'est
pas sans une certaine justesse que Stein les a comparées à des Euglènes
sans filament, en raison de leur contractilité. Les Polycystidées ont
aussi des mouvements très énergiques, mouvements de deux sortes :
un mouvement, très singulier, de translation totale, rectiligne, uni-
forme ; l'animal paraît glisser tout d'une pièce sur le porte-objet. Il
24 LES SPOROZOAIRES.
peut aller à droite, à gauche, suspendre son mouvement, le reprendre ;
il est libre de son allure. Ce mouvement peut être exécuté par des
individus solitaires et par des individus associés. — Quelle est la cause
de ce transport ? — Les auteurs l'ignorent absolument. C'est un de ces
curieux mouvements durant lequel on ne voit rien se passer, soit à l'ex-
térieur, soit à l'intérieur de l'animal. On sait que les Planaires et autres
Turbellariés glissent ainsi d'un mouvement uniforme , mais ils ont
des cils vibratiles sur toute la surface du corps ; chez les Grégarines,
on n'en a jamais vu. Raj Lankester a parlé d'une ondulation imper-
ceptible du sarcode ; mais ces animaux sont limités par une membrane
qui n'a rien de sarcodique, car on y verrait adhérer les corpuscules
ambiants, en raison de la nature glutineuse du sarcode. On sait que
c'est aussi par des ondulations imperceptibles du sarcode qu'on a
voulu expliquer le mouvement des Navicules, et comme les Diatomées
sont limitées par une enveloppe solide, siliceuse, on a dit que, chez les
Navicules, il y avait au fond du sillon médian une bande de sarcode
nu, qui opérait des mouvements d'ondulation très rapides. Mais ce
sont là de simples hypothèses. D'ailleurs, Schneider fait remarquer que,
s'il se produisait des ondulations quelconques, on devrait observer un
mouvement corrélatif dans les granulations intérieures ; or, c'est ce
qu'on ne voit jamais. En réahté , la cause de ce mouvement de
translation est aussi inconnue que le mouvement analogue des
Diatomées.
La seconde sorte de mouvement qu'on remarque chez les Grégarines
consiste en mouvements de contraction qui se passent dans le corps,
quelquefois très actifs, vermiformes, à l'aide desquels, par exemple,
elles se fraient un chemin à travers les matières de l'intestin, d'une
manière qui paraît volontaire. Ces mouvements de contraction, très
prononcés, donnent quelquefois à l'animal un aspect bizarre , c'est
à quoi le Bothryopsis histrio doit son nom.
Quelquefois il se produit des inflexions brusques du corps : la partie
postérieure se déjette tout-à-coup et s'aplatit contre la partie anté-
rieure, et cela plusieurs fois de suite. Ces mouvements de contraction
LES GREGARINES. 25
sont d'autant plus prononcés que la longueur du corps l'emporte sur
la largeur. Chez la Grégarine du Homard , qui a jusqu'à 16'"°' de long
sur 0""" 15 de large, la cause de ces contractions est, pour E. van
Beneden et Leidy, dans la couche contractile, ce que conteste Schneider,
qui nie la nature contractile de cette couche et n'admet pas qu'elle
puisse être la cause du mouvement. En effet, il n'a pas constaté ces
anneaux contractiles chez une espèce des plus agiles , le Bothryopsis
histrio. Ces fibres sont , au contraire , très prononcées chez le Clepsi-
drina Munieri , une des Grégarines les plus inertes qu'on connaisse.
Il faut donc repousser l'explication de van Beneden et de Leidy, En
somme, les auteurs ne sont pas plus d'accord sur la cause des mouve-
ments de contraction que ;ur celle des mouvements de translation.
Il est assez singulier, à ( e propos, de voir M. Schneider, qui nie la
nature contractile de ces fibrilles et en fait de simples épaississements
du sarcocyte , s'appuyer sur leur existence pour défendre l'animalité
des Grégarines, Il semble qu'il ne devait pas invoquer cette raison,
quand on sait qu'il y a, chez les végétaux, un grand nombre de vaisseaux
à épaississements annelés, réticulés, spirales, II s'appuie, avec plus de
raison, sur l'énergie des mouvements, par exemple, quand il y a cette
contractilité brusque qui replie une partie du corps de la cellule contre
l'autre.
Toutes les espèces de Grégarines vivent en parasites dans l'intérieur
des animaux, mais il est remarquable qu'on n'a encore trouvé de
véritables Grégarines que chez les Invertébrés, Les Vertébrés n'ont
pas encore donné de vraies Grégarines , et elles sont remplacées chez
eux par une autre forme de Sporozoaires , les Psorospermies ovifor-
raes ou Coccidies , qui ont une grande affinité avec les Grégarines,
mais ne leur appartiennent réellement pas. Chez les Vertébrés, on
trouve aussi une autre forme de Sporozoah'es, celles qu'on appelle
Myxosporidies ou Psorospermies des Poissons. Celles-ci ont des
affinités beaucoup plus lointaines avec les Grégarines.
Enfin , on trouve aussi des Coccidies chez les Invertébrés. Ainsi,
chez certains Mollusques céphalopodes et gastéropodes, on trouve
Uj(LIBRARYJ3oj
26 LES SPOROZOAIRES.
des Psorospermies oviformes ou Goccidies, et par conséquent , ces
êtres existent dans les deux embranchements des animaux , tandis que
les Grégarines manquent chez les Vertébrés.
Chez les Invertébrés , même , les Grégarines ne sont pas uniformé-
ment répandues. Elles sont inconnues chez les Mollusques, — qui ren-
ferment, au contraire, des Goccidies, — on les trouve chez les Ascidies
simples et composées , (Ascidia mamillaris, Kôlliker ; Amarœcium
punctum, Giard); mais c'est surtout chez les Vers qu'on les trouve
en abondance, lesTurbellariés, les Planaires, les Némertiens fKôlHker,
A. Schneider), les Géphyriens. On les rencontre chez tous les Vers
libres , rarement chez les Vers parasites. Ainsi, les Cestoïdes ou
Taenias, les Acanthocéphales, les Trématodes ou Distomes, les Néma-
toides parasites ne présentent que très peu de Grégarines, et Aimé
Schneider va même jusqu'à nier l'existence de ces Sporozoaires dans
tous les Vers parasites.
Quant à moi, j'en connais deux exemples : VOxyurus ornatus des
Batraciens, où une Grégarine a été signalée par Georg Walter
(Zeitschr. f. wiss. Zool. t. IX, 1858), et Y Echinorhynchus proteus
des Poissons d'eau douce, qui a fourni à M. Henneguy des Grégari-
nes en voie de développement. Moniez en a trouvé aussi des kystes
dans V Echinorhynchus proteus. 0. F. Miiller, avait déjà signalé ce
fait, quoiqu'il l'eût interprêté d'une manière inexacte.
Mais leur véritable domaine est le monde des Insectes , des
Myriapodes et des Crustacés , bien qu'elles soient assez rares chez les
Crustacés ; c'est cependant chez le Cancer depressus , que les
Grégarines ont été observées pour la première fois par Cavohni.
Siebold en a vu aussi une belle espèce dans un petit Crustacé
commun, le Gammarus pulex ,h^<i\i\mxm. dans le Gammarus puteanus
et E. van Beneden a trouvé le géant des Grégarines dans le Homard.
— Les Myriapodes sont une véritable mine de Grégarines et c'est
chez ces animaux qu'elles sont le plus fréquentes. Ainsi, le Lilhohius
forficalus en contient jusqu'à trois espèces : VAdeliaovata. VAcUnoce-
phalus Dujardim , V Echinocephalus hispidus; chez un lulus, on
trouve un Stenocephcdus , etc.
LES GREGARINES.
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28 LES SPOROZOAIRES.
Les Grégarines s^^nt très fréquentes aussi chez les Insectes. C'est en
disséquant des Insectes que les premiers auteurs ont découvert une
foule d'espèces de Grégarines ; car, jusqu'à l'époque de Stein (1848), on
n'en comptait pas dans moins de 68 espèces distinctes. Depuis lors, ce
nombre n'a fait qu'augmenter; mais, même chez les Insectes, leur
distribution dans les diverses familles présente des traits intéressants,
comme l'a montré M. Aimé Schneider dans son mémoire cité.
Rares ou absentes chez les Insectes qui mènent une vie aérienne , à
l'état parfait ou sous forme de larves, les Lépidoptères et les Hyménop-
tères, elles sont fréquentes chez les espèces, surtout chez les larves, qui
vivent dans la terre, comme le Ver blanc du Hanneton , dans le
fumier, comme le Géotrupe ; fréquentes aussi chez les Insectes dont
les larves sont aquatiques , Diptères, Hémiptères, Névroptères, comme
les Libellules, qui fournissent le Geneiot^hynchus Monnietn, VHoplo-
rhynchus oligacanthus ; — chez les Phryganides , les Mystacides .
Les Coléoptères et les Orthoptères renferment aussi beaucoup de
Grégarines • les Blaps , par exemple , renferment le Stylorhynchus
longicollis, le Tenehrio molUor contient le Clepsidrina polymorpha ;
les Blattes sont très souvent remplies du Clepsidrina Blatiarum. etc.
On peut dire que les Polycystidées vivent dans les Articulés , et les
Monocystidées dans les autres Invertébrés. Cependant , il y aussi des
Insectes qui renferment des Monocystidées.
Au point de vue de l'organe que le parasite habite , il a y a des
distinctions intéressantes à faire. Toutes les Polycystidées habitent le
tube digestif, mais quand les Articulés renferment des Monocystidées ,
celles-ci siègent aussi dans le tube digestif. Chez les autres Invertébrés,
où l'on n'a encore trouvé que des Monocystidées, celles-ci peuvent
habiter l'intestin ou la cavité générale du corps.
Le régime de l'hôte exerce aussi une influence appréciable sur la
présence ou la fréquence des Grégarines. Elles sont très fréquentes
chez les carnassiers , les coprophages, ou les omnivores, qui vivent
dans des conditions faciles d'infection. Elles sont rares ou absentes
chez les espèces dont le régime est herbivore comme les Lépidoptères.
LES GREGARINES. 29
Enfin, l'influence du genre de vie de l'hôte joue un rôle très important
dans le développement des Grégarines, Ainsi , les Insectes qui vivent
dans des milieux humides et sombres trouvent, dans ce milieu et cette
humidité, des conditions favorables à la maturation des kystes , ces
réservoirs dans lesquels s'élaborent les propagules des Grégarines. Ces
kystes, rendus avec les excréments, se développent alors facilement,
arrivent à maturité , les spores se répandent et sont absorbées par les
animaux, qui s'infectent.Les Insectes qui vivent au grand air, trouvent,
au contraire, des spores qui se dessèchent, se détruisent, et ils
échappent à l'infection.
30 LES SPOROZOAIRES.
III
L'étude du développement des Grégarines est l'un des plus curieux
et des plus intéressants chapitres de l'histoire des Protozoaires, car elles
présentent dans leur propagation des phénomènes qui rappellent
par leur complexité ceux de la conjugaison des Infusoires.
Les anciens naturalistes, qui prenaient les Grégarines pom* des larves
d'Helminthes, ne s'étaient que très peu préoccupés de leur propagation.
Kolliker, en 1845, émit, pour la première fois, l'idée qu'elles étaient
des organismes unicellulaires, et qu'elles devaient par conséquent se
multiplier à la manière des cellules simples. On sait que Kolliker
avait alors établi un schéma de la division des cellules, dans lequel le
noyau se divisait en deux parties, et autour de ces deux noyaux se
groupait la substance cellulaire ou protoplasma. C'était la génération
endogène des cellules. Kolliker supposait donc que les Grégarines,
en raison de leur nature unicellulaire, se multipliaient de la même
manière.
Cette hypothèse était basée sur des observations incomplètes, et
Kolliker interprétait d'une manière inexacte des faits parfaitement
réels. Dans un second travail {Zeitschr. f. wiss. Zool, t. 1. 1849),
il se montre moins affîrmatif sur cette multiplication des Grégarines
adultes par division, et il avance que leur propagation peut s'expliquer
par la segmentation de la substance de l'organisme pour former des
germes,
La première connaissance que l'on a eue des kystes dans lesquels
les Grégarines s'enferment pour se multiplier remonte à 1835, et
appartient à Henle, alors prosecteur à Berlin, 11 mentionna l'existence
de ces kystes dans un petit travail inséré dans les Archives de Mùller
et relatif aux organes générateurs des Annélides et des Gastéropodes
hermaphrodites. Etudiant les organes génitaux du "Ver de terre
commun, il y trouva un grand nombre de corpuscules fusiformes
LES GREGARINES. 31
qu'il compara , pour la forme , à des graines de courge. Il fut frappé
de l'analogie qu'elles présentent avec les Navicules , Diatomées
qu'alors on regardait généralement, avec Ehrenberg, comme des
animalcules. 11 les considéra comme des organismes parasites qui
devenaient libres par la rupture du kyste qui les renferme en grandes
quantités, et il crut même avoir découvert, sous la coque transparente
et solide, la trace d'un petit intestin.
En 1819, von Siebold, dans son célèbre mémoire : Contribulions à
l'histoire naturelle des Invertébrés, signale l'existence de ces kystes
dans le SciarranitidicoUis, Insecte diptère dont l'intestin héberge une
Gregarina caudala, aujourd'hui du genre Actinoceplialus de Stein. Il
reconnut les corpuscules signalés par Henle et fut frappé de leur
ressemblance avec une navette de tisserand ; c'est pour cette raison
qu'il leur donna le nom de nai'icelles , et c'est sous ce nom que ces
éléments sont encore connus aujourd'hui.
A côté d'eux, Siebold vit des kystes dont le contenu était divisé en
deux, et il comprit qu'ils représentaient des phases moins avancées.
Mais, il n'avait pas trouvé leur relation avec la Ch'egav'ina caudata
qu'il rencontrait en même temps ; par conséquent, tout en ayant bien
reconnu la relation qui pouvait exister entre les diverses espèces de
kystes, il n'avait pas rattaché ceux-ci aux Grégarines qui les accompa-
gnaient.
H. Meckel, en 18-14, dans la glande génitale du Ver de terre, trouva
les mêmes vésicules qu'avait déjà signalées Henle ; mais par une
singulière erreur, il les prit pour les œufs du Lombric ; et comme il les
vit mêlées en grand nombre aux spermatozoïdes , il crut avoir trouvé
là un état hermaphrodite du Lombric , comme il en avait constaté un ,
peu de temps auparavant . chez les Gastéropodes pulmonés. Du reste,
ce n'est qu'en 1856 qu'ont été reconnus pour la première fois . par
Ewald Hering et d'Udekem , les ovules ovariens du Lombric. Henle
réfuta cette erreur et rencontra de nombreuses Grégarines libres , en
même temps que ces kystes à navicules , mais il ne constata pas une
relation entre les kystes et les Grégarines. Dans ce travail , Henle
32 LES SPOROZOAIÏIES.
révoque en doute la multiplication des Grégarines par division, comme
le voulait KoUiker, et il montre que ce que cet observateur avait pris
pour des Grégarines se divisant en deux dans l'intérieur du kyste ,
était des kystes dans lesquels la production des navicelles avait
commencé par la segmentation binaire du contenu , que c'était des
kystes incomplètement développés.
C'est alors, en 1848 , que Stein apparut , et dans les Archives de
Mûller, reconnut, le premier, chez le Monocystis du Lombric et chez
d'autres formes , d'une manière très certaine , la relation entre les
Grégarines, les kystes et les navicelles, Presqu'en même temps (1848),
Frantzius publiait un travail dans lequel il arrivait à peu près au même
résultat ; seulement, tandis que Stein emploie le mot navicelles pour
désigner les germes des Grégarines, Frantzius se sert du moi pseudo-
navicelles, qui est d'ailleurs plus juste. Mais pourvu que l'on s'entende
sur l'objet, peu importe la désignation.
Stein observa, en outre , la conjugaison de deux individus pour la
formation d'un kyste, et étudia toutes les phases de développement du
kyste. Il avait donc saisi à la fois toute la série des phénomènes et
confirmé , par l'observation , l'idée que Siebold avait émise , comme
simple hypothèse , que les kystes à navicelles étaient la phase ultime
de la division des kystes à deux masses.
Stein assimile les navicelles à des spores et compare le processus de
conjugaison, par lequel deux Grégarines s'enferment dans un kyste
pour se multiplier, à la conjugaison des Spirogyra, Zygnema, etc. On
peut rapprocher encore cette conjugaison dans un kyste de celle des
Colpodes qui s'enveloppent aussi deux à deux dans un kyste , dans
lequel leur substance se confond.
Après Stein et Frantzius, la reproduction des Grégarines fut décrite
avec plus ou moins de détails par un grand nombre d'observateurs. Ce
fut d'abord par Kôlhker, en 1849 , dans un travail dont nous avons
déjà parlé. Puis , par Lieberkiihn , dans un mémoire très étendu , ou
Recherches sur l'évolution des Grégarines, écrit en français, parce
qu'il fut présenté à un concours institué par l'Académie des Sciences de
LES GBEGARINES. 33
Belgique, en 1854. Ensuite, Adolf Schmidt , dans un travail inséré
dans les Mémoires de la Soc. d'Histoire naturelle de Senkenberg,
en 1854. Puis , Ed. van Beneden , donna l'histoire de la Grégarine
géante du Homard {Bull, de l'Acad. royale de Belgique (1871).
A. Giard publia une note sur la conjugaison, dans un même kyste, de
la Grégarine de ÏAmarœcium punctum (Arch. de Zoologie expèri-
'inentale , t. II, 1873). Puis, Ed. van Beneden encore, en 1871 et 1872,
fit paraître deux nouveaux mémoires sur les Grégarines , dans les
Bulletins de l'Académie de Belgique; Bay Lankester, dans cette
même année 1872, étudia le Monocystis du Siponcle (Quarterly
Journal of microscopical Science , iS12) ; enfin, plus récemment,
A. Schneider, dans sa thèse souvent citée , et 0. Biitschli [Zeitschr.
f. wiss. ZooL, t. XXXV, 1881) , ont fait paraître dos observations très
circonstanciées sur les phénomènes de reproduction chez les Gréga-
rines, C'est d'après ces différents travaux que je vais essayer de
résumer ce que nous savons aujourd'hui sur la propagation de ces
parasites.
La reproduction des Grégarines a toujours ou presque toujours lieu
dans un kyste. Dès 1848, Stein avait déjà admis comme règle générale
que deux individus s'enfermaient dans un kyste et se réduisaient en
une masse commune dans laquelle se formaient les navicelles. C'était
donc une conjugaison ou une copulation. D'autres auteurs , Lieber-
kiihn, Ad. Schmidt, Frantzius , E. van Beneden, pensent que la
conjugaison ne précède pas nécessairement l'enkystement , que ,
même , une seule Grégarine peut s'enkyster et donner, toute seule ,
naissance h des germes. Néanmoins , il peut arriver, d'après Lieber-
kiihn , que deux individus s'enferment dans un même kyste ; mais
alors il pense que chacun de ces deux individus produit des navicelles
et que leur substance ne se mélange pas. Quelquefois encore, une
seule des deux Grégarines produit des spores , tandis que l'autre n'en
forme pas.
M. Aimé Schneider admet les deux modes d'enkystement , celui
34 LES SPOROZOAIRES.
d'une Grégarine solitaire et celui de deux Grégarines conjuguées. Dans
l'enkystement de la Grégarine solitaire même , il admet diverses
formes. Ainsi, l'enkystement, qu'il considère comme un phénomène
fréquent , peut avoir lieu sans qu'il y ait , à proprement parler, forma-
tion d'un kyste véritable : l'animal ne modifie pas sa forme , mais il
perd son noyau et se résout en un amas de petites spores. C'est ce qui
arrive chez VAdelea ovata, Grégarine du Lithohius forficatus. 11
peut se faire aussi que l'animal s'enkyste en modifiant sa forme : par
exemple, X Actinocephalus Dujat'dini dont A. Schneider a vu les kystes
se former sur le porte-objet du microscope. L'animal s'arrondit ,
sécrète autour de lui une membrane qui devient de plus en plus
épaisse et dans laquelle il s'enferme. Puis, dans l'intérieur de ce kyste,
il se résout en un amas de spores. Schneider admet aussi comme
fréquent l'enkystement de deux individus , ou par conjugaison. Les
animaux se réunissent d'abord par leur extrémité antérieure , s'ap-
pliquent l'un contre l'autre , s'enferment dans le kyste , à l'intérieur
duquel leur substance se confond. C'est ce que Schneider appelle
conjugaison véritable , pour la distinguer de la. pseudo-conjugaison,
dans laquelle deux Grégarines qui étaient réunies pendant la vie
active, en apposition , s'enkystent , mais chacune d'elles formant un
kyste spécial. On a alors une sorte de kyste général , mais formé de
deux loges dont chacune contient une Grégarine , et c'est dans cha-
cune de ces loges que s'opère le phénomène de la sporulation. 11 peut
arriver que la cloison des deux loges disparaisse et que les spores se
mêlent, mais c'est un phénomène tout à fait différent d'une conjugai-
son véritable , d'où le nom de pseudo-conjugaison que lui donne
A. Schneider.
Autant que je puis le comprendre, cet auteur ne paraît pas admettre
la réunion , dans un môme kyste , de deux individus qui , pendant la
vie active , étaient réunis en opposition ; il suppose qu'ils se séparent
avant l'enkystement. Cependant , la conjugaison d'animaux réunis
à l'état de vie active a été plusieurs fois décrite , par exemple ,
par Biitschli, chez la Grégarine (Clepsidrina) de la Blatte. Le
LES GREGARINES.
35
FiG. 6. — Premières phases de l'enkystement de deux individus conjugués de Ctepsidrina
Blattarum. A, ils sont appliqués l'un contre l'autre par une surface plus large. B, ils
commencent à sécréter une substance gélatineuse, g, qui deviendra l'enveloppe extérieure
du kyste. Le segment antérieur ou protomérite, pm, est encore bien, visible dans chaque
Grégarine (d'après Butschli.)
premier indice de la conjugaison , d'après ce dernier observateur;
consiste dans la tendance que manifeste chaque individu à prendre
une forme plus ramassée et à s'arrondir, eu présentant d'une façon
moins nette ses deux segments. Puis, les deux animaux réunis exé-
cutent un mouvement en cercle de plus en plus rapide , et c'est , pour
ainsi dire , par suite de ce mouvement , qu'ils prennent la forme
arrondie qu'ils doivent conserver dans le kyste. La substance de la
périphérie s'éclaircit, tandis que la partie centrale devient, au contraire,
plus foncée , brunâtre ; les granules qui existaient dans le corps des
animaux paraissent abandonner la périphérie pour se rassembler au
centre. Puis, les deux individus s'appliquent étroitement l'un contre
l'autre, une enveloppe membraneuse se produit autour d'eux et devient
de plus en plus épaisse ; la partie interne de cette enveloppe paraît
formée de couches concentriques ou de lamelles appliquées les unes
sur les autres, tandis que la partie externe est plus homogène. C'est la
partie lamelleuse qui doit être considérée comme la véritable paroi du
kyste. A ce moment , les deux segments de chacun des animaux ne
sont pas encore confondus et ils montrent encore leur protomérite et
leur deutomérite ; ce n'est qu'après un certain temps que la cloison
36
LES SPOROZOAIRES.
disparaît ; puis , en quai'ante-huit heures , toute trace de séparation
entre les deux individus s'est évanouie, et leur substance s'est mêlée.
Le kyste prend une forme ovoïde , ajoute Biitschli , mais ce dernier
détail doit être une particularité propre à l'espèce de Grégarine qu'il a
observée, car, le plus souvent, le kyste conserve tout le temps sa forme
sphérique.
p rnÀ ^
'^/'A
peL-
FiG. 7. — Deux phases plus avancées de l'enkystement. L'enveloppe propre du kyste A;,
s'est formée en dedans de l'enveloppe gélatineuse, g. On voit, chez B, les vestiges de
quatre sporoductes, spd. Chez A, le protomérite, pin, de l'un des individus est encore
visible (d'après BUtschli.)
Chez la Grégarine de la Blatte (Clepsidrina Blattarum) étudiée par
Biitschli, les animaux ont employé 75 minutes pour former leur kyste ;
mais il faut beaucoup plus de temps pour la production des phéno-
mènes qui vont se passer dans le kyste. Nous laisserons , quant à
présent , l'histoire de cette Grégarine , à laquelle nous reviendrons
bientôt.
La paroi des kystes des Grégarines est toujours très résistante, et
parfois très épaisse ; c'est un organe de protection pour les individus
qu'ils renferment , et beaucoup plus efficace que la cuticule de
l'animal adulte , cuticule si perméable à l'eau. La paroi du kyste ,
au contraire , placée dans l'eau , résiste parfaitement et ne se laisse
pas pénétrer, car le kyste ne se gonfle pas. Elle résiste de même à la
dessication. En effet , les kystes sont destinés à être évacués et , en
LES GREGARINES. 37
tombant dans le monde extérieur, ils peuvent être exposés aux cir-
constances les plus diverses ; ils peuvent être immergés ou desséchés.
Leur enveloppe est destinée à les protéger contre ces alternatives , et
elle remplit parfaitement son office.
D'après l'observation que A. Giard a faite sur une Grégarine parasite
d'une Ascidie composée, [Amarœciwm punclum), et qui, par consé-
quent, est une Grégarine marine, on peut provoquer artificiellement la
conjugaison et l'enkjstement des individus en laissant s'évaporer en
partie l'eau de la préparation sur le porte-objet , mais non pas complè-
tement, ce qui tuerait les animalcules. Des conditions se produisent
ainsi qui avertissent les animaux qu'il y a urgence de s'enkyster pour
se préserver de la dessication. On sait qu'on peut aussi provoquer les
Infusoires à s'enkyster pour leur conservation , en laissant diminuer
l'eau dans laquelle ils vivent , par exemple , les Stylonychies , les
Euplotes, etc. Chez les Colpodes, qui forment des kystes de conjugai-
son, la dessication paraît aussi avoir une certaine influence sur la
formation de ces kystes et , par conséquent , sur le mode de reproduc-
tion, d'après les observations déjà anciennes de Gerbe.
On peut se demander si la saison influe sur la production des kystes.
A ce sujet , E. van Beneden a observé qu'en examinant les Homards
pendant les mois du printemps et de l'été , il trouvait toujours des
Grégarines à l'état actif dans l'intestin , et jusqu'à vingt-cinq à la fois ,
mais pas de kystes. En automne , au contraire , il ne trouvait que des
kystes, et pas de Grégarines libres. Ces kystes étaient logés dans la
paroi du rectum , sous le revêtement épithélial , formant des séries
linéaires de 5 à 7 kystes. Nous verrons comment cette disposition peut
s'expliquer.
Voyons maintenant comment se produisent les germes , spores ou
propagules.
Le mode de production de ces germes n'a encore été étudié que
d'une façon très incomplète ; il est assez mal connu, et j'ai trouvé peu
de concordance entre les auteurs qui s'en sont occupés. Le processus,
38 LES SPOROZOAIRES.
d'ailleurs , paraît présenter des variations , même dans une seule et
même espèce. Par conséquent, je me vois dans l'impossibilité d'en
donner ici un schéma unique et je dois me contenter de relater les
observations des principaux auteurs.
D'abord, Stein : La phase la plus précoce du développement qui
doit conduire à la formation des pseudonavicelles est celle qui pré-
sente , dans le kyste , deux masses sphériques appliquées l'une contre
l'autre et formées par le corps des deux individus conjugués. A une
phase plus avancée , les deux masses sont fusionnées en une seule : il
est nécessaire alors que la cuticule de chaque animal soit résorbée.
Lorsque le kyste ne présente plus à son intérieur qu'une masse unique,
commence le phénomène de la sporulation. On voit d'abord les granu-
lations de la masse commune se rassembler en petits amas isolés, dans
toutes les parties du contenu du kyste, et principalement à la péri-
phérie. A la surface, se découpent des lobes plus ou moins irréguliers,
ce qui donne au contenu l'aspect d'un œuf irrégulièrement segmenté.
Un peu plus tard , les amas granuleux qui se trouvaient dans ces lobes
ont disparu avec les lobes eux-mêmes qui se trouvent à l'état libre à la
périphérie du kyste ; c'est-à-dire qu'il s'est formé , à la surface de la
masse, de petites vésicules très claires , composées d'une paroi mince
et d'un contenu granuleux. Quand le kyste est ainsi rempli de vési-
cules claires , sphériques , ces vésicules commencent à se transformer
en navicelles en prenant une forme ovalaire et en s'entourant d'une
substance claire , d'aspect mucilagineux , qui forme un prolongement
en pointe à chaque extrémité de la vésicule allongée , avec un petit
renflement à chaque pôle , disposition plus ou moins marquée ,
d'ailleurs, suivant les espèces. Quand le kyste est ainsi rempli, on
voit que les spores ont une disposition à venir s'accumuler contre la
paroi interne du kyste , où elles forment une couche périphérique plus
ou moins épaisse. La masse centrale est formée d'un liquide contenant
des granulations plus ou moins nombreuses ; quelquefois , une partie
assez considérable de la substance centrale reste non employée et
s'interpose entre les spores. On a alors des figures dans lesquelles
ain-xan^i^u ai.% uuuxwai^i
LES GREGARINES. 39
chaque pseudonavicelle est séparée de ses voisines par des granula-
tions en plus ou moins grande quantité. C'est probablement ces granu-
lations qui , en se liquéfiant , constituent le liquide du kyste mûr. —
Telle est la description, donnée par Stein, de la formation des spores
chez le Monocystis du Lombric et chez les Grégarines du Tenehrio
molitor et de la Blatte.
Lieberkiihn admet que, dans certains cas , les choses peuvent se
passer ainsi , c'est-à-dire que le contenu du kyste se transforme en
vésicules claires et sphériques dont chacune devient une navicelle.
Mais il conteste que le phénomène ait cette généralité; les navicelles
peuvent se former encore de deux manières différentes , et cela chez
une même espèce, le Monocystis du Lombric , par exemple : d'abord ,
par le processus décrit par Stein , puis , par un premier mode qui res-
semble tout à fait à une segmentation presque régulière , comme cela
se produirait sur un œuf, et jusqu'à ce que toute la masse se soit
convertie en petites sphères de segmentation. Ces sphères sont très
égales et très granuleuses ; elles se transforment en pseudonavicelles
en s'allongeant, en se revêtant d'une coque solide et en liquéfiant leur
contenu. On peut appeler ce processus formation par segmentation
plus ou moins régulière. Mais, à côté de celui-ci, Lieberkiihn en admet
un autre , dans lequel le contenu , au lieu de produire ces globules
granuleux , se divise en deux moitiés , puis en quatre ou cinq masses
plus ou moins volumineuses , et chaque masse se recouvre, par un
mécanisme encore mal étudié , d'une couche de petits globules trans-
parents ou à peine granuleux. Ce sont ces globules qui se détachent
des sphères et se transforment en navicelles. Les sphères se liquéfient
et le kyste présente à la fiin le même aspect que dans les cas
précédents.
En effet, j'ai observé, sur le Monocystis agilis du Lombric, ces
modes de formation des spores et l'on peut admettre la réalité de ces
trois processus. Pour l'espèce dont il s'agit, le dernier est peut-être le
plus fréquent. (PI. I, fig. 1-8. )
E. van Benedeu a constaté un phénomène curieux dans le kyste de
40 LES SPOROZOAIRES.
la Grégarine du Homard, phénomène qui ne conduit pas directement
à la formation des navicelles, mais conduit d'abord à la multiplication
des kystes ; c'est une prolifération des Grégarines enkystées. Il a vu le
contenu du kyste se diviser en deux masses dont chacune s'arrondit
et devient un globule plus ou moins régulier : on croirait donc avoir
sous les yeux le début de la formation des pseudonavicelles , mais il
n'en est pas ainsi : chaque masse s'entoure d'une enveloppe et forme
comme un kyste secondaire dans le kyste primitif. Et ces deux kystes
secondaires se divisent à leur tour en deux nouvelles masses qui s'en-
tourent aussi d'une membrane ; de sorte que le kyste primitif en a
engendré quatre qui sont renfermés dans son enveloppe, mais réunis
deux à deux dans les deux enveloppes secondaires. C'est la multi-
plication des kystes. Ce phénomène n'a encore été observé que par
E. van Beneden, et c'est évidemment par cette multiplication des
kystes qu'il faut expliquer leur disposition sériaire, à la file les uns des
autres, dont nous avons parlé précédemment.
Quant à la manière dont les navicelles se forment dans les kystes,
E. van Beneden ne donne pas de détails à ce sujet.
Aimé Schneider n'a rien ajouté de bien important quant au processus
général, mais, chez quelques espèces, il a (iécrit des particularités
très intéressantes. Chez le SLylorhynchus oNongaius, Grégarine que
nourrit un Insecte Coléoptère, VOpatrum sabulosum, il a vu que le
premier phénomène de la sporulation consiste en une sorte de globula-
tion de la surface extérieure du kyste. Le contenu, après la fusion des
deux individus, (Fig. 8, 1) présente à sa surface des lobes et des lobules
très nombreux qui se recouvrent d'une couche de petits globules
transparents (2, 3). Quand ces lobules sont produits sur toute
la surface des lobes , on les voit s'allonger et prendre une forme
fusiforme, mais l'extrémité inférieure des fuseaux demeure implantée
dans la masse centrale restée granuleuse (4). Ces petites masses
allongées en bâtonnet exécutent des mouvements d'extension et de
contraction suivant leur grand axe, tout en restant fixés par une de
leurs extrémités sur la masse centrale , tandis qu'en même temps , on
LES GREGARINES.
41
5"
;/
FiG. 8. — Formation des spores chez le Stylorynchus oblon'jatus. 1 , kyste avant le
début du travail sporigène. 2, phase de la gemmation des spores. 3 , premier stade de
gemmation (figure plus grossie.) 4 , portion de kyste montrant les masses sporigènes sous
forme de petits bâtonnets mobiles. 5, pseudokyste isolé du kyste. 6, Kyste mûr dont
1 enveloppe rompue laisse échapper les chapelets de spores et montre le pseudokyste à
l'intérieur du kyste. On voit à côté une portion plus grossie du chapelet de spores
(d'après Schneider.)
voit l'autre extrémité se tordre en décrivant un mouvement en 8 de
chiffre. Il se produit ainsi dans le kyste une sorte de danse ou de
fourmillement très intense et très prolongé , car on peut l'observer
pendant vingt heures. Puis , les bâtonnets reviennent à la forme sphé-
rique et peu à peu prennent celle des navicelles ovalaires. Au moment
où l'enveloppe solide des spores commence à se produire, celles-ci sont
incolores, mais peu à peu elles prennent une teinte brunâtre, de sorte
que le kyste, d'abord de couleur blanche, prend une nuance de plus en
plus foncée et finit par devenir noir comme du charbon.
La masse centrale à la surface de laquelle se produisent les globules
qui deviendront des navicelles (5, 6) est désignée sous le nom de
pseudokyste "^B-v M. Aimé Schneider, qui lui fait jouer un rôle très
important dans l'émission des spores, rôle sur lequel nous reviendrons
plus tard.
42
LSS SPOROZOAIRES.
Bùtschli a suivi les mêmes phénomènes sur le Clepsidrina Blatla-
rum. Nous avons déjà décrit, d'après cet auteur, l'enkystement de cette
espèce et nous nous sommes arrêtés à la phase où le kyste s'est allongé
et présente encore la ligne de séparation des deux animaux sur
lesquels on peut même quelquefois distinguer encore le proto et le
deutomérite.
>t...4 —
-/--y
FiG. 9. — Kyste bien développé de la Clepsidrina Blattarum , mais présentant encore
les corps distincts des deux Grégarines; sp, couche cellulaire périphérique des pseudo-
navicelles ou spores ; k, enveloppe propre du kyste, g , son enveloppe gélatineuse (d'après
Blitschli.l
La formation des pseudonavicelles commence iongtcimps avant que
la substance des deux animaux se soit confondue en une seule masse,
mais il est possible qu'au moment où cette formation des spores a
commencé, la fusion des animaux ait déjà eu lieu dans le centre du
kyste et que la séparation ne soit qu'extérieure. C'est ce qu'il est
difficile de vérifier. La formation des spores commence par une sorte
de gemmation à la périphérie des deux individus dans le kyste. On
voit, en effet, apparaître à la surface des deux animaux une couche
claire formée de petits éléments pressés les uns contre les autres,
enveloppant tout le contenu, mais ne pénétrant pas dans la hgne de
jonction des deux individus. Cette couche apparaît sous la membrane
LES GREGARINES. 43
comme une couche de cellules qui revêt la masse centrale, ainsi que le
blastoderme dans un œuf d'Insecte. On croit voir un épithélium cylin-
drique formé de petites cellules polygonales par pression réciproque.
Quand on rompt le kyste, les petits éléments s'isolent et prennent la
forme sphérique : ce sont de fines cellules sans membrane et munies
d'un petit noyau.
r^nss A.
FiG. 10. — Portion très grossie du bord d'un kyste au même degré de développement que
celui de la fig. 9. q, enveloppe gélatineuse ; k, enveloppe propre ; sp, couche des pseudo-
navicelles recouvrant la masse centrale granuleuse (d'après Blitschli.)
La formation de ces petits éléments soulève évidemment diverses
questions. On peut se demander quelle est l'origine de leur noyau. On
admet difficilement aujourd'hui qu'un noyau puisse se former d'emblée
au milieu d'un blastème ; on pense généralement que tout noyau dérive
d'un autre noyau, son ancêtre. C'est aussi ce que s'est demandé
BiitschU. En ouvrant des kystes qui ne présentaient pas encore cette
disposition cellulaire à la surface, il a pu isoler dans la couche péri-
phérique claire un grand nombre de noyaux semblables à ceux des
petites cellules, ce qui indiquait que ces noyaux préexistaient aux cel-
lules. Mais d'où viennent ils? Du noyau originaire des Grégarines
conjuguées? En brisant le kyste, Biitschli -a pu trouver les nojaux
des deux Grégarines, mais modifiés : ils étaient devenus plus petits et
se trouvaient sur la voie d'une transformation. Deux hypothèses
sont donc possibles : les noyaux sont nés par une sorte de formation
spontanée dans le protoplasma périphérique, ou bien, et cette suppo-
sition paraît plus plausible, ils dérivent du noyau originaire des deux
Grégarines, car on sait très bien aujourd'hui que dans un œuf d'Insecte
44 LES SPOROZOAIRES.
les noyaux des cellules du blastoderme dérivent du noyau primitif de
l'œuf, la vésicule germinative.
Au bout de quelque temps, la surface du kyste est devenue homo-
gène, mais toujours plus claire ; l'apparence cellulaire a disparu, et le
kyste ne présente à sa surface qu'une zone transparente finement
granuleuse. Les cellules ont émigré dans la masse centrale où elles
ont formé un amas. C'est ainsi que cette masse qui était transparente
s'obscurcit au centre. — Quel est le mécanisme de cette émigration? —
On l'ignore. C'est dans cette partie centrale du kyste que les jeunes
pseudonavicelles atteignent la maturité en attendant leur évacuation.
Telles sont, d'après Biitschli, les différentes phases de la formation
des pseudonavicelles. Toutes ces phases ont été entrevues plus ou
moins nettement par les prédécesseurs de Biitschli, tels que Stein et
Lieberkiihn. Aimé Schneider, de son côté, a décrit chez les Clepsidrina,
Euspora et Gamocystis un aspect de mosaïque qui n'est autre chose
que cette couciie unique. A. Schneider n'a pas pu suivre la formation
de ces éléments et croit qu'ils dérivent de la fragmentation de la partie
claire du kyste. 11 n'a donc pas reconnu cette phase d'une manière
aussi complète quu Bûtschli. Il a vu aussi, d'ailleurs, que ces petites
cellules émigrent dans l'intérieur du kyste.
C'est ainsi que les faits sont décrits par les auteurs ; il nous reste
à voir maintenant comment les spores, arrivées à maturité dans l'inté-
rieur du kyste, sont mises en liberté. En d'autres termes, nous avons
à étudier leur mode de dissémination dans le monde extérieur et à
décrire la série des phases par lesquelles ces spores retournent à l'état
de Grégarines, c'est-à-dire à faire l'histoire du développement de ces
intéressants protozoaires.
LES GREGARINES. 45
IV
D'après ce que uous avons vu, chez certaines espèces de Grégarines,
. s» ôpores se forment à la surface du kyste, et quand celui-ci est mûr
il est rempli de pseudonaviceUes plus ou moins avancées , tandis que
la partie non employée se liquéfie et produit une substance plus ou
moins abondante et granuleuse. Chez d'autres , les pseudonaviceUes
se constituent sous la forme d'une véritable couche de cellules à la
périphérie du kyste , couche qui se disloque bientôt , les spores péné-
trant au centre du kyste , où elles se rassemblent , entourées par la
substance gi'anuleuse. A la maturité , elles sont mises en liberté ,
comme les graines d'une plante qui sortent du fruit lors de sa déhis-
cenco. Mais . de même qu'il existe divers procédés pour déterminer
la déhiscence du fruit et la dissémination des graines, on trouve qu'il y
a aussi divers mécanismes pour la déhiscence des kystes grégarinaires
et pour l'émission des pseudonaviceUes.
On a observé jusqu'à trois modes de déhiscence des kystes. Le plus
fréquent et le plus simple est la rupture de l'enveloppe du kyste ,
rupture qui met les spores en liberté. Elle est probablement due au
gonflement de la substance granuleuse qui n'a pas pris part à la for-
mation des spores. C'est ce qu'on observe chez la plupart des Gréga-
rines: Monocystis, Urospora, etc., parmi les Monocyslidées, Hoplo-
rhynchus, Aclinocephalus , Pileocephalus , Hyalospora, Porospora,
Euspora, etc., parmi les Polycystidées. Mais, dans quelques cas,
l'ouverture du kyste et la dissémination des spores se font par un
mécanisme beaucoup plus compliqué et qui varie avec les différentes
espèces. Par exemple , la rupture peut avoir lieu à l'aide du pseudo-
kyste, d'après A. Schneider, et ce cas n'a encore été observé que sur le
Stylorhynchus ohlongaius (1). Nous savons que les spores se forment
(1) Ce mode de déhiscence par un pseudokyste a été observé aussi depuis, par M. Aimé
Schneider, dans deux genres nouveaux de Grégarines , Lophorhynchus et Trichorhynchus
{Archives de Zool. expéi:, t. X, 1882, p. 439).
46 LES SPOROZOAIRES.
chez cette espèce à la surface de la masse granuleuse constituant le
contenu primitif du kyste. Ce sont des formations périphériques ; la
partie centrale granuleuse ne prend pas part à leur production ; elle
constitue un globule arrondi qui s'entoure d'une fine membrane , et il
en résulte une sorte de faux kyste dans l'intérieur du premier. C'est
ce pseudokyste qui se gonfle au moment de la maturité, fait éclater la
membrane du premier kyste et fait échapper les spores sous forme de
longs chapelets qui flottent dans le liquide. Le pseudokyste reste dans
l'enveloppe du kyste véritable. Il est composé d'une membrane d'enve-
loppe beaucoup plus mince que celle du premier, contenant une masse
granuleuse homogène dans laquelle on n'observe pas de zone granu-
leuse transparente ni de zone opaque comme dans le kyste véritable.
Ce processus se présente déjà comme un premier pas vers une
complication plus grande ; il y a kyste et pseudokyste , et ce dernier
joue le rôle d'un appareil à dissémination. Mais on trouve un troisième
procédé bien plus complexe encore chez deux genres , — les seuls , je
crois, sur lesquels il ait été observé , — les genres Clepsidrina et
Gamocystis.
Ce phénomène a été entrevu et figuré d'abord par Stein , mais très
incomplètement, puis décrit d'une manière bien plus détaillée par
A. Schneider. [Arch. de zool. expèrim. de Lacaze-Duthiers, t. II,
1873 . puis. Comptes rendus de VAc. des Se, 1875. et dans sa thèse,
Arch. de zool. exp., t. IV. 1875) : enfin, par Biitschli (Ze^^sc/^ f. wiss.
Zool., t., XXXV, 1881), qui est entré dans de plus grands détails sur
cette question que A. Schneider, mais qui d'ailleurs confirme presque
toutes les observations essentielles de cet auteur. Toutefois , c'est à
A. Schneider que revient le mérite d'avoir étudié, le premier, le méca-
nisme si curieux de la dissémination des spores dans le Clepsidrina
et le Gamocystis.
A propos du Clepsidrina de la Blatte , il nous faut revenir à la
formation du kyste , alors que les spores ont pénétré au centre et
attendent le moment d'être évacuées par un appareil qui bientôt se
constitue dans la partie périphérique du kyste. Cet appareil d'émission
LES GRBGARINES.
47
consiste en un système de tubes qui plongent dans le centre de l'amas
des spores et traversent la membrane du kyste. C'est par ces tubes
que les spores sont évacuées, en raison de quoi A. Schneider les
désigne sous le nom do sporoductes, car c'est lui qui les a découverts.
Le premier vestige de cet appareil se montre environ quarante-huit
heures après la conjugaison des deux animaux dans le kyste, alors que
la ligne de démarcation a disparu. 11 débute par la formation d'une
enveloppe très fine autour de la masse granuleuse , membrane qui va
jouer un rôle important dans l'émission des spores. On sait que le
kyste a une grande épaisseur, qu'il est composé d'une masse gélati-
neuse, puis, d'une membrane assez épaisse. C'est au dessous de celle-
ci que se forme l'enveloppe mince autour de la masse granuleuse
(fig. 11, B). Quand cette couche s'est formée, par sécrétion ou par
excrétion , on voit sur des points disséminés de la surface du kyste ,
de petites taches claires qui apparaissent éparses sur le contenu ;
.....S/^tt
Fig. 11. — Deux phases plus avancées de l'enkjstement. L'enveloppe propre du kyste k,
s'est formée en dedans de l'enveloppe gélatineuse, g. On voit, chez B, les vestiges de
quatre sporoductes, spd. Chez A, le protomérite, pm, de l'un des individus est encore
visible (d'après BUtschli.)
et on remarque, en faisant pénétrer un peu plus profondément le
foyer de l'objectif, que ce sont les extrémités périphériques de
cordons protoplasmiques qui plongent de la surface vers le centre du
48
LES SPOROZOAIRES.
kyste et traversent toute la couche de substance granuleuse enve-
loppant la masse sporifère (fig. 11, B, spd). Ces cordons sont pleins et
homogènes, mais dans l'axe du protoplasma qui les constitue s'établis-
sent les tubes d'émission proprement dits. Ce sont des tubes mem-
braneux qui ne sont que les prolongements de la mince membrane
périphérique formée à la surface du contenu. Ils s'ouvrent probable-
ment déjà à la surface, mois pendant qu'ils se constituent, les cordons
protoplasmiques qui ont, pour ainsi dire , servi de matrice à chacun
d'eux, s'épaississent à l'embouchure des tubes et il s'y forme un amas
granuleux envoyant des ramifications dans tous les sens, ramifications
FiG. 12. — Kysle mtir de Clepsidrina Blattarum montrant ses neuf sporoductes, spd,
renversés en dehors ; sp, masse sporifère au centre du kyste ; p, tubes plasmaliques
conduisant les spores vers l'orifice interne des sporoductes ; k, enveloppe propre très
épaissie et revenue sur elle-même ; g, enveloppe gélatineuse (d'après Biitschli.)
qui s'anastomosent et produisent une sorte de réseau , lequel se
distribue dans toute la substance du kyste , (comme le réseau que l'on
décrit dans le protoplasma de certaines cellules). Cette dernière
observation appartient à Biitschli qui a mis le réseau en évidence à
l'aide de la potasse caustique à 35 pour 10^. Celle-ci dissout les gra-
nulations en laissant le réseau parfaitement visible , et au centre de
celui-ci, les spores (fig. 12). Quand les sporoductes ont commencé à se
LES GREGARINES. 49
dévolopper, ils ne tardent pas à se constituer en tubes. A. Schneider et
Biitschli ont décrit cette l'ormation d'une manière à peu près concor-
dante . mais le premier observateur distingue , dans les sporoductes,
deux portions : une partie basilaire ou périphérique renflée, courte
et épaisse , suivie d'une partie centrale beaucoup plus longue et
étroite , qui plonge dans la masse centrale des spores. C'est cette
portion qui s'évagine et qui soi-t à travers l'enveloppe du kyste et la
couche gélatineuse externe pour donner issue aux spores. Biitschli
pense que les sporoductes ne sont pas formés de deux parties distinctes,
mais que la portion basilaire , plus épaisse , n'est qu'un renflement
léger subi par le sporoducte à la limite de l'évagination , car le tube
.se retourne comme un doigt de gant et la portion renflée n'est qu'un
bourrelet formé par la partie du tube qui ne s'est pas évaginée. Biitschli
a montré que ce qui fait paraître plus épaisse la base du tube , c'est
une masse de substance fibrillo-grauuleuse qui l'enveloppe et dont on
ne connaît pas la nature.
bj^
FiG. 13. — Portion basilaire renflée d'un sporoducte évaginé, s/jrf ; by, bourrelet plas-
matique entouranl la base ; />, tube de plasma ayant servi de matri-'e au sporoducte , /",
masse fibrillo-granuleuse autour de la base du sporoducte (d'après BUlschli?)
Le nombre des sporoductes varie avec la gi-osseur des kystes ; plus
les kystes sont volumhieux , plus les tubes d'émission sont nombreux.
Chez la Grégarine de la Blatte, qui a particulièrement seivi aux
50 LES SPOROZOAIRES.
observations de Bûtschli, les tubes sont au nombre de trois au
minimum et de douze au maximum. Chez le Clepsidrina Munieri qui
vit chez un Chrysomélien , le Timarcha tenehricosa , on en trouve de
trois à six et chez le Gamocystis ie^ioâ?, jusqu'à douze.
Au moment de la maturité des spores, il se fait, comme nous l'avons
dit , une évagination des tubes qui se renversent en dehors , et, lors,
ils se dirigent tous vers la partie périphérique et vont plonger dans la
substance mucilagineuse homogène qui forme la zone extérieure de
l'enveloppe du kyste. Quelle est la cause de cette évagination?
A. Schneider l'attribue au gonflement de la substance granuleuse.
Je ne comprends pas bien , pour ma part , comment les spores , qui
sont plongées au centre , peuvent être expulsées par le gonflement de
cette substance granuleuse qui les entoure, gonflement qui ne pourrait,
au contraire, que les resserrer au centre. Biitschli me paraît plus près
de la vérité quand il attribue l'éruption des sporoductes et la sortie
des spores à la seule élasticité de la capsule qui forme la paroi du
kyste. En se gonflant , celle-ci tend constamment à réagir sur le
contenu et détermine , par sa pression , l'éruption des tubes. Mais,
comment les spores sont elles guidées vers les embouchures des
canaux ? Si l'on se rappelle ces cordons protoplasmiques dans l'axe
desquels se sont formés les sporoductes , on comprend la sortie des
spores. Ces cordons, après que les tubes se sont formés et évaginés ,
laissent à leur place un espace vide en forme de canal qui guide les
spores vers les orifices de sortie. Telle est l'exphcation très simple
que donne BiitschU de l'émission des spores ; mais il est moins facile
de comprendre comment cette zone qui forme l'enveloppe du kyste
n'est pas fissurée , fendue , brisée par la pression violente des sporo-
ductes qui traversent sa substance. Il faut admettre qu'au moment de
la maturité., l'enveloppe du kyste et sa couche mucilagineuse se
ramolUssent beaucoup et permettent un passage facile aux sporoductes
à travers leur substance.
Ce curieux appareil d'émission a encore été observé sur une autre
espèce, le Gamocystis tenax, par A. Schneider, qui en a donné une
LES GREGARINES.
5t
FiG. 14. — Kyste du Gtimocystis lenax en voie d'émission des spores
(d'après Schneider.)
e.voellente liiiure. Les sporoductes sont plus nombreux que dans l'es-
pèce précédente ; leur formation a dû se produire de la même manière.
Ils paraissent aussi composés d'une partie basilaire et d'une partie
centrale. La seule différence avec le Clepsidtnna Blaitaruw. est que
ies spores, au lieu d'être évacuées en longs filaments moniliformes,
restent sous forme d'amas irréguliers à l'extrémité de chaque sporo-
ducte et se trouvent logées dans l'épaisseur de la substance mucilagi-
ueuse probablement ramollie à ce moment.
Nous avons dit que Stein, le premier, a entrevu ces phénomènes.
C'est sur le Clepsidi^ina polymorpha, du Tenehrio molitor, en
1848 ; il avait vu les spores traverser, sous forme de files, Tenveloppu
extérieure du kyste, mais il croyait qu'il seprofluisait des fissures dan.s
cette enveloppe et que les spores suivaient ces fissures pour sorlii-.
11 n'avait pas vu les tubes dont la découverte appartient à A. Schneider,
qui, dès 1873, avait parfaitement reconnu les faits principaux de ce
très intéressant mécanisme.
K2 LES SPOROZOAIRES.
Jetons maintenant un coup d'œil sur les spores ou pseudonavi-
celles.
Nous avons déjà indiqué les diverses laçons dont elles ont été envi-
sagées par les observateurs. Henle, qui, le premier, les a observées à
l'état mûr, dans la Grégarine du Lombric, les confond avec les Navi-
cules, qui sont aujourd'hui des Diatomées. Il avait parfaitement reconnu
en elles des parasites, mais il se trompait dans son interprétation. On
regardait alors, du reste, les Diatomées comme des animaux. Siebold
leur donne le nom de navicolles, changé en celui de pseudonavicelles
par Frantzius. — Stein les reconnut pour les propagules des Grégarines
et alla même jusqu'à leur donner le nom de spores. Puis, Lieberkiihn,
qui a observé toutes les phases de leur formation chez la Grégarine
du Lombric , les désigna sous le nom de Psorospermies qui a été
appliqué à tant d'organismes divers, et même à des phases de dévelop-
pement de tant d'êtres différents qu'il faut le rejeter pour en adopter
un autre, car il ne peut que porter la confusion dans l'esprit.
C'est pourquoi A. Schneider propose de les appeler tout simplement
spores, ce nom indiquant qu'il considère ces organismes, non pas
comme le produit d'une génération sexuelle à la suite d'une féconda-
tion, mais comme correspondant aux spores des végétaux, lesquelles
se produisent en dehors de toute opération sexuelle. Mais, je crois qu'il
s'est un peu trop hâté en déniant à la reproduction des Grégarines le
caractère d'un acte sexuel. Stein avait déjà comparé cette multiplica-
tion dans un kyste à la conjugaison des Spirogyra où l'on voit le
contenu de deux cellules conjuguées s'entourer d'une enveloppe pour
former une zoospore, fait qui, pour les botanistes, est bien le résultat
d'une véritable conjugaison. On ne voit pas pourquoi les zoologistes ne
se rallieraient pas à l'opinion des botanistes, en reconnaissant dans le
phénomène qui nous occupe une véritable fécondation , mais chez des
éléments où il n'y a pas encore de différenciation morphologique entre
l'élément mâle et l'élément femelle, du moins au point de vue où nous
pouvons les juger, car il est évident qu'au point de vue physiologique,
il y a des différences sexuelles. Je crois donc qu'il faut encore
LES GREGARINES.
53
réserver notre opinion relativement à la signification de la reproduc-
tion des Grégarines, reproduction que, pour ma part, je suis très tenté
de regarder comme un phénomène sexuel.
La forme de spores est très différente suivant les genres, mais il est
remarquable que, dans chaque genre, les spores ont la même forme.
Chez les Clepsidrina, par exemple, elles sont à peu près rectangu-
laires ou en forme de petits barillets, tandis que dans d'autres genres,
elles ont l'aspect de petites navicules. C'est par suite de cette forme
FiG. 15. — a, b. c, pseudonavicelles du Monocyxtis du Lombric, à trois stades différerts
du développement. On voit, chez a et h, le noyau primitif, m, de la spore ; chez c, le fais-
ceau des corps falciformes, dont chacun renferme un noyau n, et le nucléus de reliquat, r.
La figure de droite représente une spore mûre de Clepsidrina Biattarutn (d'après
Butschli.).
des spores, constante dans un même genre, que A. Schneider a pu se
servir de ce caractère pour classer les Grégarines par genres , car il
est bien difficile d'étabhr une classification sur les espèces à l'état
adulte, surtout chez les Monocystidées où la ressemblance est complète
entre certains genres et certaines espèces, par exemple les Monocystis
et les Gonospora. La forme des spores fournit donc un caractère
excellent pour l'établissement des genres.
Sous le rapport de leur forme , A. Schneider distingue d'abord des
spores simples et des spores qu'on peut , avec lui , appeler concrètes.
Ainsi, chezle Pileocephalus chmensis, ÇP\. II, A) les spores simples ont
la forme de petits croissants, mais en se réunissant par la moitié de leur
longueur, elles donnent naissance à des formes trigones, des spores à
54 LES SPOROZOAIRES.
trois pointes résultant sans cloute d'un accolement pendant leur déve-
loppement; ce qui s'explique, d'ailleurs, fort bien par la marche même
de ce développement, et nous montre qu'elles résultent de cellules qui
se multiplient par division. Ces formes trigones représentent des cel-
lules incomplètement divisées. — Elles peuvent varier aussi par
simple polymorphisme. Ainsi, chez leMonocysiis du Lombric, la forme
typique est la navicelle bien connue (PI. II, fig. 1). mais on en trouve
d'autres qui sont piriformes, fusiforraes ou triangulaires (PI. II. fig. 2).
Ce sont, sans doute, des formes concrètes.
Chez ces mêmes Monocystis, il y a aussi des différences de taille,
des macrospores et des microspores, mais qui ne diffèrent absolument
que par la taille (PI. II, fig. 3) : et, entre les plus grandes et les plus
petites spores, on trouve toutes les tailles possibles. Il est donc difficile
de dire, au premier abord, si ces spores différentes appartiennent aune
même espèce ou à des espèces difiFérentes. Et, en effet, il y a chez le
Lombric, d'autres parasites que le Monocystis agilis. Ainsi , Schmidt
a déjà décrit, chez ce ver, une autre Grégarine, le Monocystis magna.
La structure des spores est assez simple. La paroi varie beaucoup
comme épaisseur, mais est toujours très lésistante. Cette membrane
est presque toujours transparente et incolore , excepté chez le Stylo-
rhynchus où elle est brune , de sorte que, quand les spores sont
réunies dans le kyste, elles donnent a celui-ci une teinte presque aussi
nou'e que celle du charbon , apparence manifeste surtout au moment
de la rupture, quand les spoi-es brunes tranchent par leui' imance sur
la paroi du kyste qui est incolore (1).
Cette membrane d'enveloppe de la spore est intéressante chez quel-
ques espèces, le Porospora gigantea , par exemple, genre établi avec
le Gregarina gigantea de E. Van Beneden. La membrane est très
épaisse et présente des striations comme des canaux poreux (PI. IL B).
Chez une autre Grégarine , VAdelea ovata , — et je crois que c'est
(1) Celte teinte noire Hes spores a été observée aussi récemment chez le Lophorhynchus
insignis (voir Aimé Schneider, Arch. de zool. exp., t. X, 1882, p. 435).
LES GREGARINES. S$
le seul exemple connu — l'enveloppe de la spore est formée de deux
valves, et il est curieux de rencontrer là un caractère que nous
trouverons dans certaines Psorospermies avec lesquelles ces organis-
mes ont quelques analogies. D'autres spores sont munies d'un prolon-
gement de la membrane d'enveloppe en forme de queue , chez
VUrospora Nemertis, par exemple (PI. II, âg. 6.)
Relativement au contenu, on ne constate pas moins de différences.
Quelquefois, il est complètement homogène, sans granulations, hyalin:
tel est le genre Hyalospora (PI. II, C) , dont les spores sont des
corpuscules absolument transparents. Ou bien, le contenu est granu-
leux, ce qui se présente chez beaucoup de genres ; mais, il y en a chez
qui on trouve un véritable noyau. Ce noyau est presque toujours
accompagné de corpuscules fort curieux dont A. Schneider a découvert
l'existence chez les Grégarines et qu'il appelle corpuscules
falciformes . On les trouve , par exemple , dans les spores mûres du
Monocystis du Lombric ( PL II, fig. 7 ) , du Gonospora Terehellœ
(fig. 5), de VUrospora Nemertis {ûg. 6\ du Dvfouria agilis (fig. 4)(1).
Le nombre de ces singuliers corpuscules varie d'un genre à l'autre :
chez le Monocystis du Lombric , on en trouve de 6 à 8, chez le
Gonospora Terehellœ, de 8 à 10, etc.
Gomment se forment ces éléments? Evidemment, ils prennent
naissance aux dépens de la substance qui forme le contenu de la spore.
lequel, quand celle-ci est jeune , est répandu dans toute sa cavité. A
mesure que la spore grossit et s'entoure d'une enveloppe , le contenu
quitte les pôles et vient se rassembler vers le centre ; et c'est sans
doute par suite d'un clivage ou d'une segmentation du contenu que
prennent naissance les corpuscules falciformes. Bûtschli dit que quand,
chez le Monocystis du Lombric , on examine la spore par un de ses
pôles , on voit les corpuscules falciformes en projection , formant
comme une trace de segmentation rayonnant du centre vers la péri-
(1) Plus fard ils ont été retrouvés par Schneider chez les Stylorhynchus, Lophorhynchus ,
Clepsidiina, Trichorhynchus {loc. cit.)
56 LES SPOROZOAIRES.
phérie , tandis que le centre est occupé par un petit amas granuleux.
Puis, ils so groupent en faisceau dans l'intérieur de la spore, compre-
nant entre eux une petite masse qui paraît résulter de la substance
interne non employée et qui a l'aspect d'un globule granuleux ,
ordinairement placé au centre de la spore , entre les corpuscules
falciformes, quelquefois à l'une des extrémités. C'est le nuclêus de
7^eliquat de Schneider ( PI. II, fig. 1-7 ).
La structure intime des corpuscules falciformes est assez simple.
Ils contiennent un protoplasma à peu près homogène , pâle , avec des
granulations très fines. Cependant , dans quelques cas , Bùtschli et
A. Schneider ont vu un noyau , qui , comme je l'ai dit , n'a été décelé
encore, à ce que je crois, que chez le Monocysiis du Lombric (1).
Schneider, qui , le premier, en a signalé l'existence, l'a reconnu à
l'aide de l'acide osmique, et Bùtschli par l'acide acétique, et le carmin.
11 n'est donc pas douteux qu'il y a des spores contenant des corpus -
cules falciformes et un noyau. Ces corpuscules falciformes se ren
contrent dans les spores à maturité, ou répandus dans l'animal même
qui héberge la Grégarine ou les kystes. Mais, quelquefois, ces spores
ne se montrent qu'après que le kyste a été évacué, pour les espèces
qui habitent le tube digestif, ce qui eu rend l'étude extrêmement
difficile. Lorsqu'on cultive dans l'eau les spores recueillies avant
maturité, on constate que le développement se continue et va jusqu'à
la production des corpuscules falciformes , mais il ne se produit
jamais d'autres modifications : le développement s'arrête là. C'est
donc la phase ultime de ces petits corps , quand on les place dans le
monde ambiant. Lorsqu'on les introduit dans l'organisme d'un animal
de la même espèce que celui dont ils sont sortis , ces corpuscules
falciformes , qui représentent la phase ultime du développement de
la spore , deviennent-ils directement de petites Grégai'ines , ou bien
subissent-ils de nouvelles modifications avant de reproduire la Grégarine
qui leur a donné naissance ?
(1) Plus récemmeut. M. Schneider a découvert aussi un noyau dans les corpuscule<-
falciformes des Stylorhynchus , Lophorhynchus et Trichorhynchus,
LES GREGARINES. 57
Pour résoudre cette question, il faudrait suivre le développement des
Grègarines : malheureusement , c'est là la partie la plus incomplète de
leur histoire , et , il faut l'avouer, la plus difficile à étudier, aussi bien ,
du reste, que pour les autres parasites, car les conditions d'observation
sont toujours très difficiles à analyser Ainsi, le premier observateur
que nous rencontrons dans cette voie est Stein , qui s'est occupé de
savoir ce que deviennent les pseudonavicelles. Il a d'abord vu que ,
chez la plupart des Insectes, les kystes n'arrivent pas à maturité com-
plète dans le tube digestif de l'animal, sauf chez une espèce, uti
Hémiptère de la famille des Punaises, le Réduve masqué, Reduvius
personatus : il s'agit de la Grégarine qu'il a nommée Spo7'adina
Reduvii. Chez les autres espèces, il n'a jamais trouvé de kystes
mûrs. Il a fini par remarquer que c'est surtout dans la partie posté-
rieure du tube digestif , le gros intestin , qu'on rencontre des kystes
présentant des degrés de maturation plus avancée , et pour en trouver
qui contiennent des spjres tout à fait mîirs, c'est dans les excréments
rejetés qu'il faut chercher. Il a trouvé ainsi des kystes mûrs des Grè-
garines de la Blatte , du Ténébrion de la farine , etc. C'est dans ces
conditions aussi que Bûtschli a trouvé des kystes rompus et des
navicelles mises en liberté, ce qui représente bien le degré ultime de
leur maturité.
Stein a donc supposé qu'après leur mise en liberté par la rupture
du kyste , les navicelles sont absorbées par des animaux de la même
espèce que ceux qui ont hébergé les Grègarines enkystées, qu'elles se
développent dans leurs organes en nouveaux individus et que c'est
ainsi que commence et se ferme le cycle de leur évolution. Il a vu
aussi, dans l'œsophage de quelques Blattes, des kystes qui paraissaient
avoir été avalés par ces Insectes et ne provenant pas des Grègarines
habitant leur intestin. Il a rencontré encore, dans cette partie de
l'intestin, des spores libres et des Grègarines déjà bien reconnais-
sablés . mais dont la taille dépassait à peine celle des spores elles-
mêmtis : d'où il a conclu au développement direct des spores en petites
Grègarines.
58 LES SPOROZO AIRES.
Des observations analogues ont été faites par Stein à propos de la
Grégarine du Lombric ; toutefois, les choses sont , ici, plus difficiles à
comprendre , car ce n'est plus dans l'intestin que vit cette Grégarine,
mais dans le testicule , c'est-à-dire dans la cavité génitale du
corps. Stein, ayant vu que, chez la Blatte, les kystes ne s'ouvrent
qu'après avoir été évacués , supposa qu'il en est de même chez le
Lombric. Mais comment les kystes sont-ils évacués, dans ce cas? On
ne sait pas encore très bien comment se fait l'accouplement et
comment le sperme est émis chez le Ver de terre ; nous ne sommes
donc pas autorisés à dire que Stein s'est trompé , cependant il n'a pas
donné de preuves à l'appui de ses assertions. Il a dit que les kystes
étaient évacués avec le sperme et tombaient dans le monde ambiant
où ils étaient absorbés par d'autres vers. Parvenus dans l'intestin , ils
en traversaient la paroi pour se loger dans le testicule. Il a pensé
que ces individus migrateurs étaient les Grégarines revêtues d'une
cuticule garnie de ces longues soies rigides dont nous avons parlé
et qui ne sont que des zoospermes en voie de développement. Il a cru
même avoir trouvé , chez ces Grégarines poilues , un aiguillon à la
partie antérieure et a supposé qu'elles se servaient de ce petit dard
pour percer l'intestin. Parvenues dans le testicule , qui est en
connexion avec l'intestin, arrivées, pour ainsi dire, à destination,
elles rejetaient leur revêtement poilu et leur dard, désormais inutiles,
et devenaient adultes comme celles que l'on trouve dans l'intestin.
Quoi qu'il en soit, Stein n'a pas observé directement la transforma -
tion de la pseudonavicelle en Grégarine, car c'est toujours là le point
difficile, l'observation directe. On peut donc toujours se poser, après
comme avant Stein , la question de savoir si la transformation des
spores en Grégarines se fait d'une manière directe ou seulement après
des modifications plus ou moins compliquées.
D'après Lieberkiihn, (1854), la métamorphose des spores en Gréga-
rines est peu compliquée ; néanmoins la pseudonavicelle ne produit
pas directement une Grégarine toute formée , comme le croit Stein
mais une petite Amibe qui se convertit ensuite en Grégarine. Il affirme
LES GREGARINES.
59
avoir rencoHtré chez le Lombric toutes les phases de transition entre
l'Amibe ot la petite Grégarine . quant à la forme , les granulations
intérieures, le mode de mouvement, etc.
On peut faire à cette assertion de Lieberkiilin plusieurs objections.
D'abord . il n'a pas observé directement la transformation de l'Amibe
en Grégarine ; ensuite , on peut se demander ce qu'il appelle des
Amibes, car il a pris pour Amibes les corpuscules qui flottent dans la
cavité périviscérale du Lombric , corpuscules appelés vulgairement
globules du sang chez cet animal , et qui sont tellement nombreux
que ce liquide est aussi chargé de corpuscules que le pus. Ce sont les
leucocytes de ces Invertébrés. Ils se comportent comme des Amibes
au point de vue des mouvements et de l'absorption des corps étrangers
qu'ils rencontrent , et l'on peut leur faire absorber des particules
colorées. Lieborkûhn n'a donc pas démontré la transformation
des pseudonavicelles en Amibes . ni celle des Amibes en Grégarines.
C'est cette lacune qu'E. van Beneden a cherché a combler.
Fl«. 16. — Premières phases du développement de la Grégarine géante du Homard
Porospora giyanlea Schn ); 1,^,3, 4, phase nmiboïde ou de cytode générateur; 5,
celui-ci tommence à produire les deux pseudopodes qui deviendront les pseudofilaires :
6, 1, états plus avancés de la formation des pseudopodes; 8, 9, 10, le pseudopo "e plus
développé s'est détaché et est d venu une pscudofîlaire ; l'autre bras continue à s'accroître
pour se transformer à son tour en pseudofilaire, 1 1 (d'après E. van Beneden
60
LES SPOROZOATRES.
Ed. van Beneden a suivi le développement de la Grégarine géante du
Homard. Suivant lui, la Grégarine est d'abord une petite masse
arrondie de protoplasma sans enveloppe ni noyau , une Monère
qui se meut en émettant des pseudopodes. Mais, à un certain moment ,
la Monère s'arrondit , rentre ses pseudopodes et ne tarde pas à émettre
deux prolongements ou bras qui ont une destinée toute spéciale. C'est
la phase de cytode générateur. Des deux prolongements , l'un est
plus court et pâle, l'autre, plus long, plus gros, plus granuleux, exécute
des mouvements de contraction et d'extension très vifs, comme un
véritable pseudopode , pendant plusieurs heures. Puis , il s'allonge
graduellement, se sépare du cytode générateur, devient indépendant,
et se met à se mouvoir comme un petit ver nématoïde. Pendant ce
temps, l'autre bras, immobile et pâle, devient semblable au premier
en absorbant la substance du cytode, acquiert de l'activité, s'allonge
et se contracte à son tour ; c'est un autre pseudopode, qui se développe
FiG. 17. — Transformation de la pseudofilaire en jeune Grégarine. 12, pseudofilaire mon-
trant le premier vestige du noyau sous la forme d'un nucléole libre; 13, \m espace clair
s'est formé autour du nucléole et le corps de la pseudofilaire s'est raccourci; 14, 15, 16, le
corps se raccourcit de plus en plus en s'élargissant à une de ses extrémités; le segment
céphalique commence à apparaître sous la forme d'un petit renflement hr misphérique ;
n. 18, la petite Grégarine s'allonge et grossit ; le noyau s'est complètement différencié
pt une cloison transversale sépare la tête du corps (d'après E. van Beneden.)
LES GREGARINES.
64
et se sépare pour constituer ce petit corps vermiforme que E . van
Beneden appelle pseudo/ilaire, en raison de sa ressemblance avec
une jeune Filaire. Ces filaments protoplasmiques s'agitent dans le
liquide avec des mouvements vermiformes très rapides ; ils sont plus
renflés à une extrémité et. peu à peu, ils prennent plus de laigeur,
s'arrondissent, deviennent ovoïdes, s'immobilisent, et. au milieu de leur
F'iQ. 18. — Dernières phases du développement de la Grégarine géant»
( d'après E . van Beneden ).
largeur, on voit apparaître une petite tache foncée, un globule, qui sera
le nucléole autour duquel se forme une zone claire constituant le noyau.
C'est alors que commencent les phases qui amènent la pseudofiîaire
62 LES SPOROZOAIRES.
à l'état de Grégariue. Il se forme bientôt à son extrémité antérieure
un renflement en coupole dans lequel se concentre le protoplasma
granuleux, et, dès ce moment, on reconnaît déjà une petitfi Grégarine
qui n'a plus qu'à croître pour devenir la Gi^egarina giganiea du
HomarJ, laquelle peut atteindre jusqu'à 16 millimètres de longueur.
Telles sont les observations d'E. van Beneden sur cette Grégarine.
Elles paraissent bien complètes , mais il est utile qu'elles soient
vérifiées. Ray Laikester, un ou deux ans plus tard, a confirmé
plusieurs de ces résultats, quoique avec quelques différences (Qitarte'W^
Journ. ofMicrosc. Science, 1872). Cet auteur a donné aussi l'histoire
de l'évolution d'une Grégarine, mais ce n'est pas un(î Polycystidée,
c'est une Monosystidée. le Monoci/siis Sipunculi.
Les spores dans cette espèce sont munies d'une queue ou prolonge-
ment postérieur, comme celles que A. Schneider a vues chez
VUrospora. Ce sont les pseudonavicelles qui donnent naissance à une
petite Amibe, dans laquelle nous retrouvons la phase monérienne d'E.
van Beneden. 11 n'y a d'abord pas de membrane d'enveloppe, pas de
vésicule contractile, pas de noyau. Mais il ne tarde pas à se l'ornKi-r
une membrane et un noyau, et cette petite Monère, Iranstormée en
cellule, prend de l'accroissement. Toutefois cet accroissement est iné-
gal : la partie antérieiu'e devient plus volumineuse que la partie posté-
rieui-e qui ne figure plus que comme une queue, qui bientôt, est reje-
tée. Il ne reste plus que le corps avec son enveloppe. Celui-ci se divise
plusieurs fois longitudinalement et les produits de ces divisions sont
auiant de petites Grégarines qui n'ont plus qu'à grandir. H y a là
quelques traits d'analogie avec les faits signalés par E. van Beneden.
Nous trouvons bien la phase monérienne et quelque chose qui ressem-
ble au bras caduque du cytode générateur. Mais, ici, c'est une espèce
de queue qui disparaît et c'est le corps qui se développe. On voit donc
qu'il y a dans ces observations quelques ditférences avec celles
d'E. van Beneden, et qu'il conviendrait que ces travaux fussent repris
ut confirmés.
Aime Schneider a plus dogmatisé qu'observé ; il a critiqué les ot>ser-
LES GREGARINES. 63
valions de ses devanciers et n'a pas apporté beaucoup de faits impor-
tants à l'histoire de ce développeraeiit. Il critique beaucoup la théorie
de Lieberkûhn qui admet la transforma Lion de la spore on Amibe, et il
conteste, justement, je crois, la validité des raisons données par Lie-
berkiihn. Il dit que ni lui ni personne n'a vu cette transformation chez
le Mo'tiocyslis du Lombric, et c'est piécisément sur cette espèce que
Lieberkiihn prétend avoir observé cette transformation et avoir ren-
contré de.s kystes qui, au lieu de navicelles, renferment des Amibes.
De plus, rien ne prouve que ces kystes s'ouvrent dans la cavité du
corps du Lombric, et l'analogie établirait, en effet, qu'ils sont destinés
à s'ouvrir dans le monde ambiant, — ce que Stein avait déjà reconnu
pour les Grégarines des Insectes , et même pour celle du Lombric,
dont il est précisément question ici. On sait que la maturation des
spores, dans tous les kystes de Grégarines, se fait très bien dans l'eau,
tant pour la Grégarine du Lombric que pour les autres. M. Schneider
se demande , si cette phase amiboiide existe, pourquoi cette matura-
tion n'irait pas jusqu'à la transformation des spores en Amibes. 11 a
conservé dans l'eau, pendant deux et trois semaines, des kystes du
Monocyslis agilis et n'a jamais pu obtenir la transformation des spores
en Amibes. Ce n'est pa.s qu'il nie, en principe, cette transformation,
mais il montre que les preuves données par Lieberkiihn n'ont aucune
valeur démonstrative.
D ailleurs, la Grégarine du Lombric est du nombre de celles qui
produisent, dans l'intérieur des spores, des corps falciformes. Or, ces
corps avaient été vus par Lieberkiihn, qui les a même figurés dans
une planche de son ouvrage (PI. 6, fig. 5), où ils sont très reconnais
sables^ au nombre de deux, dans chaque navicelle du kyste. Mais il n'y
a pas attaché d'importance , puisqu'il n'en parle ni dans la légende, ni
dans le texte, laissant à A. Schneider l'honneur d'avoir, le premier,
appelé l'attention sur ces corps et d'avoir généralisé leur existence
chez les Grégarines. — C'est donc toute une phase qui a échappé à
Lieberkiihn, et par conséquent ses démonstrations sur l'histoire et le
développement de ces êtres sont frappées de défiance. >''tw^^'V'N.
/^/* ^^^ ^^
64 LES SPOROZO AIRES.
A. Schneider n'a jamais observé chez les Grégarines de phase anii-
boïde ; cependant, chez les Psorospermies, il a vu les corps falciforines
devenir amiboïdes avant de reproduire la forme type. L'Amibe de-
vrait donc toujours succéder au corps falciforme et non le procéder ,
comme chez les Goccidies. Donc, dans laGrégarine du Lombric, si
cette transformation a lieu . elle doit procéder d'une phase où le con-
tenu de la spore s'est organisé en corpuscules falciformes. Mais il est
possible aussi que cette phase amiboïde n'existe pas et que les corpus-
cules falciformes produisent directement de petites Grégarines dont
ils ont déjà l'organisation, c'est-à-dire de petites masses de protopiasma
avec un noyau central. Par conséquent, il pourrait se faire qu'il y eût
transformation directe.
Maintenant, il y a des espèces nombreuses chez lesquelles on n'a
pas rencontré de corpuscules falciformes et dont les navicelles ne
contiennent qu'un protoplasma tantôt homogène et clair , tantôt
granuleux. Il est possible que, chez ces espèces, les spores se déve-
loppent comme E. Van Beneden l'a décrit pour la Grégarine du
Homard, c'est-à-dire traversent d'abord une phase d'Amibe,
puis de cytode générateur , de pseudoâlaire, pour arriver à l'état
de petite Grégarine. Et il se pourrait que chez les espèces dont
les spores présentent à l'intérieur des corps falciformes, celles-ci
se développent sans avoir traversé la phase amiboïde. 11 y aurait
là quelque chose qui ressemble au développement des Psoros-
permies oviformeset qui établirait une différence entre deux groupes
d'êtres qui se ressemblent tant sous d'autres rapports.
En somme, je ne suivrai pas plus loin Aimé Schneider dans ses
arguments dogmatiques ; il n'a fait aucune observation personnelle sur
le développement d'une Grégarine, et j'adopte complètement sa conclu-
sion, à savoir que l'histoire du développement de ces Protozoaires est
encore presque entièrement à faire.
Biitschli a-t-il réussi à soulever un coin de ce voile ? — C'est ce que
nous allons examiner. — 11 est assez singulier que parmi les nom-
breux auteurs qui se sont occupés du développement des Grégai-ines,
LES GREGARINES. 65
aucun n'ait songé à la méthode d'investigation qui a fourni de si bons
résultats pour l'étude des Helminthes , à savoir faire ingérer à
des animaux indemnes des germes de Grégarines, et voir comment
ces germes se comportent. C'est ainsi que, pour les Helminthes, on est
arrivé à des résultats si remarquables ; il suffit de rappeler les travaux
de P. J. Van Beneden, Kiichenmeister, Leuckart, von Siebold, etc. —
Nous avons vu que Stein avait déjà constaté des faits qui démontrent que
les kystes ou les pseudonavicelles des Grégarines sont ingérés par
des animaux de même espèce que ceux qui contiennent les Grégarines
elle-mêmes adultes. 11 avait trouvé un kyste , chez une Blatte, dans
l'œsophage, point où jamais on ne rencontre deGrégarine développée.
Ce kyste avait donc été ingéré avec les aliments. Cette rencontre eût
dû inspirer l'idée de faire quelques observations dans lesquelles on se
serait proposé de transmettre les kystes à des Blattes, pour suivre les
transformations qu'ils subissent dans le tube digestif ; on ne l'avait pas
fait jusqu'ici, et c'est Biitschli qui, le premier, a cherché à recourir à
cette méthode. Il a opéré sur la Blatte. Il donna à manger à ces insec-
tes une bouiUie de fai'ine et d'eau dans laquelle il avait mêlé des kystes
à pseudonavicelles de la Clepsidrina Blattarum recueillis dans les
-excréments d'autres Blattes. Cette bouillie fut mangée avec avidité par
les animaux et Bûtschli examina ceux-ci au bout de trois jours , s'at-
tendant è trouver les jeunes Grégarines en contact avec l'épithélium
du tube digestif. 11 fit macérer cet épithélium dans un mélange d'eau
salée et d'acide acétique, afin de pouvoir le dissocier plus facilement.
Il reconnut ainsi un grand nombre de cellules qui contenaient des
Grégarines dont les plus petites dépassaient à peine la taille des
pseudonavicelles , de 6 à 8 jx. Elles étaient plongées chacune
dans une cellule épithéliale, engagées jusqu'à mi-corps ou un peu
au-delà , piriformes , avec la partie la plus large dans l'intérieur
de la cellule, le noyau dans la partie extérieure. Le corps ne
présentait pas alors de division , et la Grégarine était à l'état
de Mcnocystidée. A côté de ces jeunes formes, d'autres étaient
un peu plus avancées, et l'on reconnaissait les deux segments par une
66
LES SPOROZOAIRES.
cloison ou ligne foncée qui traversait la largeur du corps. La partie
contenant le noyau croissait plus rapidement que l'autre qui paraissait
devenir la tête ou protomérite. C'étaient donc déjà des Grégarines com-
mençant à atteindre 27 [x. — Comment s'étaient-elles développées ? —
f..-.
FlG. 18. — Développement de la Clepridrina Blaltarum. A, jeunes Grégarines dans trois
cellules épillieliales de l'intestin; n, noyau de la cellule cpitheliale. B, premières phases
du développement de ces jeunes ; a, avant la formation de la cloison transversale ; b, c,
la cloison s'est formée et divise le corps en deux segments. G, Grégarines plus dévelop-
pées, enfoncées par leur épimérite dans les cellules épithéliales de l'intestin (d'après
BUtschli.)
Avaient-elles traversé des phases amiboïde, monérienne, pseudoâlaire?
Le contenu des pseudonavicelles s'était- il organisé en corpuscules fal-
ciformes, et étaient-ce ces corpuscules qui étaient devenus déjeunes
Grégarines ? — Ces corpuscules n'ont jamais été observés chez les Gré-
garines de la Blatte (Clepsidrina Blaltarum) (1). Le contenu des spores
n'est qu'une masse de protoplasma granuleux ; mais il pourrait très
bien se faire que les corpuscules ne se produisissent pas quand on cul-
(1) Nous avons vu plus haut , p. 55 , noie 1^ qu'il faut ranger les Clepsidrina parmi
les espèces chez lesquelles l'existence de ces corpuscules a été constatée par Aimé Schneider;
c'est chez la C. macrocephala du Gryllus sylvestris qu'il les a observés.
LES GREGARINES. 67
tive les spores dans l'eau, et se forment quand le développement a
lieu dans le tube digestif de l'hôte. C'est une voie ouverte à l'hypo-
thèse. — Toutes ces questions n'ont pas reçu de solution parles recher-
ches de Biitscbli. Cet observateur n'a donc pas mieux réussi que ses
devanciers à jeter quelque jour sur les premières phases du développe-
ment des Grégarines ; mais je crois qu'il ne s'est pas placé dans les
conditions voulues. 11 a nourri des Blattes avec de la farine contenant
des pseudonavicelles et ne les a ouvertes qu'au bout de trois jours. Par
ce long intervalle de temps entre l'ingestion et l'examen, il a laissé
échapper les phases initiales. Il faut suivre les phénomènes pas à pas
et ouvrir les Blattes à des intervalles très rapprochés, en commençant
quelques heures après l'ingestion, car ces parasites peuvent parcourir
très rapidement les différentes phases de leur développement.
Mais d'autres points de l'histoire de ces Grégarines demandent aussi
à être éclaircis, et ne l'ont pas été par Biitschli. Nous avons vu que les
plus âgées de ces Grégarines étaient formées de deux segments, mais
pour arriver à l'état adulte, elles doivent acquérir un troisième segment
qui manque encore, l'épimérite ; car chez les Blattes renfermant la
Grégarine adulte, Biitschh a trouvé la forme complète, polycystidée, à
trois segments, l'épimérite étant enfoncé dans la cellule épithéliale. —
Quels sont les rapports des deux segments de la jeune Grégarine avec
le troisième segment de l'adulte ? — Est-ce le segment antérieur tout
entier qui devient le protoraérite de la Grégarine adulte, ou bien se
divise-t-il par un septum en deux autres dont l'un devient l'épimérite
et l'autre le protomérite. ? — Ce sont des questions qui doivent être
approfondies et dont nous ignorons encore la solution.
Je vous ai retracé aussi complètement et aussi fidèlement que possible
l'état de nos connaissances sur l'histoire de ces parasites, et la conclu-
sion que j'en puis tirer est très simple : c'est que nous ne savons
presque rien sur les points les plus importants de cette histoire. Nos
connaissances positives s'arrêtent à la transformation du contenu
de la spore en corps falciformes , observée chez un certain nombre
68 LES SPOROZOAIRES.
d'espèces , — ce que nous devons à Aimé Schneider. Mais ces corps
représentent-ils la phase ultime du développement dans l'intérieur
de la spore ? — S'il en est ainsi, comment sont-ils mis en liberté ? —
Que deviennent-ils dans ces conditions ? Que font-ils au contact des
liquides du tube digestif ? — Se transforment-ils directement en petites
Grégarines ? — Aucun auteur, ni même E . Van Beneden, qui a donné
l'histoire la plus complète du développement d'une espèce, n'a observé
la phase de la transformation des spores et n'a constaté l'existence des
corps falciformes. — Et cette condition de la transformation du contenu
de la spore ne pourrait-elle pas être une condition indispensable comme
chez les Psorospermies oviformes ? — Si c'est une condition nécessaire
chez ces Psorospermies, il ne serait pas surprenant qu'il en fût de
même chez les Grégarines proprement dites.
Mais la réponse à toutes ces questions nous est encore inconnue. (1)
(1) Schneider a fait récemment [Comptes rendus, 3 juillet 1882, et^rcA. de zool. exper.,
t. X, N" 3, p. 423 (1882j, des obserx'ations inléressanles sur le développement du Stylo-
rhynchus longicoliis. de l'intestin du Blaps. Ayant placé des spores mûres de cette Gréga-
rine dans du liquide intestinal de Blaps , il a vu les spores s'ouvrir spontanément et donner
issue à un paquet de corpuscules falciformes intriqués les uns dans les autres, et ces paquets
isolés se réunir eux-mêmes en pelotons plus ou moins volumineux , dans lesquels les cor-
puscules continuaient à s'agiter pendant plus de quatre heures , sans qu'aucun d'eux se fût
transformé en une Amibe. D'autre part , Schneider a observé dans les cellules épithéliales
de l'estomac de ces mêmes Blaps , des petits corps ovoïdes granuleux , munis d'un noyau
propre, et ayant la plus grande ressemblance avec les jeunes Grégarines observées par
Butschli dans les cellules épithéUales des Blattes nourries avec les spores de la Clepsidrina
Blattarum, ainsi que nous l'avons relaté plus haut dans le texte.
LES COCCIDIES. 69
II
LES PSOROSPERMIES OVIFORMES OU COCCIDIES.
I
Les PsoROSPERMiES OVIFORMES ont été récemment désignées sous le
nom de Goccidies par Leuckart dans la deuxième édition de son
Histoire des parasites de V homme (1879). En effet, le nom de
Psorospermies a été appliqué à quatre catégories d'êtres distincts
dans le groupe des Sporozoaires : d'abord aux kystes et aux pseudo-
navicelles des Grégarines, par Lieberkiihn qui employait très volontiers
ce nom ; puis à des Sporozoaires trouvés par J. Mûller chez les Pois-
sons , — et c'est précisément pour ces parasites des Poissons que ce
nom de Psorospermies a été créé par J. Millier lui-môme ; puis, à des
organismes rencontrés dans les muscles striés des Mammifères , les
tubes de Miescher ou de Rainey, qui ont reçu aussi le nom de Pso-
rospermies utriculiformes ; — et , enfin , aux organismes que nous
appelons aujourd'hui Goccidies.
On rencontre fréquemment dans le foie des Lapins, — et je com-
mence en quelque sorte en suivant l'historique de la découverte de ces
êtres, qui ont été, en effet, signalés pour la première fois dans les
cellules hépatiques du Lapin, — des masses blanchâtres, de consistance
variable, tantôt assez solide ou caséeuse, ou liquide ou semi-liquide,
qui semblent de petits abcès ramollis, logés dans les canalicules hépa-
tiques qu'ils suivent pendant un trajet plus ou moins long. Les canali-
cules paraissent injectés par cette matière blanchâtre ou blanc jaunâtre,
70 LES SPOROZOAIRES.
et cette couleur, qui tranche sur celle du tissu normal, permet de les
suivre dans toute leur étendue. Quelquefois cette matière est distribuée
irrégulièrement, formant des dilatations tuberculiformes qui présen-
tent tous les degrés de consistance, depuis celle du tubercule cru
jusqu'à celle du tubercule ramolli. Ces productions sont une cause de
mort pour le Lapin. Quand on les examine au microscope on y constate
la présence des éléments altérés du foie, des conduits biliaires dont les
cellules épithéliales cylindriques sont détachées et plus ou moins alté-
rées. En même temps, on y trouve de nombreuses granulations libres
et des corps fortement granuleux présentant, pour ainsi dire, toutes les
dimensions possibles. Les uns et les autres ne sont que des parasites à
divers états de développement : les formes incomplètement développées
offrant l'aspect de petits corps logés dans les cellules épithéliales qui
se sont dilatées, les formes adultes ayant celui de coques ovoïdes
constituées par une capsule à double contour contenant dans son inté-
rieur une masse granuleuse d'apparence diverse.
Ces corps ont naturellement beaucoup intrigué les premiers observa-
teurs qui les ont rencontrés. C'est un médecin anglais, Hake, qui, en
1839, les a trouvés le premier dans le foie du Lapin. Depuis lors, ils ont
été vus par un grand nombre de naturalistes et de médecins chez une
foule d'autres espèces animales, vertébrées et invertébrées, et dans
d'autres organes que le foie. On les a signalés chez les Mammifères,
les Oiseaux, les Batraciens, les Articulés, les Mollusques, — et même
chez l'Homme. C'est ainsi qu'ils ont été trouvés dans les cellules épi-
théhales de l'intestin chez beaucoup de Mammifères : chez le Lapin,
parRemak, Klebs, Kôlliker, Lieberkiihn, Waldenburg, Vulpian ; chez
le Chien par Virchow, Leuckart ; chez le Chat, par Fink (Thèse de
Strasbourg, 1854); dans l'intestin du Chat, encore par Vulpian
[Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 1858) ; chez la Souris, par
Eimer, et, finalement, chez l'Homme {Mèm. de la Soc. de BioL,
1858 ) , par Gubler, qui les a rencontrés dans le foie d'un malade
dont ils avaient occasionné la mort. Nous reviendrons plus tard sur
ce cas.
LES COCCIDIES. 71
Ils ont été signalés chez les Oiseaux par Rivolta, Silvestrini, par
moi-même, en 1873, dans diverses productions pathologiques chez la
Poule ; chez le Triton, par Aimé Schneider. On les a trouvés aussi
chez les Mollusques Céphalopodes et Gastéropodes {Hélix horlensis,
etc.), et chez les Articulés, {fMhobius forficatus, Glomeris.)
Quelles sont les opinions que les auteurs qui se sont trouvés pour la
première fois en présence de ces corps se sont faites sur ces singulières
productions ? — Comme cela arrive toujours quand on rencontre un
objet nouveau, on a cherché à les rapprocher d'objets déjà connus.
Dans le cas qui nous occupe, ces corpuscules ont d'abord été consi-
dérés comme des éléments histologiques altérés, de simples productions
pathologiques. Hake les regarda comme une forme particulière des
globules du pus. C'étaient encore des éléments histologiques altérés pour
Nasse, Handfleld Jones, Leuckart, autrefois. Puis, on en fit des œufs
d'Helminthes, et l'on s'est adressé à toutes les espèces d'Helminthes
pour les leur attribuer. Cependant, pour le plus grand nombre et
particulièrement pour les auteurs français, c'étaient des œufs d'un
Distome ou Douve : ce fut l'opinion de Rayer, de Dujardin, de Brown-
Séquard, de Davaine, de Ch. Robin et Lebert, et de Gubler, dans le
cas suivi de mort chez l'Homme, dont nous avons parlé. Kiichen-
raeister en fit des œufs d'un Nématoïde, KôUiker d'un Bothriocéphale.
Vulpian les a appelés tout simplement des corps oviformes et n'a
jamais affirmé que ce fût des œufs de Distome , se tenant à ce sujet
dans une réserve très louable.
Cependant, dès 1845, Remak avait déjà émis l'opinion que c'étaient
des parasites et cherché à les classer à côté des Psorospermies des Pois-
sons que J. Millier avait trouvées en 1841. C'est Remak qui les a ren-
contrés le premier dans les cellules épithéliales de l'intestin du Lapin.
En 1856, Lieberkiihn comparait ces corps oviformes à des kystes de
Grégarines, assimilant les corpuscules particuliers que nous verrons
se former dans leur intérieur aux spores des Grégarines, qu'il appelait
des Psorospermies. C'est une vue très juste, mais qu'il n'a pas suivie
jusqu'au bout, et il s'est borné à rattacher ces spores aux spores d'une
72 LES SPOROZOAIRES.
Grêgarine qu'il ne connaissait pas adulte, mais qui devait certainement
être reconnue quelque jour. — Nous verrons que dans cette vue de
Lieberkiihn il y a du vrai et du faux.
Avant d'entrer dans des détails plus particuliers sur l'histoire de ces
corps, nous avons d'abord à faire connaître leur structure. Leur orga-
nisation fondamentale est la même dans toutes les variétés. Il y a, d'ail-
leurs, parmi les Coccidies comme parmi tous les autres organismes,
des formes plus simples et des formes plus complexes dérivant des pre-
mières, et nous verrons que cette complication résulte non pas de diffé-
rences provenant de l'état adulte, mais du mode de leur développement.
C'est ce qui nous amène à parler de leur classification.
Avant Leuckart, on ne distinguait aucune espèce, ni aucun groupe
parmi ces organismes : c'étaient des Psorospermies oviformes ou corps
oviformes, rien de plus. On décrivait toutes les formes en les ratta-
chant à une même espèce, sans faire aucune tentative de systématisa-
tion. C'est Leuckart qui, dans la 2" édition de son Histoire des parasites
de l'Homme, a formé le premier genre, Coccidium, et la première
espèce, C. oviforme, pour le parasite trouvé dans le foie du Lapin.
Depuis lors, on a décrit un grand nombre d'autres espèces, mais jus-
qu'à ces derniers temps, on n'avait pas encore cherché à établir parmi
elles une classification systématique. C'est ce que Aimé Schneider a
tenté de faire dans un mémoire récent {Arch. de Zool. expérimentale
t. X. 1878) en présentant pour la première fois une méthode et un
projet de classification dans lequel le genre Coccidium ne vient plus
en première ligne parcequ'il ne représente pas la forme la plus
simple de ce groupe. Nous donnons ci-contre le tableau qui résume
cette classification.
LES COCCIDIES.
73
Classification des Psorospormies oviformes ou Coccidibs
(d'après A. Schneider.)
Tribus.
Genres
1° Tout le contenu du ( CorpusculeB au
kyste se transforme en] nombre de 4... Orthospora.
une spore unique : Mo- j Corpuscules en
NOSPOREES. f nombre indéfini. Eimeria
2» Le contenu du kyste\ o Spores (Disnorée.)
se convertit en un nombre ' "^
constant et défini de spo-
res : Oligosporées.
4 Spores (Tetra sporécs)
Corpuscules en
nombre défini..
Cydospora.
Corpuscules en
nombre indéfini. Isospora.
1 seul corpuscule. Coccidium.
3" Le contenu du kyste
se convertit en un grand (
nombre de spores : Po-
LTSPORÉES
Klossia.
(Benedenia)
74 LES SPOROZOAIRES.
II
On peut considérer deuxpériodes chez les Psorosperraies oviformes,
une période d'accroissement ou de végétation et une période de repro-
duction. Examinons ces deux phases.
Pendant la première période , d'accroissement ou de végétation :
toutes les Psorospermies oviformes ou Goccidies sont formées par de
petites masses de protoplasma finement granuleux , munies générale-
ment d'un noyau qui n'est pas toujours très visible au milieu des gra-
nulations qui l'entourent ; on n'y voit pas encore de membrane d'enve-
loppe. La Psorospermie, pendant cette période, vit donc dans l'intérieur
d'une cellule , car ces organismes sont des parasites intracellu-
laires , tandis que les Grégarines , au moins à l'état adulte , sont
extracellulaires. Les Goccidies sont incluses dans les cellules épi-
théliales , et c'est avec raison qu'Aimé Schneider les a comparées ,
sous cette forme, aux Grégarines monocystidées , car elles ont la
même composition. Leur organisation est alors tellement simple qu'il
est impossible de les distinguer les unes des autres , et , pour les
classer, il est nécessaire de recourir à d'autres caractères qu'elles
présentent pendant la période de reproduction. En effet , elles ne
diffèrent guère que par une taille plus ou moins volumineuse , par la
nature du plasma qui renferme souvent des granulations plus ou moins
fines, moléculaires ou plus grossières. Puis, on constate une différence
d'habitat, c'est-à-dire qu'elles paraissent assignées chacune à une
espèce animale déterminée, et chez cette espèce animale même elles
ont certains sièges de prédilection : les unes, le foie ; les autres, les
cellules épithéliales de l'intestin, etc. Schneider a même signalé, comme
donnant asile à certaines espèces, les vaisseaux de Malpighi des
Articulés.
Mais les différences s'accusent davantage pendant la période de
reproduction, et ce sont précisément ces différences qui ont fourni à
LES COCCIDIES. 75
A. Schneider les bases de sa classification. Avant lui , il n'existait,
comme nous l'avons dit, qu'un genre, proposé par Leuckart, pour la
Psorospermie oviforme la plus anciennement connue, celle du foie
malade du Lapin, le genre Coccidium. Aimé Schneider en a ajouté
cinq autres et il a réparti ces six genres en trois tribus d'après le nom-
bre des spores qui se forment dans l'individu transformé en kyste. —
C'est ainsi qu'il a divisé cette famille en Monosporées qui ne forment
qu'une spore, en Oligosporèes qui forment un petit nombre de spores,
de deux à quatre, et en Polysporées qui forment un nombre considé-
rable et non défini de spores. Les deux premières de ces tribus sont
divisées elles-mêmes d'après les caractères qui constituent les genres.
Quand il y a production d'une spore unique et qu'on trouve dans celle ci
un nombre défini de corpuscules falciformes, quatre, par exemple, on a
affaire au genre Orthospora. Quand, avec une seule spore on rencon-
tre un nombre indéfini de corpuscules falciformes , c'est le genre
Eiyneria. Dans la deuxième tribu, il y a deux sections, celle des
Distporées et celle des Tétrasporée», suivant qu'il y a deux ou quatre
spores. Les Disporées fournissent de même deux genres, suivant le
nombre de corpuscules falciformes que contiennent ces spores : dans
le genre Cyclospora, ce nombre est défini ; il est indéfini dans le genre
Isospora. Les Tétrasporées ne contiennent que le seul genre Cocci-
dium. dont chacune des quatre spores ne contient qu'un seul cor-
puscule falciforme (1). On pourra trouver plus tard une Oligosporée
tétrasporée dont chacune des quatre spores contiendra plusieurs cor-
puscules, cela constituera un genre nouveau. Enfin, la troisième tribu
celle des Polysporées, ne renferme que le genre Klossia, caractérisé
uniquement par le nombre indéfini des spores que produit chaque
individu.
D'après ces caractères, la Coccidie la plus simple est celle qui, avec
le plus petit nombre de spores, donne le plus petit nombre de corpus-
(1) C'est ce que Schneider admettait avec tout le monde à 1 époque de la leçon ; nous
verrons plus loin , en décrivant le genre Coccidium, que le nombre réel des corpuscules de
la spore est de deux.
76
LES SPOROZOAIRES.
Cilles falciformes : c'est le genre Orthospora. 11 est tout entier la
création de M, Aimé Schneider. V Orthospora propria habite les cel-
lules épithéhales de l'intestin des Tritons ; nous n'avons pas pu le
retrouver. C'est aux environs de Poitiers que cet observateur l'a
rencontré dans plusieurs espèces, notamment chez le Jriton cristatus.
FiG. 19. — Orthospora propria du Triton cristatus (A. Schneider).
1, Kyste; 2, 8, contraction du contenu en boule centrale ; 4, 5, 6, formation de la spore ;
"7 et 8, corpuscules falciformes.
Cette Psorospermie est une petite masse de protoplasma, d'abord
sans enveloppe, qui s'entoure ensuite d'une membrane, grossit, s'en-
kyste, rompt la cellule dans laquelle elle était contenue et tombe dans
la cavité de l'intestin. C'est là qu'on la trouve enkystée. Le contenu
remplit d'abord tout le kyste, puis il se contracte en boule ; mais cette
contraction présente quelques phénomènes particuliers. Ordinaire-
ment, il se forme une boule qui reste au centre du kyste, mais, dans
cette espèce, la boule reste en rapport avec un des pôles du kyste. La
coque de ce kyste, qui est épaisse et présente un double contour est
munie, précisément au pôle où se trouve la masse contractée, d'un
petit mamelon ou stigma qui fait saillie dans l'intérieur du kyste. La
masse contractée adhère à ce mamelon, puis descend dans le kyste
en restant attachée au manchon par un petit filament au bout duquel
elle paraît pendre. C'est le filament suspenseur d'Aimé Schneider.
— Chez d'autres espèces, on rencontre quelque chose d'analogue ,
mais on ne connaît pas encore la signification de cette disposition. —
La masse centrale s'organise alors en quatre corpuscules falciformes ,
commençant par quatre bourgeons qui se produisent à sa surface par
du protoplasma presque hyahn. Ils poussent quelquefois deux d'un
LES COCCIDIES.
77
côté et deux de l'autre, s'allongent en quatre bâtonnets qui ne méritent
pas le nom de « falciformes, » car c'est à peine s'ils sont recourbés.
Ils sont plus épais à une extrémité et semblent constitués par trois
segments, deux terminaux et un moyen. Le segment moyen paraît
taillé en un double biseau par lequel il s'enclave entre les deux
segments extrêmes qui ne se touchent que par un point. Le plasma
des segments extrêmes est plus homogène et plus clair, tandis que
dans le segment en biseau il est plus granuleux. C'est sans doute
que le corpuscule n'est pas encore mûr, car tous les corpuscules ne
sont pas construits ainsi : il en est qui sont formés d'une seule masse
homogène.
En outre des corpuscules, les spores renferment un noyau de reli-
quat, masse sphérique formée par la masse primitive granuleuse qui
n*a pas été employée pour la formation des corpuscules.
Que deviennent ces spores et notamment les corpuscules contenus
dans leur intérieur? — Aimé Schneider n'a pas réussi à suivre leur
développement qui, sans doute, se fait en dehors de l'animal dans
lequel on a trouvé la Psorospermie à l'état complet. Mais nous ver-
rons par la suite, dans d'autres genres, des espèces sur lesquelles on a
pu suivre le développement des corpuscules falciformes et reconnaître
ce qu'ils deviennent.
FiG. 20. — Eimeria nova du Glomeris (A. Schneider).
1, i. Eimeria dans la cellule du Glomeris, 3, rupture ae la cellule; 4, formation des
corpuscules falciformes ; 5, 6, 1, corpuscules falciformes nucléés.
Le genre Eimeria comprend deux espèces : l'une, ancienne, décou-
verte par Eimer en 1870 , et l'autre , nouvelle , Eimeria nova , de
A. Schneider. Cet auteur l'a rencontrée dans les tubes de Malpighi
d'un Myriapode , le Glwneris. C'est une petite masse ovalaire avec
78
LES SPOROZOAIRES.
noyau et nucléole, sans enveloppe , qui grossit, puis s'entoure d'une
membrane , rompt la cellule qui la contient et tombe dans la cavité
du tube de Malpighi. Elle est alors munie d'une membrane externe,
épaisse et résistante, et d'une membrane interne plus mince. Elle se
transforme en un faisceau de corpuscules falciforraes en rapport par
une extrémité avec le noyau de reliquat. Ces corpuscules, traités par
l'acide osmique, montrent, d'une manière très nette, un noyau. Ce fait
est important puisqu'il }• a une théorie d'après laquelle les corpuscules
falciformes se transforment directement en Grégarines et en Goccidies.
Ces petits corps sont doués de mouvements assez énergiques : ils se
recourbent et se redressent en détendant leurs extrémités , pendant
un temps plus ou moins considérable et avec une force plus ou moins
grande.
Ce n'est pas sur cette espèce qu'on a pu suivre le développement
ultérieur des corpuscules falciformes, c'est sur l'autre espèce du même
genre, VEimeria falciformis. On a pu assister à tout le cycle évolutif
de ce parasite, petite Coccidie découverte, enl870,parEimer, aujour-
d'hui professeur à Tùbingen. 11 l'a décrite sous le nom de Gregarina
falciformis, dans un petit mémoire intitulé : Reche7vhes sur les Pso-
7^ospermies ovifo'i^mes des FeHe&res. C'est A.Schneider qui, en en fai-
FiG. 21. — Eimeria falciformis de la Souris ('l'après Eimor).
1, Eimeria dans ane cellule épithéliale dont le noyau est refoulé ; 2, kyste ; 3, formation
delà spore; 4, 5, spores; 6, T, corpuscule falcifornie; 8, 9, 10, corpuscule passant a
l'état amiboïde.
LES COCCIDIES. 79
sant une Goccidie, lui a donné le nom d'Eimer. Celui-ci nous apprend
qu'il tenait en captivité, depuis assez longtemps, trois souris qu'il nour-
rissait convenablement , lorsque celles-ci vinrent à mourir pour une
cause qu'il ne put pas apprécier. Il les ouvrit et trouva dans l'intestin
une foule de petits organismes dont il a étudié toutes les phases de
développement. Il a vu que les cellules épithéliales de l'intestin renfer-
maient des masses plus ou moins sphériques et volumineuses de plasma
granuleux, munies d'un noyau, refoulant le noyau propre des cellules
épithéliales. Dans la cavité de l'intestin, il a trouvé des masses sem-
blables, mais libres et entourées d'une double membrane d'enveloppe.
La première membrane, externe, était épaisse, formant coque et la
seconde, plus fine, la tapissait à l'intérieur. Avec ces kystes , il en a
trouvé d'autres dans lesquels la masse interne était divisée en un plus
ou moins grand nombre de sphères, et d'autres dont le contenu était
formé par des bâtonnets falciformes ou recourbés, et disposés comme
les méridiens d'une sphère et appliqués contre la face interne de la
membrane intérieure. Ces bâtonnets, qui sont des corpuscules falci-
formes, étaient en rapport avec un noyau, le noyau de rehquat. Eimer
a pu suivre toutes les phases de développement des kystes à
contenu indivis jusqu'à la formation des corpuscules falciformes.
Bientôt les corpuscules se dérangent et prennent des dispositions plus
ou moins irrégulières. Mais Eimer a trouvé aussi avec les corpuscules
falciformes, d'autres corpuscules tout semblables, libres dans l'intestin
et les a vus exécuter des mouvements assez énergiques, se recourbant
et se redressant alternativement, quelquefois s'enroulant sur eux-
mêmes. Le plasma paraissait s'accumuler à l'une de leurs extrémités,
et bientôt les corpuscules se transformaient en une espèce de petit glo-
bule qui, au bout d'un certain temps, devenait une masse amiboïde.
C'est cette Amibe qui, d'après Eimer, après avoir rampé quelque
temps sur les cellules épithéliales pénètre dans une de ces cellules ,
puis grossit et revient kla phase primitive.
Eimer a donc vu et décrit le cycle évolutif tout entier d'une Gocci-
die ; il s'agit de savoir s'il a bien vu , car ses observations n'ont pas
80 LES SPOROZOAIRES.
encore été vérifiées, surtout dans cette phase importante où les corpus-
cules falciforraes se changent en Amibes. Il a trouvé les mêmes kystes
à bâtonnets falciformes et des corpuscules libres dans les excréments
de ses souris et d'autres souris venant de la même localité. Il en a con-
clu que ces corpuscules et ces kystes sont rejetés avec les déjections,
avalés avec les aliments par d'autres souris dans lesquelles ils se déve-
loppent, et ainsi de suite.
La différence qui distingue ce genre Eimeria, où il ne se forme
qu'une spore, du genre Orihospora , où il ne se produit aussi qu'une
spore, consiste en ce que la spore de ce dernier fournit seulement
quatre corpuscules falciformes, tandis que, dans le genre Evneria, elle
en produit un nombre indéfini.
Je crois que c'est dans ce même genre qu'il faut faire rentrer la
Psorospermie oviforme découverte par Bùtschli chez un Myriapode, le
Lithobius forficatus. En effet , dans un mémoire intéressant publié
par lui en 1881 {Zeilschr. f. wiss. Zool. t. XXXV), BûtschU décrit
une Goccidie qu'il a trouvée à l'état intracelkilaire dans les cellules
épithéliales de l'intestin du Lithobius et qui se présente, à son âge le
plus jeune, comme une masse falciforme, offrant un beau noyau avec
un gros nucléole. La petite masse est encore nue, mais, à une
phase plus avancée , elle présente une membrane d'enveloppe épaisse,
doublée d'une couche interne plus fine. La membrane externe porte
un épaississement en pointe ou en calotte à l'un de ses pôles.
Ces kystes se trouvent en grandes quantités dans la cavité digestive
de l'animal, et, à une phase plus avancée, Bùtschli a vu leur transfor-
mation en un grand nombre de corps en bâtonnet recourbé, munis
d'un noyau et d'un nucléole. Ce sont des faisceaux de corpuscules
falciformes doués des mouvements que nous avons déjà décrits.
Bùtschli insiste sur la découverte qu'il a faite de ce noyau , et il
remarque avec raison que c'est la première fois que ce noyau est
démontré dans les corpuscules falciformes des Coccidies ; mais chez
les Grégarines, Aimé Schneider, en 1875, avait déjà signalé un noyau
dans les corpuscules falciformes du Monocystis agilis En 1881 ,
LES COGCIDIES.
81
Bûtschli a signalé aussi et figuré un noyau dans les corpuscules aes
Grégarines monocystidées. Chez les Coccidies, la première observation
de ce genre n'a pas tardé à être confirmée par A. Schneider chez
ÏEimeria nova, comme nous venons de le voir. Les observations de
ces deux auteurs se sont suivies de très près , car Biitschli a publié
les siennes au printemps de l'année 1881 {Zeitschr. f. icisa. ZooL
t. XXXV), et A. Schneider pendant l'automne suivant (.4rc/i. de
ZooL ejrpèynm. t. IX).
Biitschli a rencontré aussi ces corpuscules falciformes libres dans
l'intestin du Liihobius; c'est donc au moment où le kyste se rompt. Je
vous ai signalé cette forme trèsjeune reconnue par Biitschli ; il semble
qu'elle représente le corpuscule falciforme pénétré , peut-être à l'état
d'Amibe, dans les cellules et réalise la forme la plus jeune du parasite.
Biitschli n'a pas nommé cette espèce et A. Schneider ne semble pas en
avoir eu connaissance. Elle paraît rentrer dans le genre Eimeria ,
car elle présente la caractéristique du genre : une seule spore et un
grand nombre de corpuscules falciformes. On peut la désigner sous le
i!om d'Eimerta Bûtschlii (1).
Nous arrivons maintenant à la tribu des Oligosporèes, dans laquelle
nous ti'ouvons un premier groupe , celui des Dlsporécs , caractérisé
[)ar la formation de deux spores et contenant deux genres : d'abord le
genre Cyclospora. C'est une Oligosporée à deux spores dont
chacune contient un nombre défini de corpuscules, mais ordinaire-
ment deux. On ne connaît qu'une espèce , le Cyclospora glomericola
FiG 22. — C]/clospora §lomericota (.\. SclineiJer).
I, Kyste 2, contraclioQ du contenu; 3, 4, formation des sporoblastes ; 5, formation des
spores; 6, spore avec corpuscules falciformes et noyau de reliquat.
(1) Depuis, BUtschli a disignd cette espèce sous le nom d'Eimei tj, Scfoxideri.
[Protozoa Bd. 1 von Bronn's Klassen und Ordnungen aes Thieireicht, 2. Aufl. p. 5'ô.)
82 LES SPOROZOAIRES.
qui se trouve dans les cellules épithéliales de l'intestiii du Glomeris ,
ce même Myriapode dans les tubes de Malpighi duquel nous
avons rencontré VEimeria nova. Ce parasite est très fréquent en
automne, à l'état enkysté, dans l'intestin de l'animal. Le contenu
du kyste remplit d'abord toute sa cavité ; puis , il se contracte et
abandonne les deux extrémités , les deux pôles opposés de ce kyste
ovoïde , pour se concentrer vers le milieu. Pendant qu'il quitte ainsi
la paroi interne , il sécrète à sa surface une membrane secondaire ,
interne , qui vient s'appliquer contre la première. En même temps , on
voit le noyau , qui était primitivement renfermé dans le centre même
de la masse intérieure , s'avancer peu à peu vers la périphérie en
suivant la ligne équatoriale , se placer à la surface , puis disparaître à
vue. Disparaît-il réellement , ou devient-il simplement moins
accusé on prenant un indice de réfraction et des caractères optiques
particuliers? — A ce moment, Aimé Schneider a vu apparaître à chaque
pèle , mais dans le contenu du kyste et sous la membrane , un petit
globule brillant et arrondi , et il compare cette disparition du noyau
avec formation de deux globules à la disparition de la vésicule ger-
minative de l'œuf et à la formation des globules polaires. Cette com-
paraison est-elle fondée ? — Toujours est-il qu'après que ce phéno-
mène s'est produit le contenu du kyste se divise en deux parties et il
se forme deux sphères de segmentation , sphères qui bientôt s'orga-
nisent chacune en une spore et qui , en raison de cette destination ,
ont reçu d'Aimé Schneider le nom de sporoblastes. Bientôt cliaque
sporoblaste s'éclaircit à un de ses pôles , s'entoure d'une membrane et
produit , dans son intérieur, deux corpuscules i'alciformes avec un
noyau de reliquat. Le développement de ces spores n'a pas été
suivi plus loin. J'ajouterai que les spores mûres de cette espèce,
renfermées dans le kyste , et même, plus rarement, à l'état de liberté,
ont été retrouvées dans les déjections des Glomeris. Ainsi répandues
dans le monde ambiant , elles sont reprises , probablement avec les
matières ahmentaires, par des animaux de la même espèce et c'est de
cette manière que se fait la propagation de ce Cyclospora.
LES COCCIDIES.
83
J'arrive au second genre de cette tribu , le genre Isospora , dont
les kystes ont deux spores formant un nombre indéfini de corpuscules.
A ce genre appartient une espèce rencontrée par A. Schneider dans
la Limace noire , \ Isospora rara. Il est probable que si l'on voulait
examiner tous les Invertébrés , et particulièrement les Mollusques , on
trouverait un grand nombre de ces petits organismes , et l'on ferait
FiG. 23. — Isospora rara de la Limace grisa (A. Schneider).
1, Kyste ; 2, segmentation du kjste ; 3, formation des sports ; 4, formation des corpuscules
falciformes ; 5, rorpusrule falciforme.
un riche butin d'espèces nouvelles. VIsospora rara n'a été trouvé
qu'exceptionnellement. Dans les kystes , la masse primitive se divise
en deux sporoblastes , et chaque sporoblaste se recouvre d'une mem-
brane particulière , membrane propre de la spore dans laquelle le
contenu s'organise en nombreux corpuscules falciformes , recourbés ,
et qui paraissent formés de trois segments dont les deux terminaux
plus réfringents. Cette apparence correspond sans doute à un état de
maturité incomplète.
La plus intéressante et la plus anciennement connue de toutes les
espèces de ce groupe est celle qui habite le foie et les cellules épithé-
liales de l'intestin du Lapin , le Coccidium oviforme. Je vous ai cité
les opinions émises sur ce singulier organisme. Nous savons mainte-
nant qu'il appartient au groupe des productions grégarinaires,
Lieberkûhn a été retenu contre la tendance qu'il avait d'en faire une
Grégarino véritable par ce fait qu'il supposait que toutes les Grégarines
se reproduisent par une transformation amiboïde qui représente la
première phase de leur développement. N'ayant pu constater cette
phase amiboïde chez la Psorospermie oviforme du Lapin , il ne l'avait
84
LES SPOROZOAIRES.
pas classée parmi les Grégarines. Toute l'histoire do cet organisme
montre qu'il faut le ranger parmi les Coecidies.
On peut, en effet, distinguer, dans l'évolution de la Psorospermie
oviforme du Lapin , une phase d'accroissement et une phase de repro-
duction. La phase d'accroissement se passe tout entière dans les
cellules épithéhales des conduits biliaires de l'hôte , car la Coccidie
FlG. 24. — Coccidium oviforme dans les cellules épithéliales des conduits hépatiques
et refoulant les noyaux de ces cellules (d'après Balbiani).
est intracellulaire. Ces conduits sont fortement dilatés par le parasite
et il se produit de véritables poches , non seulement en raison de la
dilatation des parois , mais par la rupture et la destruction du tissu.
Il en résulte un processus d'irritation qui détermine la prolifération du
tissu conjonctif du sfroma hépatique ; les faisceaux de ce tissu con-
FlG. 25. — Coupe d'un foie de Lapin envahi par le Coccidium oviforme. Les conduits
hépatiques sont dilatés par les productions parasitaires (d'après Balbiani).
LES COCCIDIES. 85
jonctif , les cellules épithéliales implantées sur ce stroma , avec les
parasites dans les cellules accrues, tombent dans la cavité do la poche.
Quand on incise ce'.te p«)clie , on trouve , dans le liquide caséeux ou
purulent qui la remplit, des cellules épithéliales détachées contenant le
parasite à toutes ses phases , et formant des masses plus ou moins
volumineuses qui refoulent le noyau de la cellule vers une de ses
extrémités.
Comme dans les cas que nous avons déjà signalés , le contenu du
kyste le remplit d'abord complètement, et celui-ci, qui a la forme d'un
œuf allongé , a une paroi plus mince à l'un de ses pôles qui présente
une petite dépression en forme de raicropyle. Est-ce réellement un
raicropyle?On ne le sait. — Le contenu, grisâtre, compte, d'après mes
mesures récentes , 36 [x de longueur sur 18 [>. de largeur. Puis , le
kyste grossit et acquiert une paroi plus épaisse ; il atteint 43 \x sur 22.
Alors , le contenu se contracte en boule au centre , et c'est là la phase
ultime du développement que l'on observe dans le foie ou dans l'intestin
du Lapin ; on n'a jamais vu , dans ces conditions , le parasite organisé
différemment , et tous les auteurs sont d'accord à admettre que, pour
pouvoir pousser les observations plus loin , il faut placer les kystes
dans d'autres conditions.
C'est Kauffmann qui a eu l'idée, en 1847, de réaliser ces nouvelles
conditions et de placer les kystes dans l'eau. Il a vu, au bout de quinze
jours , le contenu se diviser en deux ou quatre parties , mais toutes les
modifications se sont arrêtées là. D'ailleurs, Kauffmann considérait
ces corpuscules comme des parties de l'organisme altérées par une
maladie qu'il compare à la tuberculose. Ces résultats ont été confirmés,
en 185i, par Lieberkiihn et, en 1860, par Davaine. Stieda, en 1865,
et Waldenburg , en 1867 , allèrent plus loin. Ils placèrent des foies de
Lapins infestés de Psorospermies dans de l'eau pure ou dans des
solutions faibles de bichromate de potasse ou d'acide chromique.
C'est ainsi que Waldenburg , au bout de quatre ou cinq jours , Stieda ,
au tout de quatre ou cinq semaines , observèrent la segmentation du
contenu du kyste en deux, puis en quatre parties. Mais, à partir de ce
LES SPOROZOAraES.
moment, laurs observations présentent de notables divergences.
Examinons d'abord l'observation beaucoup plus exacte de Stieda.
D'après lui, chacune des quatre parties du contenu ainsi segmenté
s'allonge et produit , dans son intérieur, un bâtonnet cylindrique
légèrement recourbé et aux extrémités un peu renflées en une sorte de
boule; dans la concavité du bâtonnet est logée une masse granuleuse,
le tout renfermé dans une paroi propre , celle de la spore. Ainsi ,
Stieda avait bien reconnu quatre spores formant chacune un corpus-
cule falciforme et un noyau de reliquat, mais il n'employait pas ces
termes et ne connaissait pas la signification de ces parties. Il réussit
aussi à isoler les bâtonnets qu'il a pu décrire très exactement. (Arch.
r. path. Anat. t. XXXII, 1865).
Waldenburg s'est trompé dans ses observations , mais comme on les
cite souvent, il est utile de les signaler. Après la division du contenu du
kyste en quatre parties, chacune de ces parties se diviserait elle-même
en quatre autres , ce qui fait seize petites sphères qui sortent du kyste
sous forme d'un corps amiboïde et représentent la période la plus jeune
du développement delaPsorospermie. ('Virchow's Archiva. XL, 1867].
Les observateurs modernes ont confirmé les assertions de Stieda et
réfuté celles de Waldenburg : Leuckart, par exemple, dans la 2*' édi-
tion de son ouvrage sur les parasites de l'homme. J'ai moi-même
beaucoup étudié ces parasites et observé tout le cycle évolutif de la
Coccidie du Lapin. Sur les kystes placés dans l'eau, j'ai vu , comme
Stieda, la division en quatre spores, mais je suis arrivé à quelques
faits particuliers dont je dois dire quelques mots. Quand on relit les
auteurs qui ont traité cette question, on est surpris de constater que
les divers observateurs varient considérablement dans l'appréciation
du temps nécessaire pour le développement et la segmentation du
kyste. Kauffmann évalue ce temps à quinze jours à partir de la phase
ultime à laquelle on le trouve dans les organes du Lapin. Stieda le
porte à six semaines , Lieberkûhn à quelques mois. Waldenburg et
Reincke (Diss. inaug. 1866), dans quelques cas , le fixent à quatre ou
cinq jours. Leuckart le considère comme subordonné à la température
LES COCGIDIES. 87
ambiante ; ainsi , en hiver, dans une chambre chauffée , le déve-
loppement se fait en quatre semaines, tandis qu'il ne se produit qu'au
bout de neuf semaines dans une chambre non chauffée. Quelle est
la raison de ces divergences si grandes? Je crois l'avoir trouvée,
car j'ai remarqué que cette durée est, en effet, variable et dépend
uniquement des conditions dans lesquelles on place les kystes, de
l'accès plus ou moins facile de l'oxygène à la surface de ces corps et
de leur activité respiratoire. Ainsi, l'épaisseur de la couche d'eau qui
la recouvre a une très grande influence sur le temps que la Psorospermie
met à se diviser, mais une fois qu'elle a commencé sa segmentation ,
les phases se succèdent assez rapidement. En effet, quand on place
de petits morceaux de foie infesté de Coccidies dans de l'eau, si la
couche d'eau qui les recouvre a une épaisseur de 2 ou 3 centimètres, la
segmentation des kystes se produit après un laps de quhize jours à trois
semaines. Si la couche d'eau est plus mince et seulement de 2 ou 3
millimètres, et que h; vase ait une ouverture très large, comme un
verre de montre, par exemple, la segmentation se produit en deux ou
trois jours, au moins dans une chambre chauffée à 15-18° C, ou en été.
Au bout de dix à quinze jours , les kystes renferment tous des spores
bien développées avec des corpuscules falciformes ; puis, une fois
commencées , les phases du développement se poursuivent avec la
môme rapidité sur tous les kystes.
J'ai obtenu les mêmes résultats dans le sable humide qui fournit de
très bonnes conditions pour le développement des Psorospermies
comme pour celui des œufs des Nématoïdes. C'est par ce moyen , en
effet , que Leuckart a réalisé un grand nombre de ses belles expé-
riences sur les Nématoïdes , et les conditions sont meilleures encore
que dans l'eau.
On constate des différences analogues quand, au lieu de placer dans
l'eau le pus psorospermique, on y dépose des morceaux de foie tout
entiers. Il arrive alors que le foie se pourrit et la putréfaction empêche
le développement d'un grand nombre de kystes. Ceux qui , devenus
88 LES SPOROZOAIRES.
libres, se sont déposés au fond du vase et qui échappent à la putréfac-
tion continuent leur évolution. D'ailleurs, dans toutes les cultures, les
seuls kystes qui se développent sont ceux qui sont arrivés à la phase
ultime, celle où le contenu du kyste est contracté en boule au centre ;
tous les autres restent pendant un certain temps dans le même état,
puis se détruisent plus ou moins rapidement.
LES COCCIDIBS. W
III
Nous avons vu, sur le Coccidium oviforme et sur d'autres espèces,
que le développement des Coccidies s'opère en deux temps ou périodes;
pendant la première , les kystes se forment et poussent leur évolution
jusqu'à ce que le contenu de ces kystes se contracte en boule au
centre, et le processus s'arrête là tant que les kystes sont contenus
dans l'animal qui les héberge. La seconde période se passe dans le
milieu cosmique ; le développement y reprend et se continue jusqu'à ce
que le contenu des kystes se soit converti en quatre spores présentant
chacune un corpuscule falciforme, dans le Coccidium oviforme, et un
noyau de reliquat (1), Il est impossible de ne pas remarquer l'analogie
que présente ce mode de développement en deux temps, avec celui
d'un grand nombre d'Helminthes, les Nématoïdes , par exemple, chez
lesquels l'œuf se développe aussi en deux périodes : première
période dans l'intérieur de l'animal qui héberge le parasite, et seconde
période dans le milieu ambiant. Ainsi , pour l'Ascaride lombri-
coïde , on le trouve , dans les matières exciémontitielles de l'Homme,
à l'état d'œuf dont le vitellus remplit encore toute la cavité. Il persiste
dans cet état jusqu'à ce qu'il soit mis en contact avec le milieu
ambiant. Placé dans l'eau , il reprend son développement après
un temps variable avec la température. Schubart . Richter,
Leuckart et Davaine ont constaté qu'il a une période de repos qui
peut se prolonger de trois mois à six mois (Leuckart et Davaine). Le
vitellus se divise alors, et subit la segmentation jusqu'à ce que l'œuf
renferme un embryon bien développé. Le Slrongle géant , comme je
l'ai constaté, présente un état de développement plus avancé dans les
organes de l'hôte, car l'œuf s'est déjà divisé en deux sphères de seg-
mentation, mais le processus ne va pas plus loin. Cet œuf, un peu
(1) Nous verrons plus loin que, dans cette espèce, chaque spore contient non pas un
seul corpuscule falciforme, comme on l'a avancé jusqu'à présent, mais deux.
90 LES SPOROZOAIRES.
polygonal , à angles mousses , placé dans l'eau . met cinq mois
pour subir le développement qui va jusqu'à la formation d'un embryon,
(Jomm. de VAnat. de Ch. Robin t. vu, 1871).
On sait aussi que chez beaucoup d'Helminthes, l'embryon séjounie
longtemps dans l'œuf sans éclore; quel que soit le temps pendant lequel
on garde celui-ci dans l'eau ou dans le sable humide, il ne continue
son développement que quand l'œuf se retrouve placé dans le sein de
l'animal qui doit être son iiôte : l'Homme pour l'Ascariile lombricoïde ,
mais, pour le Strongle, je n'ai pu trouver l'animal dans lequel s'achève
le développement. Pour l'Ascaride lombricoïde, Davaiiie a trouvé l'em-
bryon vivant au bout de quatre ans, dans l'eau ; il en est probablement
de même des Coccidies . Il est à supposer, en effet , que la survie des
spores de ces organismes se prolonge pendant longtemps , mais on n'a
pas encore de renseignements très précis sur cette question, comme
or» en possède sur la durée de l'œuf de Y Ascaris lumbricoides (1) .
Ce développement en deux phases étant connu , il est facile de se
représenter la manière dont se fait la transmission d'un animal à
l'autre. Les kystes, expulsés avec les excréments d'un premier hôte, se
développent dans l'eau ou dans la terre humide. Enquatorze ou quinze
jours, ils sont mûrs et probablement entraînés, les liquides qui les conte-
naient s'étant desséchés, avec les poussières, par les courants d'air ; ils
viennent tomber sur les aliments d'animaux sains. Parvenus de cette
manière dans le tube digestif de ceux-ci, les kystes mettent en liberté
leurs spores qui se ti'ansforment en nouvelles Coccidies; celles-ci sé-
journent dans le canal intestinal, si ce sont des Coccidies de l'intestin,
ou s'introduisent dans les conduits biliaires par le canal cholédoque,
si ce sont des Coccidies du foie.
La propagation des Coccidies est favorisée par la réunion de nom-
breux animaux dans un même local, ce qui explique la fréquence de
ces parasites chez les Lapins, et particulièrement chez ceux de Paris.
(1) Nous con ervons depuis le mois d'avril 1882, dans de l'eau pure, des spores mûres de
Coicidium oviforms donl le contenu, form? par les corpuscules fal-iforme- et le nurléus
de reliquat, présente encore un aspect parfaitement frais (note de juin 1883). .
LES COCCIDIES. 9\
D'ailleurs , c'est la loi de toutes les maladies parasitaires de s'entre-
tenir par le rassemblement des individus dans un même lieu. Ces faits
expliquent comment la psorospermose est si fréquente chez les Lapins
domestiques, tandis qu'elle est rare chez les Lapins sauvages qui ont,
eji général, un genre de vie tout différent , et sont disséminés sur un
vaste espace. Je tiens de mon ami et collègue, le professeur Brown-
Séquard , qui a disséqué tant de Lapins des deux mondes, qu'il n'a
jamais observé de foie psorospermique chez les Lapins de l'Amérique
du Nord, lesquels vivent à l'état sauvage.
Le mode de pénétration de ces parasites par le tube digestif n'est
donc pas douteux. Nous avons eu, M. Henneguy et moi, l'occasion
d'examiner récemment un jeune Lapin, et dans la masse volumineuse
que renfermait l'estomac , ainsi que dans les aliments digérés do l'in-
testin, nous avons trouvé un grand nombre de Goccidies arrivées à la
phase ultime qu'elles atteignent chez les animaux qui les hébergent.
L'animal présentait bien quelques petites tumeurs dans son foie, mais
les Psorospermies de l'intestin étaient si nombreuses que leur pré-
sence ne pouvait pas s'expliquer par celles du foie. C'étaient évidemment
des Coccidies ingérées avec les aliments. Du reste , nous en avons
trouvé un grand nombre dans l'estomac, ainsi que je l'ai dit, et
même dans la partie inférieure de l'œsophage. Ces parasites avaient
donc bien été introduits avec les matières alimentaires.
Si ce mode de propagation n'est pas douteux , nous connaissons
beaucoup moins bien la marche même de l'évolution du parasite après
son introduction dans le tube digestif. Que deviennent les kystes et les
spores au contact des liquides de l'estomac et de Tinteslin ? — 11 fau;
avouer l'insuffisance de nos connaissances à ce sujet. Les seuls
observateurs qui aient tenté de résoudre cette question sont Walden-
burg et Rivolta. Rivolta a opéré sur des Poules ; ces oiseaux sont, en
efifet, infestés par une Coccidie , mais celle-ci est d'un autre genre
que celle qui nous occupe particulièrement , et les faits peuvent être
différents. Waldenburg a expérimenté avec des Lapins. Il a fait
ingérer à de jeunes Lapins de quatre semaines des Coccidies qu'il
92 LRS SPOROZOAIRES.
supposait mûres. Après quatre jours, il trouva, à la surface de l'in-
testin, chez les jeunes animaux , de petites granulations formées d'un
plasma granuleux entouré d'une membrane très fine , et présentant
quelque analogie avec les jeunes Coccidies des cellules épithéliales du
foie. Il fit des expériences de contrôle en tuant des Lapins du même
âge, mais élevés dans un autre local. Ceux-ci ne présentaient pas de
petits corps granuleux sur la paroi de l'intestin. Je dois cependant
ajouter que ces faits ne peuvent pas être acceptés sans quelques
réflexions , car Waldenburg ne s'était pas fait une idée très nette de
révolution du Coccidium oviforme. Il n'avait pas vu ces quatre spores
mûres indiquées par Stieda ; il a écarté des vues justes pour y substi-
tuer des idées erronées, comme on l'a reconnu plus tard. Quant aux
expériences de Rivolta sur la Poule , elles ne méritent pas beaucoup
plus de confiance que celles de Waldenburg, car il ne s'était pas fait
une idée beaucoup plus exacte de l'évolution de ces Psorospermies.
Ainsi, dans ses premières observations, il supposait que le contenu du
kyste se divisait en quatre globules qui étaient revêtus de cils vibra-
tiles et qu'il comparait h des Infusoircs, supposition absolument fausse.
(Voir, pour Waldenburg, Virchow's Archiv, t. XLX, 1867; et, pour
^\\(A\.?i.,Gio7'naIemedic. veterin.L IV, 1869).
On peut se faire nue idée a priori des phases que traversent ces
corps dans l'économie animale. Il est probable que les spores commen-
cent par être mises en liberté avant de se développer. Mais comment ?
Est-ce par rupture de la membrane du kyste? Sortent-elles par
ce point qu'on a nommé micropyle ?
Il est probable aussi que ces spores, c'est-à-dire le ou les corpuscules
falciformes qu'elles renferment , se transforment en petites masses
amiboïdes représentant l'état le plus jeune de la Psorospermie . Que si
celles-ci appartiennent à une espèce intestinale, elles se fixent dans les
cellules épithéliales de l'intestin , ou bien , si elles appartiennent à une
espèce hépatique, elles pénètrent dans le foie par le canal cholédoque.
— Telle est probablement la marche de l'évolution de ces parasites,
mais ce ne sont là que des vues a pynori.
LES COCCIDIES. 93
Il serait aussi très intéressant de reconnaître par quel mécanisme
les petits corps amiboïdes pénètrent dans les cellules épithéliales.
Nous connaissons des exemples de cette pénétration d'un parasite dans
l'intérieur des cellules chez un gi-and nombre d'espèces animales et
végétales. C'est dans cette cellule animale ou végétale que le parasite
achève son développement ; mais nous ignorons presque complètement
le mécanisme de cette pénétration : le parasite perce-t-il la membrane,
quelquefois très résistante de la cellule par un processus mécanique,
ou bien le dissout-il par une action chimique ? Quand nous étudierons
d'autres parasites appartenant au groupe des Sporozoaires, nous trou-
verons encore d'autres cas de pénétration dans les cellules, par
exemple, chez les Psorospermies des Poissons et celles des Vers à soie.
Le Lapin n'est pas le seul Mamrailère dans les organes duquel on
trouve les Psorospermies. On rencontre aussi des organismes du
même groupe chez le Chien, le Chat, l'Homme lui-même, mais ils sont
moins bien connus que la Coccidie du Lapin , et l'évolution de ces
espèces n'a pas été poursuivie comme celle du Coccidhim oviforrae.
Malgré leur ressemblance avec cette dernière espèce , il se pourrait
qu'elles appartinssent à des espèces différentes. C'est ainsi qu'on
aurait pu croire que la Psorospermic qui vit dans les cellules épithé-
liales de l'intestin de la Souris appartenait au genre Coccidium ; or,
nous avons vu qu'elle rentre dans le genre Eimeria. Cette Coccidie de
la Souris est monosporée, c'est donc à tort qu'Eimer a voulu identifier
ces deux espèces. Leuckart incline, au contraire, à en faire deux
espèces différentes. 11 croit que la Coccidie du Chat, du Lapin, de
l'Homme, et peut-être même la Coccidie intestinale du Lapin,
appartiennent à une autre espèce que celle du foie de ce dernier
animal ; il se fonde pour cela sur diverses raisons , telles que la
différence de l'habitat et sur un autre caractère que je considère
comme erroné : l'inégale durée de l'incubation de ces Coccidies en
dehors de l'économie animale. Ainsi, les Coccidies de l'intestin
emploient un temps beaucoup plus court , à ce qu'il croit , pour re-
prendre la série de leur développement, que les Coccidies du foie qui
94 LES SPOROZOAIRES.
ne se développent que quelques semaines ou même plusieurs mois plus
lard. Leuckart pense pouvoir se fonder sur ce caractère pour attri-
buer ces Coccidies à des espèces différentes. Je crois , au contraire ,
pouvoir prouver que ces différences dépendent, comme nous l'avons
dit, des conditions do l'incubation et, par exemple , de la quantité d'eau
qui recouvre les kystes. Sous une épaisseur assez considérable ,
2 à 3 centimètres , l'évolution se fait très lentement , parce que la
respiration des organismes s'accomplit difficilement; sous une couche
de 2 à 3 millimètres, au contraire, le développement est rapide, parce
que la respiration se fait bien.
Quoi qu'il en soit , Leuckart est d'avis de faire une espèce particu-
lière des Coccidies de l'intestin , pour laquelle il propose le nom
de Coccidium perforans ; ce serait cette espèce qui vit dans les
cellules épithéliales de Tintestin chez plusieurs animaux. Quant au
nom , il viendrait de ce que c'est sur l'épithélium intestinal qu'on a
constaté d'abord la perforation des cellules au moment où les Psoros-
permies les abandonnent pour tomber à l'état de kystes dans la cavité
de l'intestin. L'épithélium subit alors un travail de dénudation qui
détermine des irritations et divers phénomènes pathologiques , ainsi
que nous l'avons montré pour le Coccidium oviforme.
On a observé aussi des Coccidies dans l'intestin de l'Homme ,
Kjellberg et Eimer en ont trouvé dans des cadavres humains, dans le
foie , par exemple , mais leur existence n'avait pu être diagnostiquée
pendant la vie. Plus lard , Rivolta et Grassi auraient rencontré des
corps oviformes chez l'Iiomme vivant, dans les matières intestinales
d'enfants et d'adultes; chez un jeune garçon, Grassi a constaté, pendant
près de trois mois, des Coccidies rendues avec les déjections. Rivolta
en a rencontré aussi chez un homme atteint de fièvre intermittente ,
mais il faut avouer que les descriptions et les figures qui en sont
données sont trop incertaines pour qu'on puisse rien affirmer et, pour
ma part , je doute fort qu'il s'agisse réellement là de Coocidies , car
les figures me paraissent plutôt représenter des œufs d'Helminthes
altérés.
LES COCCIDIES. 95
Mais une observation beaucoup plus complète et plus intéressante
est celle qu'a faite Gubler, et qui se trouve consignée dans les
Mémoires de la Société de biologie (2° série, t. V, 1858). Cette obser-
vation est d'autant plus intéressante que la maladie put être diagnos-
tiquée pendant la vie, non pas au point de vue de l'existence des
Psorospermies, mais quant aux lésions produites. 11 s'agit d'un ouvrier
carrier, âgé de quarante-cinq ans , entré à l'hôpital Beaujon en 1858
pour divers troubles des fonctions digestives. chloro-anémie profonde,
etc. Le foie était très augmenté de volume ; dans la région liypo-
chondriaque droite, on constatait la présence d'une tumeur pleine de
liquide, douloureuse à la pression. Gubler diagnostiqua une tumeur
hydatique. Pendant son séjour à l'hôpital , le malade vint à tomber ; il
fut aussitôt pris de frissons, de douleurs intenses dans le côte droit, de
délire, et mourut le surlendemain de sa chute. A l'autopsie, on trouva
des lésions tiès intéressantes. Le foie était très hypertrophié et conte-
nait une vingtaine de tumeurs grosses comme une noix ou un œuf, et
une autre, remarquable par ses dimensions : Gubler la compare à la
tête d'un fœtus de six mois, c'est-à-dire qu'elle avait de 12 à 15 centi-
mètres de diamètre. Toutes les tumeurs renfermaient une matière de
consistance variable , tantôt une masse caséeuse plus ou moins
épaisse, tantôt un hquide blanc jaunâtre puriforme , et ces ma-
tières renfermaient des quantités prodigieuses de corpuscules ovi-
formes que Gubler et d'autres observateurs regardèrent comme des
œufs do Distome , mais , d'après la description très exacte qu'il en
donne, il est évident qu'il s'agit de Goccidies. Gubler signale même, à
l'extrémité amincie du corpuscule , la petite dépression que nous y
connaissons et qu'il compare à un micropyle ou un opercule. Quant
au contenu du kyste, tantôt il en remplissait toute la cavité, tantôt il
était ramassé en bouleau centre, comme nous l'avons vu chez le
Lapin. Du reste, et c'était une circonstance qui avait beaucoup frappé
Gubler, il lui fut impossible de trouver dans ce foie malade aucun
Distome ni aucun autre Helminthe.
En reproduisant cette observation, Leuckart se pose cette question ;
9e LES SPOROZOAIRES.
comment cet homme a-t-il pris ces germes, comment s'est faite,
chez rHorame, cette invasion de la Goccidie du Lapin? Malheureuse-
ment , on n'avait aucun renseignement sur le genre de vie du malade
de Gubler. Peut-être a-t-il fait usage d'eau de citerne ou de puits en
communication avec une étable h Lapins, ou mangé des aliments sahs
par la poussière d'une do ces étables? Si cette supposition est vraie, on
doit s'étonner que cette maladie ne soit pas plus fréquente chezl'Homme,
car il est chez nous des gens qui élèvent des Lapins en grand nombre,
vivent pour ainsi dire avec eux , les logent jusque dans la chambre où
ils couchent et sont en contactr continuel avec ces animaux. Toutefois,
cette maladie ne paraît pas être aussi rare qu'on pourrait le supposer.
Dressler, de Prague , a trouvé des Psorospermies dans le foie d'un ca-
davre humain. Leuckart, dans la seconde édition de son grand ouvrage
sur les parasites de l'Homme, signale deux autres cas analogues, et il
est probable que si Tattention des savants était plus spécialement
dirigée de ce c(Mé, les observations de ce genre se multiplieraient de
plus en plus.
Mais ce n'est pas seulement dans l'intestin de l'Homme que les
Psorospermies paraissent exister. On a prétendu qu'elles peuvent se
trouver dans le rein , dans les cheveux , etc. Un médecin russe,
Lindemann , dans une première observation que Leuckart rapporte,
sans la garantir, dans la première édition de ses Parasites de V Homme,
a signalé un malade mort de la maladie de Bright , et dont le rein
présentait des amas d'un brun roussâtre , dans la tunique albuginée ,
amas formés de globules en plus ou moins grand nombre , envahissant
la substance du rein et siégeant dans le tissu conjonctif de cet organe,
dont ils écartaient les fibres de leur direction normale. L'auteur ne
donne pas d'autre détail, et il est bien difficile, d'après ces faits très
incomplètement décrits , de savoir s'il s'agit réellement de Psorosper-
mies du rein. Une autre observation présente encore moins de certi-
tude, bien que les journaux parisiens s'en soient jadis emparés et se
soient Uvrés à ce sujet à de nombreuses appréciations plus ou moins
fantaisistes. Elle est consignée dans les Bulletins de la Société hnp.
LES GOCCIDIES. 97
des naturalistes de Moscou pour 1863 et se rapporte à des masses
psorospermiqiies trouvées à la racine des cheveux chez une jeune
fille. Ces masses avaient l""™ de long, formant des saillies de 1/6 de
millimètre composées de globules. Indépendamment de ces masses,
l'auteur aurait vu sur les cheveux des corps formés de deux segments,
immobiles, présentant un noyau et ressemblant à de véritables Gréga-
rines rampant à la surface du cheveu , ce qui est un siège tout à fait
insolite pour ces organismes et incompatible avec le genre de vie de
ces êtres. D'après Lindemann , cette Grégarine serait assez fréquente
à Nijni-Novgorod et vivrait dans le tube digestif des poux , qui
seraient les hôtes habituels de la chevelure des femmes de ce pays ;
les Grégarines quitteraient les poux pour s'enkyster sur les cheveux ,
où elles formeraient ces amas psorospermiques. Or, ces cheveux
servent souvent à confectionner ces chignons postiches que les dames
recherchent avec tant d'empressement, et comme ces Psorospermies
résistent à toutes les préparations que les négociants en ces articles
font subir aux cheveux, il en résulterait que nos élégantes s'implante-
raient sur la tête, à grand renfort d'argent , les Psorospermies conte-
nues dans les excréments des poux russes. — Peut-être n'y a-t-il , au
fond de tout cela, qu'un petit roman ?
Des cas plus graves sont ceux que produisent les Psorospermies
quand elles constituent des épizooties chez les animaux domestiques ,
non seulement chez le Lapin, mais aussi chez les volailles. Rivolta et
Silvestrini ont observé une mortalité très grande chez les Poules, aux
environs de Pise, avec tous les caractères d'une psorospermose. 11 s'a-
gissait, en effet, de Psorospermies vivant dans les cellules épithéliales
de la conjonctive et des voies aériennes où elles produisaient un
gonflement inflammatoire aboutissant à l'asphyxie. En 1873, MM.
Arloing et Tripier reçurent d'un vétérinaire des environs de Tou-
louse , des Poules mortes et d'autres encore vivantes avec les-
quelles ils purent entreprendre des expériences. Ces animaux pré-
sentaient des tumeurs nombreuses , de volume variable , dans le
foie, l'intestin, l'œsophage, les poumons. La mort était précédée d'un
lES SPOROZOAIRES.
état d'émaciation extrême dû à l'inanition, caries Poules ne digéraient
pas lo peu d'aliments qu'elles prenaient. Les tumeurs étaient presque
entièrement composées de Psorospermies et contenaient la même
matière tuborculiforme que nous avons vue chez le Lapin. Prié par
MM. Arloing et Tripier d'examiner ces produits, j'ai trouvé à ces orga-
nismes des caractères analogues à ceux qu'Eimer avait décrits chez
la Psorospermie de la Souris. Ce qui est intéressant, c'est qu' Arloing
et Tripier ont pu déterminer une psorospermose artificielle en faisant
manger à des poulets la matière de ces tumeurs. Du reste , des
expériences tout à fait analogues ont été faites , avec le même succès,
par Rivolta et Silvestrini.
Tels sont les faits concernant les Psorospermies oviformes apparte-
nant au genre Coccidimn, qui est certainement le plus intéressant. Si je
suis entré dans ces détails , peut-être un peu longs , c'est pour mieux
vous montrer que les Psorospermies peuvent jouer un rôle important
dans les maladies parasitaires graves , de nature à affecter la forme
épizootique, et un peu négligées pour l'étude des maladies attribuées à
des Schizomycètes , maladies beaucoup plus redoutables d'ailleurs.
Mais j'ai voulu faire voir que les Psorospermies elles-mêmes peuvent
déterminer des maladies très graves dont la cause peut être méconnue
si l'on ne la recherche pas à l'aide du microscope. Du reste, nous
trouverons, en étudiant les autres groupes de Sporozoaires, d'autres
agents tout aussi actifs que les Bactériens et tout aussi terribles :
tels sont ceux de la pébrine , qui a ruiné l'industrie de la soie
dans toute l'Europe, car c'est à peine si, depuis quelques années, cette
industrie commence à renaître en France et surtout en Italie.
Il nous reste encore à examiner le genre Klossia , créé par Aimé
Schneider. C'est h une espèce de ce genre que se rapporte la première
description , très complète et très exacte, que nous possédions d'une
Psorospermie oviforrae , le Klossia helicina, description déjà assez
ancienne. Ce genre est unique dans cette tribu des Polysporèes, et
l'espèce de ce genre qui est le mieux connue- vit dans le Colimaçon
vugaire, Hehx hortensis , dont elle habite le rein (voir l'explication
LES COCCIDIES.
99
des figures 1 à 7 de la planche III). Son évolution a été complètement
et supérieurement étudiée par Hermann Kloss (Mém. de la
Soc. de Senkenberg , t. I, 1855) dans un mémoire accompagné
d'admirables figures. — Tandis que dans tous les autres genres
nous avons vu le parasite changer d'habitat pendant le cours de
son développement, ici, au contraire, l'évolution se fait tout entière
dans la même cellule. C'est une masse granuleuse qui se divise en
fragments sphériques , chacun formant une vésicule qui s'entoure
d'une paroi assez épaisse et produit à son intérieur des corpuscules
falciformes. Ces vésicules sont donc des spores ; elles ont la même
constitution que les autres Coccidies et renferment des corpuscules
falciformes et un noyau de reliquat. Elles ressemblent donc aux
Eimeria, mais il y a un grand nombre de spores dans le kyste, Kloss,
ayant mis en liberté ces corpuscules falciformes, a constaté chez eux
des mouvements de contraction , les extrémités s'éloignent et se rap-
prochent, et il se forme un petit corps amiboïde qui semble pénétrer
dans les cellules épithéhales des canalicules du rein pour recommen-
cer le même cycle d'évolution .
FiG. 26. — Klossia helicina de YHelix horlensis (d'après Kloss.)
et Coccidies de l'Homme.
1 , Klossia dans la cellule de YHelix ; 2, kyste et formation des spores; 3, organisation des
corpuscules falciformes ; 4. corpuscules falciformes mis en liberté ; 5, 6, Coccidies de
l'Homme, d'après Leuckart (voir Davaine, Entozoaires, 2'^ éd. p. 268).
Lorsque Kloss a rencontré ce parasite, il ne savait pas à quel orga-
nisme il avait affaire et se contenta de le décrire comme un parasite
du rein de V Hélice des jardins. Leuckart, dans son Bericht de
«00 T.ES SPOROZOAIRES.
1855, soupçonna que ce pouvait être une Grégarine. Aimé Schneider
démontra que ce n'était pas une Grégarine , mais une Psorospermie
oviforme, h laquelle il a donné le nom que nous avons cité plus haut :
Klossia helicina.
Si Aimé Schneider était remonté seulement une année plus haut
dans ses recherches bibliographiques, à 1854 , il aurait pu rencontrer
une espèce de Klossia qui avait été décrite encore avant celle que
Klossa observée chez le Limaçon. C'est Lieberkiihn qui, dans son
mémoire sur l'évolution des Grégarines, a mentionné la première espèce
devant être rapportée k ce genre, mais dans des termes tellement
vagues qu'il était difficile de soupçonner qu'il s'agissait d'un Klossia.
Lieberkiihn lui-même croyait avoir affaire à une Grégarine. Il avait
vu chez la Seiche, Sepia of/îcinalis, des kystes qui renfermaient des
spores qu'il décrit comme elliptiques. Il attribue ces kystes à une
Grégarine inconnue encore à l'état libre et mobile. Plus tard , ces
mêmes kystes ont été trouvés chez le Poulpe et la Seiche par Eberth
{Zeilschr. f. wiss., Zool. t. XI, 1862), sous forme de vésicules
d'un blanc grisâtre, larges quelquefois de 1""", placées non seulement
sous la peau , mais sous la muqueuse de presque tous les organes
intérieurs , tantôt éparses, tantôt groupées en petits amas saillants.
Eberth attribue ces kystes à une Grégarine qu'il n'a pas non plus ren-
contrée à l'état libre et mobile. Il donne de nombreuses figures des
kystes, pour montrer les variations du contenu. Le kyste contient un
grand nombre de globules sphériques granuleux, dont Eberth attribue
la formation à une segmentation régulière du contenu ; puis , une
membrane se forme à la surface des globules qui s'éclaircissent k
l'intérieur, et il donne des figures qui prouvent qu'il avait parfaitement
vu les corpuscules falciformes, et cela dès 1862. Il a même considéré
cette forme comme un état mûr et représenté une petite masse granu-
leuse dont la signification lui échappe, et qui est est notre noyau de
rehquafc.
Il n'existait alors que le travail de Kloss sur la Psorospermie de
l'Hélice et il était complètement inconnu, car aucun auteur ne l'a
LES COCCIDIES. 10<
mentionné. Eimer lui-même, qui a donné une bibliographie complète
à propos de la Coccidie de la Souris, a ignoré le mémoire de Kloss , ce
qu'Aimé Schneider lui reproche très vivement.
Ces mêmes Goccidies des Céphalopodes ont été décrites depuis dans
les Archives de Zoologie expérimentale , en 1875 , par A. Schneider
sous le nom de Benedenia octopiana, mais l'an dernier, il a identifié
les deux genres Klossia et Benedenia. Pour la Coccidie du Poulpe
Klossia octopiana , cet auteur donne une bonne description de
l'évolution du contenu du kyste et confirme les observations d'Eberth.
11 a vu, dans les kystes plus âgés, les sphères se transformer
en vésicules ou spores naissantes , puis former des corpuscules
falciformes , une quinzaine environ ; ces corpuscules sont quelquefois
disposés en vspirale , d'autres fois parallèlement sur deux rangs
se coupant à angle droit , ce qui ji'a rien de caractéristique .
puisqu'à la maturité leur arrangement se détruit. Isolés , ils sont
cylindriques , et , examinés dans le sang du Poulpe , on les voit exé-
cuter des mouvements de contraction dont nous connaissons de nom-
breux exemples. Dans l'eau, ils sont immobiles. Leurs transformations
n'ont pas été suivies (1).
Une troisième espèce vit dans le rein d'un Gastéropode aquatique, le
Neriiina fîuviatilis. C'est le Klossia soror. A. Schneider a décrit son
évolution, et c'est à propos de cette espèce que le mode de formation
des spores a été reconnu d'une manière évidente. Les amas granuleux
naissent par un véritable bourgeonnement à la surface de la masse
granuleuse interne. Ils forment des globules hyalins , très transpa-
rents , qui se déplacent , et la masse granuleuse est employée tout
entière à la formation de ces bourgeons ou sporoblastes. Les spores
mûres ont la structure ordinaire: leur paroi est épaisse, et elles con-
tiennent quatre corpuscules falciformes avec un noyau interne, ce que
nous avons déjà vu plusieurs fois. Ces corpuscules ont déjà la consti-
tution H'une véritable petite Psorospermie, et il est probable que c'est
(1) Voit àans les Archives de Zoologie expérimentale, t. XI, 1883, p. "7, le nouveau
travail de M. Schneider ?ur la sporulation du Klossia octopiana.
102 LES SPOROZOAIRES.
par une transformation simple qu'ils passent à l'état de Psorospermie
adulte.
Signalons , à propos de cette espèce , une petite erreur dans les
planches qui accompagnent le travail d'Aimé Schneider. L'autour
décrit les spores comme contenant quatre corpuscules falciformes, et
dans la planche relative à la Psorospermie qui nous occupe on voit
une figure dans laquelle une spore contient sept corpuscules. Il paraît,
d'ailleurs, que les planches ont été dessinées avant que le texte et.
probablement , les observations ne fussent achevées , c'est ce qui
explique ces quelques petites divergences.
Telle est l'histoire de tous les genres de Coccidies qui sont connus
jusqu'ici. Pour terminer ce chapitre, il me reste à signaler l'extrême
ressemblance que ces corpuscules présentent dans leur développe-
ment avec les Grégarines proprement dites. On peut les considérer
comme des Grégarines différant des autres par quelques traits particu-
liers qui sont au nombre de quatre. C'est ainsi qu'elles ne mènent
jaiJiais la vie hbre pendant la période d'accroissement ; elles vivent
dans l'intérieur des cellules; leur enkystement est toujours solitaire et
n'est jamais précédé d'une conjugaison. Cet enkystement sohtaire a,
d'ailleurs, été signalé aussi chez quelques Grégarines véritables , mais
il est de règle chez les Psorospermies oviformes. Enfin, elles sont
toujours dénuées de mouvement, immobiles à toutes les phases de leur
existence. Il n'y a de mouvement que quand le contenu du kyste se
transforme en corpuscules falciformes et chez les corpuscules falciformes
eux-mêmes, tandis que certaines Grégarines sont excessivement actives.
Ajoutons que, chez ces dernières, il se produit toujours des spores très
nombreuses dans l'intérieur du kyste, tandis que chez les Psorosper-
mies oviformes nous n'avons trouvé que le seul genre Klossia chez
lequel il se forme des spores en grand nombre. Dans tous les autres, les
spores sont en petit nombre, ou même il n'en existe qu'une seule. Les
Klossia étabhssent donc une transition entre le groupe des Coccidies
et celui des Grégarines . On peut , en effet , considérer les Coccidies
LES COCCIDIES. |03
comme des Grégarines modifiées par un parasitisme plus étroit ; telles
sont plus dégradées par leur habitat et par leur existence parasitique
portée aussi loin que possible, puisqu'elles vivent, non seulement dans
les organes de leur hôte, mais dans les cellules mêmes , c'est-à-dire
dans les parties élémentaires des tissus anatomiques.
De plus , par la découverte des corpuscules falciformes chez les
Grégarines, Aimé Schneider a évidemment fondé sur une base solide
la relation des Grégarines et des Coccidies , relation établie par la
formation d'un kyste qui a la même constitution dans les deux groupes
et donne toujours pour termes ultimes les corpuscules falciformes et
le noyau de reliquat. On peut donc dire justement qu'Aimé Schneider
a rendu un véritable service à la science par ses remarquables tra-
vaux sur les Grégarines et les Psorospermies oviforraes ou Coccidies.
Nous devons revenir sur la structure des spores du Coccidium
oviforme^ Psorospermie parasite du foie du Lapin, dont nous avons
parlé dans la dernière leçon. Depuis le mémoire de Stieda qui, le pre-
mier, en 1865, a décrit le mode de formation des spores dans les kystes,
on admettait, avec cet auteur, que chaque spore de cette Goccidie ne
renfermait qu'un seul corpuscule falciforme , ayant l'aspect d'un
bâtonnet recourbé, rentlé en boule aux extrémités, plus étroit à la
partie moyenne, embrassant dans sa concavité le noyau de reliquat.
Leuckart a confirmé, dans la deuxième édition de son livre sur les
Parasites de l'homme, l'observation de Stieda. Cependant, par sa
forme, ce corpuscule falciforme diffère de ceux des autres Psorosper-
mies qui sont terminés en pointe, et, dans tous les cas, ne présentent
pas de renflement en boule aux deux extrémités.
Cette forme du corpuscule , supposé unique , chez le Coccidium
oviforme, cette différence avec les éléments analogues chez les autres
Psorospermies n'ont pas laissé que de m'étonner et j'ai résolu d'étu-
dier de plus près la structure de ces corpuscules ; c'est ce que j'ai fai*.
tout récemment.
Pour observer ces corpuscules avec de forts grossissements, j'ai
comprimé les kystes, et ceux-ci, brisés, ont laissé échapper leurs quatre
104
LES SPOROZOAIRES.
spores. Par la pression, le corpuscule de chacune de ces spores s'est
dédoublé en deux bâtonnets qui, dans leur position naturelle, sont
accolés l'un contre l'autre, dans une position inverse, tête-bêche
(fig. 27, m, n, o). Chacun de ces bâtonnets est recourbé, renflé à une
de ses extrémités qui est homogène et réfringente, pointu à l'autre
extrémité qui est plus granuleuse. Suivant les hasards de l'opération
ces deux bâtonnets prennent, à la suite de la compression, des positions
diverses, mais à l'état naturel, ils sont toujours étroitement appliqués
l'un contre l'autre, dans une situation inverse, de manière à figurer un
seul corpuscule renflé aux deux extrémités (m).
Fig. 27. — Coccidium ovifortne du foie du Lapin (d'après Balbiani).
a, b, c, jeunes Coccidies renfermées dans les cellules épithéliales des canalicules hépatiques;
a, noyau de la cellule épithéliale ; — d, e, f, Coccidies adultes enkystées \ — g - 1, déve-
loppement des spores ; — m, spore mûre isolée, très grossie, montrant les deux corpuscules
falciformes dans leur position naturelle avec le nucléus de reliquat ; — n, spore comprimée
avec les deux corpuscules écartés l'un de l'autre ; — o, un corpuscule falciforme ; y, son
noyau.
Il résulte de cette observation nouvelle que les corpuscules falcifor-
mes dans la Coccidie du Lapin sont constitués comme chez les autres
espèces. J'ai aussi, à l'aide de très forts grossissements, voulu me
rendre compte de leur structure intime, et j'ai pu constater leur
analogie avec ce que les mêmes éléments présentent chez certaines
LES COCCIDIES. -105
espèces. Ainsi, ils possèdent un noyau, fig. 27 o,y, placé un peu au-des-
sous de la partie renflée homogène, réfringente. Ce noyau est muni
d'un petit nucléole dont la présence est très difficile à constater. On
peut cependant y parvenir à l'aide de l'acide osmique et du picrocar-
minate qu'on laisse agir pendant quarante-huit heures, parce que la
membrane de la spore jouit d'une grande imperméabilité. Chacun de
ces bâtonnets présente donc la structure typique que nous avons
reconnue chez les Psorospermies.
Ainsi, le nombre des corpuscules falciformes est de deux au lieu
d'un. Il faut donc corriger sur ce point la caractéristique qu'Aimé
Schneider donne au genre Coccidium, laquelle reste la même pour
tout le reste : c'est-à-dire que ce genre présente quatre spores conte-
nant chacune deux corpuscules falciformes.
406 LES SPOROZOAIRES.
III
LES FSOROSPERMIES UTRICULIFORMES
ou SARGOSPORIDIES.
I
Les Psorospermies utriculiformes que l'on désigne souvent sous le
nom (le tuhes de Miescher ou de Rainey, nous sont encore très peu
connues , bien qu'elles soient très fréquentes , par exemple , chez le
Bœuf, le Mouton , le Porc et autres Mammifères, même à l'état sau-
vage. C'est chez la Souris qu'elles ont été trouvées pour la première
fois par F. Miescher, professeur à Bàle, en 1843 [Mèwi. de la Soc.
d'hist. naturelle de Bâlel. C'est dans les muscles qu'il les a rencon-
trées , et, en effet, ces Psorospermies sont toujours des parasites des
muscles , et exclusivement des muscles striés. Il a observé des tubes
allongés mesurant quelquefois 1, 2 et 3 millimètres de longueur,
dirigés dans le sens des fibres , revêtus d'une paroi membraneuse ,
mince, avec un contenu particulier, composé de petits corps globuleux
ou ovalaires , remplissant la cavité du tube , en quantités innom-
brables. — (Ce mémoire se trouve dans le recueil, assez rare, que
nous avons cité plus haut , mais les figures originales sont repro-
duites dans une note que von Siebold a publiée dans le tome V du
Zeitschr. f. loiss. Zool. avec une analyse et explication des figures).
En présence de ces tubes, Miescher ne supposait pas avoir affaire à
un parasite, ou, du moins, il les expliquait par une altération patholo-
gique des fibres musculaires. Il croyait que le sarcoiemme , au lieu de
LES SARCOSPORIDIES.
407
se remplir de fibrilles, se remplissait de ces tubes, et que c'était
le sarcolemme lui même transformé ; mais cela n'excluait pas non plus
l'idée que ce pût être des parasites. Siebold s'est rangé à cette dernière
manière do voir quand il a retrouvé ces mêmes tubes, et les a consi-
dérés comme des parasites végétaux, des entophytes, de la famille des
FiG. 2. — Tubes psorospermiques des muscles de la Souris
{ figure de Miescher, reproduite d'après Siebold.)
Mucédinées. A cette époque, de 1840 à 1850, il caractérisait comme
animal tout organisme doué de mouvement, et comme végétal tout ce
qui était immobile; c'est pour cette raison qu'il classa ces tubes parmi
les végétaux. On sait aujourd'hui que ce schéma doit être écarté, carie
mouvement n'est plus regardé comme un caractère de l'animalité.
'lOg LES SPOROZOAIRES.
Puis, vintHessling qui observa dans le muscle du cœur du bœuf, du
mouton, du chevreuil, des productions semblables {Zeitschrift F. wiss.
ZooL, t. V, 1854). Il les décrivit comme des masses allongées,
situées dans l'épaisseur des fibres musculaires, masses présentant aussi
un contenu et une membrane formant une utricule élastique, épaisse,
homogène. Le contenu serait divisé en boules, masses ou parties sphéri-
ques, formées de corpuscules analogues à ceux que Miescher avait vus
dans les tubes psorospermiques de la Souris. Hessling compare ce
contenu aux spores de certains Champignons et croit avoir vu ces
corps se multiplier par division, car il en a observé qui présentaient
une strie transversale qu'il considéra comme une trace de division.
Ces mêmes productions ont été vues ensuite par un grand nombre
d'auteurs chez beaucoup d'animaux, mais toujours chez des Mammi-
fères et dans les muscles striés. Je citerai pour mémoire les observa-
tions de Leisering et Winckler,de Dammann sur les Psorosperraies
utriculiformes du Mouton ; mais nous reviendrons sur ces travaux.
Puis, ceux de Pagenstecher sur les mêmes tubes trouvés chez un Bouc ;
de Virchow, chez le Porc ; de Ratzel, chez le Singe ; enfin l'observation
du D'' Huet sur les Psorospermies d'un Otarie mort , il y a quelques
jours, au Muséum d'Histoire naturelle de Paris, et chez lequel il n'y a
pas un seul faisceau primitif des muscles qui ne renferme de ces tubes.
{Bull, de la Soc. de Biologie, 1882). Mais, jusqu'ici, on ne les a pas
trouvés chez l'Homme, tandis que nous savons que l'Homme peut être
atteint de Psorospermies oviformes.
La description la plus complète que je connaisse de ces productions
est due à Manz et à Leuckart. Les observations de Manz {A)'ch. f. rtiiky\
Anat., t. ni, 1867) sont relatives aux Psorospermies du Porc, animal
dont les tissus sont un véritable musée d'organismes parasitaires de
toutes sortes. Chez le Porc, ces masses psorospermiques se sont pré-
sentées à Manz sous la forme vue par Hessling, c'est-à-dire de
corps plus ou moins allongés, suivant que le muscle est contracté ou
étendu. La paroi est formée par une cuticule très épaisse, surtout
aux extrémités , traversée par des lignes radiaires très nombreuses
LES SARCOSPORIDIES. 409
el serrées , que Manz interprêtait volontiers comme des cils ou
comme des fissures très fines produites dans cette cuticule épaisse.
Ce sont des canalicules poreux. C'est la manière de voir de Leuckart.
Mais d'autres auteurs , Rivolta , Rainey , les ont décrits comme
des cils vibratiles. Cette cuticule épaisse se désagrège facilement ,
se rompt en petits bâtonnets. C'est pourquoi ces masses psorosper-
miques sont peu maniables : quand on veut les enlever, la cuticule
se brise. On ne peut les isoler que quand elles sont jeunes, alors
que la cuticule présente plus de résistance. Le contenu est formé
FiG. 29. — Tube psorospermique du diaphragme du Porc , donl l'enveloppe
est rompue sur un point. On voit à côté quelques-uns des corpuscules qui en
forment le contenu (d'après Manz.)
par des corps de toutes formes , globuleux , ovalaires , en croissant
ou réniformes, dans les tubes que Manz considère comme adultes. Dans
les jeunes, qui ont un millimètre de longueur et moins, ce sont des
globules ou vésicules qu'il compare à des leucocytes avec noyau. 11
suppose que c'est dans ces vésicules que s'organisent les corpuscules
réniformes, puis que la petite membrane d'enveloppe se détruit. U croit
410
LES SPOROZOAIRES,
aussi, comme Hessling, que ces corpuscules peuvent se multiplier par
division. Us ne sont pas répandus uniformément dans la cavité du tube,
mais forment des masses sphériques qui deviennent polyédriques par
compression. Quelques auteurs ont même supposé que ces masses
arrondies sont contenues dans des loges fermées , cloisonnées. Ainsi
pense Ratzel pour les Psorospermies du Singe qu'il a observées, et chez
lesquelles il y avait des tubes qui mesuraient de deux à trois millimètres
de longueur, sur 0'"'",20 de largeur. Les corpuscules ne dépassent
guère 4 à 6 [X.
FiG. 30. — Psorospermies des muscles du Porc : A, vues à un grossissement de 40
diamètres; B, fibre musculaire isolée contenant un tube psorospermique, grossie 100 fois.
C corpuscules formant le contenu des tubes (d'après Leuckart).
Chez l'Otarie étudié par le D'' Huet, les tubes avaient de un à quatre
millimètres de long, sur 20 à 30 [x de large. Il y en avait aussi déplus
courts. Us se prolongeaient dans l'intérieur des faisceaux primitifs, sous
le sarcolemme, dans l'épaisseur du faisceau,quelquefois se rapprochant
du sarcolemme. Les corpuscules, étudiés par le D"" Huet avec un objec-
tif à immersion , sont décrits comme ayant la forme d'un croissant.
LES SARCOSPORIDIES.
H4
Sur un fragment de muscle conservé dans l'alcool et qui m'a été remis
par M. Mégnin, je n'ai observé que des corpuscules naviculaires très
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FiG. 31. — Psorospcrmies ulriculiforraes de l'Otarie {Otaria Californiana)
(d'après Balbiani).
1 , Fragment de muscle strié montrant les Psorospermies dans les faisceaux musculaires ; —
2, faisceau primitif plus grossi occupé par une Psorospermie ; — 3 , groupe de masses
arrondies contenant les corpuscules ; — 4, corpuscules isolés : a, non mûrs; 6, corpus-
cules mûrs.
petits, libres dans la cavité du tube ou agglomérés en masses arron-
dies (Fig. 30, a, h). Nous n'avons ici rien qui ressemble à la cuticule
épaisse avec canaux poreux dont nous avons parlé plus haut à propos
H2 LES SPOROZOAIRES.
de la Psorospermie utriculiforme du Porc. Ces tubes rappellent plutôt
ceux de la Souris. La cavité du tube n'est pas divisée en masses ou
portions arrondies et les corpuscules la remplissent complètement et
d'une façon uniforme.
Telles sont les connaissances que nous possédons jusqu'à présent sur
ces parasites. On a cherché à interpréter la signification de ces diffé-
rentes parties. C'est ainsi que Leuckart a voulu comparer ces boules
ou masses distinctes qui remplissent les tubes de la Psorospermie du
Porc à des spores, et les corpuscules rèniformes qu'elles renferment
aux corpuscules falciformes des Grégarines et des Coccidies. Je ne sais
pas si cette comparaison est juste, mais pour les spores , il faudrait
qu'elles fussent entourées d'une membrane, et personne n'a signalé
l'existence de cette membrane. Par conséquent, il convient d'attendre
de nouvelles recherches pour étabhr le bien fondé de cette compa-
raison.
Nous avons vu que le siège, pour ainsi dire exclusif de ces produc-
tions est les muscles striés volontaires, et même les muscles striés invo-
lontaires, comme ceux de l'œsophage dans sa partie supérieure. On les
a trouvées dans l'œsophage du Moulon, dans certaines tumeurs formées
sur l'œsophage du Cheval (Siedamgrotzki, 1872). 11 arrive même quel-
quefois que tous les muscles en sont tellement farcis qu'on n'enlève pas
la plus petite partie de substance musculaire, — et c'est le cas de cet
Otarie aont nous avons parlé, — sans y rencontrer des tubes psoros-
permiques. Mais les muscles de prédilection sont ceux qui sont voisins
du canal digestif, le psoas, le diaphragme, la langue, et même l'œil. Il
est probable que le tube digestif est le point de départ de l'infection.
Les parasites pénètrent par les voies digestives et émigrent dans les
muscles voisins, comme les Trichines. C'est en raison de ce siège
exclusif que je propose de les désigner sous un nom plus significatif
que « tubes de Miescher », ou « Psorospermies utriculiformes », plus
conforme à nos habitudes scientifiques, le nom de Sarcosporidies,
correspondant aux Coccidies de Leuckart, aux Myxosporidies de
Biitschli, et qui rappelle leur caractère le plus constant.
LES SARCOSPORIDIES. U2
Quand il s'agit de l'histoire des parasites, il est toujours une question
très intéressante qui se présente des premières : quel est le mode de
transmission de ce parasite ? — Il est probable qu'il se transmet par
le canal alimentaire, mais jusqu'ici les expériences directes manquent
complètement. Manz a fait avaler à des animaux de la chair infestée
de Psorospermies utriculiformes, mais quand il chercha à retrouver les
parasites chez ces animaux, il n'en aperçut aucune trace dans les parois
de l'intestin et dans les muscles.
A propos de leur histoire pathologique, on peut se demander si ces
Psorospermies déterminent des troubles graves quand elles existent en
grande quantité. Est-il une maladie spéciale qui soit due à leur présence
dans les muscles? — Virchow a publié dans son Archiv, t. 37, 1866, un
travail sur ce sujet. Il a pris des renseignements sur l'état de santé des
animaux dans les muscles desquels il avait trouvé un grand nombre de
ces parasites, Porc, Mouton, etc., renseignements qui lui ont appris que
certains symptômes graves s'étaient montrés pendant la vie chez ces
animaux. Ceux-ci éprouvaient, au moins pendant les derniers temps,
une soif ardente, de l'anorexie, une température élevée, des taches ou
des nodosités avaient apparu sur les téguments ; ils montraient souvent
de la gêne dans la marche et une paralysie partielle du train posté-
rieur.
Chez l'Homme ou chez l'animal qui mange cette chair infestée ,
peut-il se produire des effets nuisibles? Nous n'en savons rien. L'expé-
rience de Manz n'est pas probante; il faudrait faire de nouvelles
recherches. Mais il est évident que, pour exercer des effets nuisibles,
il faudrait que cette viande infestée fût consommée crue ou cuite seule-
ment en dehors, comme certains jambons. Ratzel a vu que le Singe
chez lequel il a observé des Psorospermies était, depuis plusieurs
semaines , souffrant et presque paralysé , et , en effet , les parasites
étaient très nombreux dans tous les muscles.
On a observé aussi de véritables épizooties causées par ces parasites,
surtout sur des troupeaux de moutons. (Leisering et Winckler, Ayxh. de
Virchow, 1866). A Marienwerder, en Prusse, les Moutons mouraient
Aii LES SPOROZOAIRES.
subitement avec de nombreuses tumeurs sur l'œsophage, tumeurs jau-
nâtres, du volume d'un pois à celui d'une noisette, situées surtout dans
la paroi musculaire de l'œsophage, proéminant dans le tissu conjonctif
entourant ce conduit. Ces tumeurs contenaient toutes un liquide plus ou
moins dense, ayant l'aspect du pus ou du lait et contenant une immense
quantité de ces corpuscules que nous connaissons. D'autres fois, les
tumeurs étaient moins ramolUes et formées par une substance dense,
présentant alors l'aspect des tubes psorospermiques serrés les uns
contre les autres, de telle sorte que la substance musculaire avait
presque entièrement disparu .
Dammann, chez le Mouton (Virchow^s Archw, t. 41, 1867), les a trou-
vées en très grand nombre rassemblées dans le pharynx , le larynx ,
l'œsophage, où elles déterminaient une irritation vive, de l'œdème de la
glotte, jusqu'à l'asphyxie. Elles existaient même dans le diaphragme,
les muscles intercostaux et abdominaux que l'on trouvait remplis de
tubes ou de corpuscules libres.
Le résultat de ces faits et d'autres analogues est que les Sarcospo-
ridies peuvent occasionner des accidents mortels, comme les Cocci-
dies oviformes du Lapin, mais ce que nous connaissons le moins, c'est
leur mode de transmission d'un individu à un autre. Que cette trans-
mission se fasse par les voies alimentaires, cela ne paraît pas douteux,
mais est-ce par spores libres, en nature, répandues dans l'air respiré
ou dans l'eau des boissons ? est-ce par l'ingestion de viandes qui en
contiennent ? — On a trouvé les Sarcosporidies chez des carnivores,
mais sauf l'Otarie, c'est toujours chez les herbivores ou les omnivores
qu'on les a signalées. Toutes ces questions sont loin, comme on le voit,
d'être élucidées.
Enfin, une dernière question qui se présente est celle qui concerne
leur place dans la classification méthodique. Ces parasites sont-ils des
Sporozoaires ? — C'est l'opinion de la plupart des auteurs et celle de
Leuckart. En fait, il est difficile de les classer ailleurs. Siebold et
quelques autres auteurs en faisaient des végétaux ; mais , à cette
époque, on les connaissait encore moins qu'aujourd'hui, et nous avons
LES SARCOSPORIDIES. mZ
VU, d'ailleurs, sur quel critérium on se fondait pour faire un végétal
de ces organismes.
Je crois que leurs affinités les plus prochaines sont avec les Sporo-
zoaireS; et particulièrement en raison de la forme de ces corps qu'on
doit regarder comme reproducteurs, corps réniformes ou fusiformes
qui rappellent les corps falciformes des Grégarines et des Coccidies.
Ils se rapprochent encore des Coccidies, habitants intracellulaires des
épithéliums, par leur siège exclusif, l'intérieur des cellules musculaires.
Mais ces tubes ainsi formés et remplis do corpuscules propagateurs ne
représentent que l'état de reproduction de ces êtres , il doit exister un
état antérieur, représentant l'état de végétation ou d'accroissement,
comme il en existe un chez les Grégarines et les Coccidies. On possède,
en effet, quelques observations tendant à démontrer que ces tubes ont
une phase antérieure.
11 s'agit des observations faites avec beaucoup de soin par Hessling
sur les Psorospermies utriculiformes du cœur du Bœuf, du Mouton
et du Chevreuil. Il a vu de petits amas arrondis ou ovalaires, exclusi-
vement formés par un plasma finement granuleux, sans enveloppe
ni noyau. Puis, ces amas ont grossi, revêtu une membrane d'enve-
loppe, et il a apparu dans leur intérieur des globules pâles. Ces glo-
bules, d'après Manz, sont des spores naissantes. Ces détails rappel-
lent la manière dont les spores se forment dans certaines Coccidies.
Ces spores prendraient plus tard la forme d'un croissant ou d'un rein.
On est donc en droit de faire un rapprochement entre ces tubes sarcos-
poridiques et les Psorospermies utriculiformes. Nous verrons du reste,
en étudiant les autres Psorospermies, que chez ces dernières, celles
des Poissons et des Insectes, le mode de développement serait analogue
à celui que nous venons de décrire.
4<6 LES SPOROZOAIRES.
II
Si les Psorospermies utriculiformes dont nous venons de parler
n'ont avec les autres Sporozoaires que des affinités incertaines, bien
moins certaines encore sont les relatioas qu'ont avec ces organismes
les produits parasiLiques dont j'ai maintenant à vous entretenir
et dont je ne trouve pas à fixer ailleurs la position. C'est donc, pour
ainsi dire, en appendice à ce que nous avons dit précédemment que je
vais les décrire.
Ce n'est pas à l'intérieur des organes, dans les fibres musculaires
striées, qu'ont été rencontrés les tubes parasitaires dont je veux vous
parler maintenant , mais fixés sur les pattes , sur les branchies des
larves d'Insectes aquatiques , Phryganes , Libellules , et certains
Crustacés , le Gammarus pulex^ VAsellus aquaiicus, etc.
Il s'agit de tubes droits ou, quelquefois, plus ou moins recourbés, que
l'on trouve fixés par une extrémité sur les pattes d'un Insecte aquatique
ou d'un Crustacé, Ces organismes vivent libres dans l'eau , l'animal ne
leur fournit qu'un support. Ils ont été observés d'abord par Lieberkiihn
{Archiv de Miiller, 1856), puis par Lachmann {Verhandl. d. naturh.
Ver. preuss. Rheinl. 16. Jahrg. 1859) par Schenk [Wûrzh. Verhandl.
1859); enfin, par Cienkowski [Botan. Zeitung, 1859) qui en a donné
la description la plus complète et la plus exacte.
Sous la forme que j'estime la plus jeune, ce sont des tubes hyalins
formés par une membrane très mince dans laquelle est un contenu
granuleux avec plusieurs noyaux disséminés. La longueur des tubes
peut atteindre un demi-millimètre (fig. 32, a). A côté de ceux-ci , il en
est d'autres qui présentent un stade plus avancé. Le contenu est
représenté par des corps fusiformes disposés en une ou plusieurs
rangées en spirale, comme tournant dans l'intérieur du tube [b, d).
Mis en liberté par la destruction de la paroi , ils se fixent sur l'animal
LES SARCOSPORIDIES.
U7
OU sur un autre , subissent de nouvelles transformations et se rem-
plissent à leur tour de corps fusiformes qui passent par les mêmes
phases.
Pendant tout le printemps, en été et en automne, la reproduction
de ces organismes se fait par des corps amiboïdes résultant du fraction-
nement du contenu des tubes autour de chaque noyau, et mis en liberté
FiG. 32. — Amœbidium parasiticum,
(d'après Cienkowski).
FiG. 3{f — Amœbidium parasiticum.
— Zoospores libres et enkystées
(Cienkowski).
FiG. 34.— Amœbidium parasiticum.
— Spores enkystées en voie de
segmentation (Cienkowski).
FiG. 35 — Jeunes Amœbidium
libres (Cienkowski),
par une ouverture dans le tube, soit à une extrémité, soit sur sa
longueur (e). C'est ce que Cienkowski regarde comme des zoospores qui
ressemblent à VAmoeba diffiuens d'Ehrenberg. Ils sont caractérisés
448 LES SPOROZO AIRES.
par leurs larges expansions pseudopodiques et par la fluidité de leur
plasma (fig. 33, z). Cependant, Cienkowski a vu que ces spores n'ab-
sorbent pas les grains de carmin dont les Amibes ordinaires sont
avides. Quand elles se sont mues pendant quelques heures , elles
deviennent immobiles , grossissent , et leur contenu se segmente en
corps fusiformes plus ou moins analogues à ceux qui ont été engendrés
dans les tubes pendant la première période de l'année (fig. 34).
Quelques corps amiboïdes, au lieu d'engendrer directement des corps
fusiformes, passent à un état de repos, s'enkystent et restent immobiles
pendant quelque temps (fig. 33, s) ; enfin, leur contenu s'organise aussi
en corps fusiformes.
Ajoutons que dans ces tubes, comme dans les Psorospermies utricu-
liforraes que je vous ai décrites antérieurement, on a signalé de nom-
breuses gouttelettes graisseuses mêlées aux corpuscules fusiformes.
Quelle est la nature de ces organismes? — Je vous ai dit que je ne
croyais pas pouvoir les mieux placer qu'à la suite des Sarcosporidies ,
et c'est là, en efi"et, que les rangent, depuis Lieberkiihn, la plupart des
auteurs. Toutefois, Cienkowski, qui est botaniste, en a fait des végétaux
dont il a cherché les affinités parmi les Champignons. Il a désigné l'un
d'eux sous le nom à'Amœbidium parasiticum. Il est, en effet, plus
facile de les nommer que de les classer ; cependant, je crois que si
on les découvrait maintenant , on serait moins embarrassé pour trou-
ver leur place dans la classification, surtout en raison de la production
de ces corps fusiformes ou falciformes.
Mais, si cette présomption est fondée, si l'on doit considérer les
Amœbidium comme des Psorospermies utriculiformes ou Sarcospo-
ridies, je pense qu'il faut en faire une section à part, à côté de ces
habitants des muscles. Ils s'en distinguent, en efi'et, par plusieurs points.
Ils vivent à l'extérieur ; et même sont-ce de véritables parasites ? Je
crois que ce nom ne leur convient guère et qu'ils n'empruntent rien à
l'hôte qui ne leur fournit qu'un point d'appui, les transporte à travers
le monde ambiant et favorise ainsi l'accomplissement des phénomènes
de leur vie. Ce sont donc plutôt des commensaux que des parasites.
LES SARCSOPORIDIES. 419
Nous savons, d'ailleurs, que ces faits de commensalisme de deux êtres
qui s'associent pour se prêter une aide réciproque ne sont pas rares
parmi les Protozoaires ; nous en avons vu des exemples chez les Ciliés,
comme les Epistylis anastaiica, E. branchiophïla, qui vivent sur les
larves de Phryganides et de Crustacés; comme le Zoothamnium Aselli
sur VAsellus aquaiicus ; comme YOpercularia herherina sur les
Insectes aquatiques. Chez les Flagellés , nous trouvons des faits du
même genre : le Chlorangium slentorinum vit sur les Stentors, le
Colacium calvum sur les Daphnies. Il en est de même pour les
Acinétiens : le Dendrocomeles paradoxus vit en compagnie du Spi-
rochona gemmipara sur les branchies des Crevettines, etc.
D'ailleurs, il est probable qu'avant de devenir des parasites internes,
les Psorospermies ont commencé par vivre à la surface de leur hôte .
Ainsi, nous avons vu le Klossia octopiana vivre dans les orga-
nes, mais aussi au dehors, dans la peau du Poulpe. On rencontre des
faits analogues chez les Psorospermies des Poissons et des Insectes ;
on les trouve au dedans et k la surface de la peau , des branchies, et
aussi dans le foie, la rate, le rein, le cœur. Les Myxosporidies présen-
tent même cet avantage qu'on a pu suivre sur elles les dégradations
organiques qu'entraînent les conditions diverses de leur existence,
l'ectoparasitisme et l'endoparasitisme. Ces êtres, en effet, sont d'autant
plus compHqués que leur vie se passe au dehors, en contact avec l'air
libre ; d'autant plus simples, au contraire, qu'ils vivent plus complète-
ment dans la profondeur des organes.
<20 LES SPOROZO AIRES.
IV
LES PSOROSPERMIES DES POISSONS
ou MYXOSPORIDIES.
I
Pour suivre, comme nous le faisons d'habitude , l'ordre historique
du développement de nos connaissances sur ces organismes , il nous
faut remonter à l'année 1838, époque à laquelle un observateur belge,
Gluge , professeur à l'université de Bruxelles , décrivit une maladie
cutanée chez l'Epinoche. Gluge publia un petit mémoire sur ce sujet
dans les Bulletins de l'Académie des Sciences de Belgique (t. V,
1838). Sur l'épiderme des Epinoches , cette maladie produit des
petites tumeurs pustuleuses, sphériques, plus ou moins nombreuses,
blanchâtres, dont le volume varie depuis celui d'une tête d'épingle
jusqu'à la grosseur d'un pois, adhérentes à la peau. Leur siège est
variable aussi ; on les trouve sur le dos , le ventre , à l'angle de la
mâchoire, sur la nageoire caudale. Quand on les pique , il en sort un
liquide blanchâtre comme du lait , visqueux , coagulable par l'alcool ,
renfermé dans une membrane qui double intérieurement la petite
vésicule formée par les tissus du Poisson. C'est donc un véritable
kyste à membrane propre, lisse et transparente. Au microscope, Gluge
reconnut dans le liquide une infinie quantité de corpuscules ovalaires.
LES MYXOSPORIDIES. ^2^
Il n'entre d'ailleurs dans aucun détail à leur sujet , mais signale seule-
ment la résistance qu'ils présentent aux réactifs chimiques , comme
l'alcool, la potasse caustique , les acides minéraux concentrés , comme
l'acide sulfurique. Il pensa que ces corpuscules étaient des cristaux
analogues à ceux qui donnent aux téguments des Poissons leur couleur
métallique et irisée, et qui se trouvent dans la profondeur de la peau
sous forme de plaques ou de plaquettes cristaJloïdes à aspect argentin.
La composition chimique de ces plaques est, du reste, mal connue ; on
xes suppose formées de phosphate de chaux ou de magnésie combiné
à une matière organique, probablement la guanine.
Cette observation de Gluge passa inaperçue. C'est Jean Miiller
qui, le premier, appela d'une manière particulière l'attention sur ces
productions. En 1841 , dans son Archiv, il décrivit, chez diverses
espèces de Poissons d'eau douce, une maladie cutanée, sorte d'exan-
thème vésiculeux affectant la peau de différentes parties du corps , la
muqueuse de la voûte palatine et divers autres points. Chez un jeune
Brochet, il trouva pour la première fois ces petites tumeurs arrondies
dans l'épaisseur des muscles de l'œil et de la sclérotique ; elles mesu-
raient depuis un cinquième de ligne à une demi-Jigne. Ces tumeurs
contenaient une matière blanchâtre sous forme d'un liquide plus ou
moins visqueux. Cette matière était presque entièrement composée de
granulations moléculaires mêlées à une quantité innombrable de petits
corpuscules que Miiller compara à des spermatozoïdes, présentant une
tête allongée et une longue queue. Ils étaient formés d'une enveloppe
résistante et ne dépassaient guère le volume d'un corpuscule sanguin
du Brochet. Le corps de ces petits éléments était formé par la mem-
brane qui paraissait continue sur toute la surface et présentait un
aplatissement sur les côtés , ce qui en faisait , vu de profil , un corps
lenticulaire aplati , avec une sorte de bordure mince tout autour
Miiller a vu , en outre , qu'à l'opposé de la partie caudale existent
deux vésicules géminées, convergeant par leur extrémité antérieure
vers le pôle supérieur du corpuscule , où elles paraissent fixées à un
petit bouton, et divergeant par leur extrémité postérieure. La cavité
122 LES SPOROZOAIRES.
du corps paraît remplie d'une substance gélatineuse homogène avec
quelques rares granulations. 1 a queue , qu'il comparait à celle d'un
spermatozoïde , est immobile et va en s'amincissant vers l'extrémité ;
elle a trois ou quatre fois la longueur du corps, et, dans certains cas,
est fourchue, soit à l'extrémité seulement, soit dans une partie plus ou
moins grande de sa longueur. Mis au contact de l'eau, ces petits corps
se conservent pendant un temps très long.
Pour rappeler à la fois la forme de ces corpuscules ressemblant à
des spermatozoïdes et, en même temps, la maladie cutanée dont ils
paraissent devoir être la cause , J. Mûller leur a donné le nom de
Psorospcrniie.«i, de t|;w:a, gale, et de «r-spaa, semence. Il poursuivit
ses études , examina d'autres espèces de Poissons et retrouva chez
beaucoup d'entre elles des petits corps analogues , mais dont la forme
était différente. Ainsi, chez le Lucioperca Sandra, chez le Cyprinus
ruiilus , le Perça fiuviatilis, il trouva des corpuscules semblables,
mais dépouvus de queue, et dont l'organisation, dans ses traits princi-
paux, était identique à celle des corpuscules du Brochet ; c'est-à-dire
qu'ils présentaient un corps plus ou moins ovalaire , arrondi ou
allongé , av^ec des vésicules géminées plus ou moins grosses et rap-
prochées.
Plus tard encore, il trouva des kystes cutanés analogues, contenant
des Psorospermies , dans la vessie natatoire d'un Poisson de mer, la
Merluche, {Gadus merluccius). Le pêcheur de qui il tenait ce dernier
Poisson , lui apprit que la maladie cutanée dont il était affecté était
très fréquente chez les Merluches qu'elle rendait impropres à être
livrées à la consommation. Existait-il une relation entre le mauvais
état du Poisson et la maladie dont il était atteint.? C'est une question
que nous examinerons plus tard. Pour moi, je ne fais pas un doute que
la maigreur extrême de celui de Millier ne fût due aux Psorospermies,
et nous verrons, en effet, que souvent le corps des Poissons est
absolument farci de ces parasites.
Quant au développement de ces corps , J. Millier n'a presque rien
observé. Il a vu des Psorospermies dans lesquelles les vésicules
LES MYXOSPORIDEES. <23
géminées étaient libres dans la cavité du corpuscule ; d'autres fois ,
deux corpuscules étaient placés parallèlement l'un à l'autre dans une
même enveloppe et se touchaient par leur face latérale. J. MûUer crut
que ces dispositions résultaient d'une transformation des vésicules
géminées et que ces organismes se multipliaient par une sorte de
génération endogène.
Tous ces faits sont parfaitement exacts , mais leur interprétation
n'est pas toujours juste. D'ailleurs, Jean MùUer rencontra des corpus-
cules psorospermiques dans les Poissons des provenances les plus
diverses, de l'Inde, de l'Amérique, des différentes contrées de
l'Europe : les pièces des collections ichthylogiques de Berlin , conser-
vées dans l'alcool , furent examinées par lui , et un grand nombre
présentaient de ces tumeurs qui jusqu'alors avaient échappé à l'atten
tion des naturalistes.
De 1842 à 1845 , Greplin , en Allemagne, et Dujardin , en France,
observèrent ces Psorospermies. Dujardin en parle dans l'Appendice
de son Histoire naturelle des Helminthes, et a fait même une obser-
vation très remarquable. Il dit avoir vu ces Psorospermies , non pas
libres, comme Mûller les avait toujours décrites, mais renfermées dans
une « substance glutineuse, diaphane, analogue à celle des Amibes : »
observation extrêmement juste. Dujardin avait, d'ailleurs, une habileté
et un tact merveilleux pour reconnaître les Protozoaires. Il a reconnu
que ces corpuscules prenaient naissance dans un sarcode et que, par
conséquent , les Psorospermies de Miiller devaient être considérées
non pas comme une forme définitive, une entité organique, mais comme
la production de « ces végétations ramifiées de sarcode » qu'il avait
rencontrées à la surface du corps des Poissons, notamment sur
le Leuciscus erythrophthalmus ; que c'était une production animale
distincte qu'il compare aux corpuscules grégarinaires, aux pseudona-
vicelles, par exemple, des kystes du Lombric. Mais, il ne poursuivit
pas cette observation et ce que nous en savons se réduit à ce que je
viens de dire.
Leydig, en 1851 (MûUer's Archiv), et Lieberkiihn, en 1854 (même
124 LES SPOROZOAIRES.
recueil), insistèrent davantage sur cette analogie révélée par Dujardin et
n'hésitèrent pas à faire rentrer ces organismes dans le cycle d'évolution
des Grégarines ; ils se crurent même fondés à désigner sous le même
nom de navicelles les corpuscules qui naissent, soit dans la substance
plasmique dont nous parlons , soit dans le corps des Grégarines.
Cependant Lieberkiihn a signalé quelques différences entre le corps
des Grégarines à l'état d'accroissement et ces masses plasmiques dans
lesquelles se produisent lesPsorospermies. Il a constaté que ces masses
étaient dépourvues de membrane et n'avaient pas de noyau, tandis que
chez les Grégarines, il y a une membrane distincte et un superbe noyau
de cellule. S'il avait connu la structure exacte des Psorospermies
proprement dites, il aurait été bien plus frappé des différences qu'elles
présentent avec les pseudonavicelles.
Leydig a vu , chez les Plagiostomes, des masses vermiformes d'une
substance gélatineuse et granuleuse, et pense que les Psorospermies
naissent par une sorte de génération endogène de cellules filles au sein
de ces masses.
Quant à Lieberkiihn, ce qui le conduisit à assimiler ces productions
aux Grégarines, ce fut une observation qu'il fit et dans laquelle il vit
une de ces Psorospermies s'ouvrir, et la masse plasmique intérieure
sortir en se mouvant comme une Amibe. Cela suifit pour que Lieberkiihn
fît de la Psorospermie une pseudonavicelle puisqu'il pensait , nous le
savons, que les pseudonavicelles se comportaient ainsi pour se trans-
former en jeunes Grégarines. Cette observation sur la sortie de la
masse plasmique est parfaitement exacte, seulement Lieberkiihn n'a
pas suivi la transformation de cette masse et n'a pas vu le phénomène
le plus curieux de la reproduction de ce parasite.
LES MYXOSPORIDIES, >I25
II
Remak (Mûller's Archiv, 1852) ne s'est occupé des Psorospermies
que d'une manière incidente et en étudiant des productions toutes
différentes , c'est-à-dire des espèces de kystes sanguins qui se forment
sur le trajet des ramifications de l'artère splénique chez certains
Poissons, chez la Tanche, par exemple , où ils sont très communs. Ils
constituent des masses globuleuses supportées par un pédoncule plus
ou moins long dans la tunique adventive de l'artère, masses qui pren-
nent naissance dans un diverticulum de l'enveloppe conjonctive du
vaisseau. L'étude de ces kystes était, pour ainsi dire, à la mode en
ce temps là, et l'on voulait savoir si la matière rouge qu'ils contien-
nent est du sang, et comment ce sang pouvait sortir de l'artère. Ce
sont cep kystes sanguins que Remak examinait , et il était arrivé à ce
résultat que la matière rouge était produite, non pas par des cristaux
d'hématoïdine, comme le croyaient Kôlliker et d'autres observateurs,
mais par une substance pigmentaire résultant de la transformation des
globules graisseux de la rate et ne dérivant pas de la matière colo-
rante du sang. Dans ses recherches , Remak reconnut plusieurs fois
que ces kystes renfermaient de grandes quantités de Psorospermies
mêlées aux éléments qu'ils contiennent naturellement. — En effet, j'ai
souvent eu l'occasion de rencontrer ces ramifications de l'artère splé-
nique de la Tanche garnies de ces kystes. On les voit alors couvertes
de points bruns plus foncés que le reste du tissu. Ces granulations
sont des kystes, et souvent, en effet, on trouve dans leur intérieur des
Psorospermies. D'ailleurs, on rencontre souvent les kystes en d'autres
points, et ils ne renferment pas toujours des Psorospermies. Ces orga-
nismes sont ici un accident : on peut les trouver dans ces kystes comme
on les trouve dans la rate , dans la vessie natatoire ou en d'autres
points; ils ne sont point les hôtes nécessaires des kystes sanguins.
126 LES SPOROZOAIRES.
Remak n'a , du reste , pas fait d'observations à ce sujet. Plus tard ,
j'aurai l'occasion de parler de nouveau des Psorospermies des kystes
sanguins de la rate, et nous verrons comment on peut expliquer leur
formation.
Pendant longtemps, nos connaissances n'ont, pour ainsi dire,
point fait un pas, tant à propos de la structure que du mode de
développement des Myxosporidies. En 1863, j'ai communiqué à
l'Académie des Sciences des observations concernant la structure de
ces petits corps que l'on considère généralement aujourd'hui comme
les spores des iMyxosporidies. J'avais examiné leur structure dans la
substance des Myxosporidies et je me réservais de faire une seconde
communication ; cette communication je la ferai ici.
Plus tard , d'autres auteurs se sont occupés de ces organismes.
Gabriel, en 1879, décrivit les Psorospermies que l'on rencontre
dans la vessie urinaire du Brochet. Quand on ouvre le premier
Brochet venu et quand on incise la vessie urinaire et qu'on l'étalé , on
est presque certain d'y trouver des Psorospermies ; quelquefois elle
est enduite d'une couche mucilagineuse jaune , tout entière formée de
Myxosporidies. Lieberkiihn les avait décrites, le premier, comme des
Grégarines, et je les avais moi-même étudiées en 1863. Depuis ,
Biitschliles a examinées aussi, et nous rapporterons les résultats de
toutes ces observations.
Dans ces travaux récents sur ces Psorospermies, chaque auteur a
porté son attention sur un point plus ou moins délimité du sujet ; je me
suis surtout occupé de la structure intime des corpuscules ou spores ,
il en est de même pour Bùtschli, qui a, en outre, étudié les Myxospo-
ridies proprement dites , c'est-à-dire les masses sarcodiques au sein
desquelles ces spores prennent naissance. J'avais attribué moins d'im-
portance à ces masses; j'avais bien vu que, dans certaines circons-
tances , ces corpuscules naissaient dans de petites masses de sarcode ,
mais je considérais la Psorospermie comme la forme parfaite et
définitive des organismes, et la masse sarcodique comme une sorte
de matrice ou gangue dans laquelle ces Psorospermies se formaient.
LES MYXOSPORIDIES. 427
Bûtschli professe une manière de voir différente : la forme adulte et
définitive de l'organisme , celle qui représente l'entité biologique ,
c'est la masse sarcodique amorphe de Dujardin , et les Psorosperraies
ne seraient que des corps reproducteurs , des spores; c'est ainsi qu'il
les décrit. Aujourd'hui, j'avoue que je suis tout à fait disposé à me
rallier à l'opinion de Biitschli, surtout après ce que nous savons sur
les Grégarines et autres Sporozoaires à période de végétation et
période de reproduction.
Il est évident que ces Myxosporidies correspondent à ce qu'on peut
appeler la masse grégarinaire des Sporozoaires ; c'est l'équivalent
d'une Grégarine ou d'une Goccidie avant l'enkystement. Nous avons
vu que les Grégarines ont une forme bien définie , puisqu'elles ont
' no enveloppe ; que les Psorospermies oviformes, quoique souvent
sans enveloppe , ont aussi une forme régulière : ce sont des masses
arrondies placées dans l'intérieur des cellules. Descendant à un
degré de plus dans la dégradation de l'organisme , nous arrivons à
une masse amorphe ou sans forme fixe, continuellement variable en
raison même des mouvements amiboïdes qui l'animent. C'est une
Grégarine réduite à une masse sarcodique amorphe pouvant changer
de forme à chaque instant. Ces masses, en effet, sont mobiles, comme
cela a été constaté pour la première fois par Lieberkiihn chez le
Brochet et plus tard par Bûtschli. Gabriel a nié ces mouvements, bien
qu'ils soient réels ; je les avais décrits dans les masses sarcodiques
analogues que l'on trouve dans d'autres organes.
Ces végétations sarcodiques , qui produisent les Psorospermies ,
siègent, pour ainsi dire, dans toutes les parties du corps des Poissons,
même les parties les plus différentes, l'épiderrae des nageoires ou de
la surface du corps (Gluge). Elles affectent le tissu conjonctif sous-
épidermique : ce sont donc des endoparasites. On les rencontre
très fréquemment sur les la:uelles branchiales , surtout chez les
Tanches , sous forme de petites masses ovalaires , blanchâtres ,
placées entre les lamelles. On les trouve dans les organes internes
les plus divers , sauf les muscles et le système nerveux ; mais, en
428 LES SPOROZOAIRES.
dehors de ces derniers tissus , elles sont partout à foison, dans la rate,
le foie, les reins , et leur siège de prédilection se trouve le long des
ramifications artérielles. Les lieux d'élection, chez certains Poissons,
comme les Cyprins, Carpes et Tanches, par exemple, sont les branchies
et la vessie natatoire. Ce dernier organe , comme on sait , se
compose de deux parliez, une portion antérieure courte et une portion
postérieure longue. Le sièga des Myxosporidies est toujours la courte
portion antérieure ; je ne les ai jamais rencontrées sur la longue
portion postérieure. Elles se présentent sous forme de tumeurs
mamelonées , blanchâtres , qui occupent souvent la plus grande partie
de la surface de l'organe. 11 est quelquefois facile d'énucléer ces
tumeurs avec les aiguilles pour les porter sous le microscope.
Les tumeurs branchiales , dont Biitschli a donné une bonne des-
cription , forment de petits corps qui varient de 2 à 6 millimètres de
longueur; elles sont ovalaires, plus ou moins allongées parallèlement
à la direction d^s lamelles. Elles sont situées sous l'épiderme, dans le
tissu conjonctif qui réunit les deux couches épidermiques qui forment
la lamelle. On peut enlever ces petits kystes et les transporter sur le
porte-objet. On voit alors qu'ils sont composés d'une membrane d'en-
veloppe et d'un contenu. La membrane est assez épaisse , quelquefois
de 0'""',01, formée d'une substance assez ferme, sans structure et
toute pénétrée de petites granulations réfringentes. BiitschU prétend
qu'elle loge des noyaux très petits, répandus en très grand nombre
dans la membrane d'enveloppe, mais il ne sait pas si ces petits noyaux
et la membrane sont une production du kyste ou une production de
la lamelle branchiale destinée à isoler le parasite. Pour ma part, je suis
assez disposé à considérer l'enveloppe comme appartenant en propre
au kyste ; quant aux petits noyaux que BiitschU a réussi à colorer par
le carmin, j'avoue que je n'ai jamais pu reconnaître aucun élément
défini. Le contenu présente des caractères fort intéressants. Formé
par la substance plasmique plus ou moins liquide ou consistante , il
renferme des éléments divers , des granulations , sans doute grais_
seuses, quelquefois assez volumineuses , des Psorospermies à tous les
LES MYXOSPORIDIES. 429
degrés de développement , et de petites vésicules avec un amas cen-
tral de granulations. J'avais très bien vu ces vésicules en 1863 ; Bûtschli
les considère comme des noyaux libres, ce que j'admettrais volontiers,
car il a reconnu un noyau dans les Psorospermies complètement déve-
loppées, et ces vésicules peuvent être le premier état des Pso-
rospermies.
Un autre organe très favorable à la recherche de ces organismes
est, avons-nous dit, la vessie natatoire des Poissons. On peut détacher
une portion de la membrane et la porter sous le microscope ; comme le
tissu en est transparent, il est facile d'observer les tumeurs. 11 en est
de même pour la vessie urinaire du Brochet : on enlève, avec la pointe
du scalpel, une partie de la matière mucilagineuse jaune qui recouvre
la membrane de cette vessie et, en la portant sous le microscope , on
voit que les éléments qui la composent sont très divers
Mais examinons d'abord les caractères physiques et chimiques
de ces corps. C'est Lieberkiihn qui, le premier, les a observés
en ce point , et les a considérés comme des corps grégarinaires.
La forme de ces Myxosporidies du Brochet est , d'ailleurs , très
variable suivant l'âge de la masse sarcodique. Dans les masses plus
jeunes, la forme est généralement arrondie, avec un plasma homogène,
finement granuleux, incolore ; dans les masses plus âgées, la forme
est allongée, quelquefois en boyau plus ou moins irrégulier ou même
ramifié (végétations ramifiées de Dujardiii ). On trouve alors ces
masses pressées les unes contre les autres de manière à former un
enduit presque continu. Elles sont formées par du sarcode et exé-
cutent des mouvements constatés d'abord par Lieberkiihn, puis par
BiJtschli ; ces mouvements sont peu sensibles, très lents , et pour les
voir il faut placer ces masses, non pas dans Toau, mais dans l'urine du
Brochet. Biitschli a étudié d'une façon assez complète leur structure. Il y
a reconnu deux couches : une couche externe, ectosarc ou ectoplasme,
et une couche interne, endosarc ou endoplasme. La première est for-
mée par une substance protoplasmique, dense, homogène, qui ne ren-
ferme que de très fines granulations. C'est cette couche que Biitschli
<30 J^ES SPOROZOAIRES.
a vue s'allonger en pseudopodes ou expansions plus ou moins larges ,
ou en filaments extrêmement fins qui , quelquefois , hérissent toute
la surface d'un véritable chevelu. Ce chevelu est formé par des fila-
ments pseudopodiques très fins qui s'allongent, se raccourcissent ,
rentrent et sortent lentement. L'endoplasme est généralement de
couleur jaune ou brunâtre. On y distingue d'abord , répandus dans la
masse plasmique, une foule de globules graisseux colorés en jaune ,
ce qui contribue pour une grande part à la coloration de la Myxos-
poridie , puis , des cristaux d'héraatoïdine signalés pour la première
fois par Meissner, puis par Lieberkiihn et Biitschli. Ces cristaux sont
libres ou renfermés dans des globules graisseux, soit isolés , soit ras-
semblés en conglomérats. Gomment se forment-ils dans ces Myxos-
poridies? on n'en sait rien , mais il est bien certain qu'ils proviennent
du sang du Poisson, à la suite d'une extravasation sanguine à travers
les parois du vaisseau, irritées sans doute par la présence de la
production parasitaire.
Biitschli a vu quelquefois des cellules épithéliales de la vessie
libres dans la substance de ces kystes : il a trouvé que ces cellules
détachées étaient occupées, sur une portion plus ou moins grande de
leur contour, par des Myxosporidies. Ce fait rappelle la jeune Gré-
garine à l'état de céphalin fixé sur une cellule épithéliale.
Quant aux corpuscules qui naissent dans ces Myxosporidies, ils ont
probablement la signification de corps reproducteurs ou spores, ainsi
que le pense Biitschli, et bien que cela ne soit pas pour moi hors de
doute ; leur structure est, en efiet, très compliquée , leur taille et leur
forme varient avec chaque Poisson , à ce point que l'on peut dire que
chaque Poisson a sa forme spéciale de Psorospermie. Ordinairement
ovalaire chez la Carpe et la Tanche , par exemple, ils sont souvent
cordiformes ou arrondis , comme chez YAcerina cernua et la Lotte ;
en forme de spermatozoïde, avec une queue plus ou moins longue,
comme chez la Perche et le Brochet. Leurs dimensions ne varient
pas moins : fort petits chez la Lotte , ils ne mesurent pas , d'après
mes observations , plus de 8 ]x., ce qui est le diamètre d'un globule
LES MYXOSPORIDIES.
m
sanguin de ce Poisson ; chez le Brochet , ils ont 36 {x de longueur, et
chez la Carpe 18 [x de long sur 12 [j. de large.
La structure de ces corps est extrêmement singulière. Ils sont
toujours composés d'une membrane d'enveloppe et d'un contenu. L'en-
veloppe est une coque solide formée non pas d'une seule pièce, mais
de deux valves appliquées l'une contre l'autre , comme les deux
moitiés d'une coquille de noix , et ce n'est que dans certaines condi-
tions que ces deux valves peuvent s'ouvrir ; elles présentent une Ugne
de suture toujours visible quand on regarde la Psorospermie par la
FiG. 36. — Psorospennies de la Tanche. — a , Psorospermie vue de face 6 , vue de
profil ; c, avec les filaments déroulés ; d, Psorospermie laissant échapper son contenu
sarcodique, sous forme d"une amibe, à travers ses valves écartées et montrant les bandes
élastiques de la coque détendues; e, vésicule contenant le filament spiral; f, g, h, vésicule
avec filament déroulé (d'après Balbiani).
tranche (fig. 36, b.) Ces valves sont sans structure appréciable, homo-
gènes, d'une transparence admirable, formées d'une substance qui, au
point de vue de sa composition chimique , est encore inconnue , mais
très réfractaire aux réactifs , les alcalis caustiques , l'acide sulfurique
même concentré, etc. J'avais constaté autrefois qu'elle est complète-
ment insoluble dans la soude et dans l'acide sulfurique bouillant;
cependant Biitschli a vu qu'elle finit par se dissoudre dans ce dernier
m
LES SPOROZOAIRES.
réactif. Mais si la coque ne se dissout pas , ses valves s'ouvrent d'une
manière très régulière. Nous verrons que cette déhiscence , ainsi
provoquée , se produit à l'état physiologique dans certaines conditions.
FiG. 37. — Psorospïrmies du Brochet. — a, Psorospermie de face ; b, de profil ;
c, Psorospermie dont les deux valves se sont écartées antérieurement pour laisser soitir le
globule sarcodique iclériour; d, Psorospermie avec les filaments déroulés fd'après
Balbiani.
Le contenu présente, à l'un des pôles du corpuscule, deux vésicules
géminées qui ne manquent dans aucune Psorospermie ; quelquefois ,
cependant, on ne voit qu'une seule vésicule , ce qui n'indique pas une
espèce particulière, mais ne représente qu'une dégradation organique
de la même espèce. Ces vésicules, toujours inclinées l'une vers l'autre
et rapprochées à l'extrémité antérieure du corpuscule, ont une forme
variable et s'allongent en une sorte de petit canal qui se fixe à la
paroi, au pôle, où l'on voit une ouverture très fine qui met le contenu
du corpuscule en rapport avec le monde extérieur. Les vésicules sont
formées d'une paroi épaisse et , dans leur intérieur, présentent un
filament enroulé en spirale, très difficile à apercevoir, aussi a-t-il
passé inaperçu jusqu'en 1863, époque à laquelle je l'ai mis en évi-
dence pour la première fois {Comptes rend, de l'Acad. des Se, 1863).
LES MYXOSPORIDIES.
133
Mais avec les réactifs , on peut s'assurer facilement de son existence ,
car certains liquides ont la propriété de le faire dérouler et sortir en
dehors de chaque vésicule, tantôt en ligne droite, comme une antenne,
tantôt en une spirale plus ou moins lâche, ou suivant des courbes plus
ou moins capricieuses et emmêlées. fFig. 36, e, f, g, h ; 37, d; 3S , d;
39, ?>;40, &;41,c.)
FiG. 38. — Psorospermies de la Perche.
— a , Psorospermie de face ; 6, de
profil avec deux prolongements cau-
daux ; c, forme un peu anormale ; d,
Psorospermie avec les filaments dé-
roulés (d'après Balbiani.)
FiG. 39. — Psorospermie de l'Ablette.
— a, l'sorospermie vue de face; b,
la même avec les filaments déroulés
(d'après Balbiani.)
FiG. 40. — Psorospermies de V Acer in a
cernua. — a , Psorospermie vue de
face; 6, la même avec les filaments
déroulés (d'après Balbiani).
FiG. 41. — Psorospermies de la Lolte.
a , Psorospermie vue de face ; b, vue
de même avec les vésicules dont les
filaments sont sortis ; c, Psorospermi •
montrant les deux filaments sortis ,
enroulés en lire -bouchon (d'après
Balbiani j.
Quand le filament est ainsi sorti, on voit qu'il est plus épais à la base
et va en s'ainincissant vers son extrémité antérieure. 8a longueur est
quelquefois très considérable , huit ou dix fois plus grande que celle
delà Psorospermie. Après l'émi-ssion du filament, il est plus facile
d'observer l'épaisseur do la paroi de la vésicule vidée , car elle revient
un peu sur elle-même. On y constate l'existence d'un liquide pâle , qui
43* LES SPOROZOAIRES.
remplace le filament spiral sorti. Les deux vésicules étaient déjà con-
nues de Millier, et c'est fortuitement qu'en les traitant par la potasse
j'ai réussi à faire sortir le filament spiral, comme l'ont fait plus tard
Bessels, en 1867, Aimé Schneider, en 1875, Bûtschli, en 1881. J'avais
employé les solutions alcalines, Aimé Schneider a réussi en se servant
de la glycérine , et Biitschli de l'acide sulfurique concentré. Ce dernier
observateur compare avec raison ces filaments aux organes urticants
ou trichocystes des Cœlentérés. Mais, connaissant la signification
des organes urticants, j'avoue que je ne comprends pas bien à quoi
peuvent servir ces organes aux Psorospermies , qui sont complète-
ment immobiles et ne se nourrissent pas , car on sait que les tricho-
cystes ont pour but de paralyser la proie et d'en rendre la captm-e
plus facile.
Outre ces éléments, on remarque encore dans la cavité des Psoros-
permies d'autres petits corpuscules qui apparaissent comme des
globules réfringents , au nombre de deux , trois ou quatre , disposés
symétriquement et placés souvent à la base des vésicules géminées.
(Fig. 36, a, c ; 3S, a, d; 39 et 41). J'avais considéré ces petits globules
comme des vésicules à filament à l'état rudimentaire et destinées à
se développer au moment de la reproduction, car, à ce moment, les
Psorospermies renferment trois ou quatre vésicules à filament.
Biitschli a attaqué cette manière de voir ; néanmoins, je crois devoir
la maintenir.
Quant au reste de la cavité , il est complètement rempli par la
substance homogène plasmique. Celle-ci prend quelquefois la forme
d'un globule qui se ramasse au centre de la cavité, et l'on peut en
déterminer la condensation en faisant agir les acides sur la Psoros-
permie, l'acide acétique, par exemple. Cette condensation se produit
du reste naturellement au moment de la reproduction. C'est dans
rintérieur et au centre de cette masse plasmique que Biitschli a trouvé
un noyau qu'il suppose avoir une relation avec un des noyaux libres
décrits par lui dans la Myxosporidie.
LES MYXOSPORIDIES. 135
-A.
III
Après avoii" décrit la constitution des Psorospermies des Poissons
et des masses plasmiques dans lesquelles on les trouve, nous devons
examiner la manière dont ces corpuscules prennent naissance dans les
Myxosporidies ; malheureusement, nos connaissances sur le mode de
formation de ces spores sont encore bien incomplètes.
Jean Millier croyait que les vésicules polaires devenaient libres à un
certain moment et s'organisaient en Psorospermies dans la cavité
de l'ancienne par une sorre de génération endogène. C'était une
opinion erronée, mais c'est que J. Millier ne connaissait pas les masses
plasmiques au sein desquelles les Psorospermies prennent naissance
et croyait que ces dernières sont des formes définitives.
Leydig (Milliers Archiv. 1851) connaissait très bien ces masses pour
les avoir étudiées dans la vésicule biliaire des Plagiostomes ; il avait vu
naître les Psorospermies dans ces masses , opinion qui avait été déjà
émise par Dujardin six ans auparavant. Il supposait qu'au sein de ces
masses naît une vésicule claire, dans laquelle i) s'en produit une autre,
plus petite , contenant des granulations. Peu à peu, la vésicule interne
prend la forme d'une Psorospermie dans la vésicule mère , tandis que
ses granulations s'agglutinent et , par fusion ou en se dissolvant ,
roduisentles deux corpuscules polaires tels que nous les connaissons.
Ceux-ci sont ensuite mis en liberté, par rupture de la vésicule mère,
dans Ta matrice commune, c'est-à-dire dans la masse plasmique au
sein de laquelle s'est produit le phénomène.
Leydig a observé dans ces Psorospermies des corpuscules à quatre
capsules polaires ayant une forme particulière (dans le rein et la
vésicule biliaire de la Torpille). Ces quatre capsules polaires étaient
placées parallèlement à côté l'une de l'autre. Il les prenait pour des
136 LES SPOROZOAIRES.
vésicules homogènes et ignorait l'existence du filament spiral, qui n'a
été découvert qu'en 1863.
Lieberkiihn ( MûUer's Aixhiv , 1854 ) faisait aussi former les Pso-
rospermies , qu'il avait observées sur la vessie urinaire du Brochet,
au sein d une masse plasmique qu'il appelle masse grégarinairo, pre-
nant ces corpuscules pour des organismes tout à fait analogues aux
Grégarines. Suivant lui, cette masse se fragmenterait en petits globules
ou vésicules dont chacune s'organiserait en une Psorospermie. Il
n'a pas observé ni décrit la transformation de ces petits globules en
Psorospermies. Quant à l'origine de ces masses grégarinaires, au sein
desquelles se produisent les Psorospermies , pour Lieberkiihn , c'est
le contenu d'une Psorospermie qui s'échappe, ses deux valves s'étant
ouvertes en s'écartant. Chaque valve, comprenant le corpuscule
polaire correspondant, laisse ainsi échapper la masse centrale
sous forme d'un globule amiboïde qui, en grossissant, devient la masse
sarcodique au milieu de laquelle vont se produire de nouvelles Pso-
rospermies. Il y a évidemment un fond très exact dans cette opinion
de Lieberkûhn, mais cet observateur n'a pas suivi dans tous ses détails
la manière dont les Psorospermies prennent naissance au sein des
masses plasmiques.
En 1863, je me suis contenté (Comptes rendus de VAcad. des
Sciences) de décrire les Psorospermies , mais à l'état de maturité
complète ; j'avais cependant indiqué qu'à certaines phases de leur
existence leur contenu sarcodique se concentre dans ces corpuscules
sous forme de globules qui s'échappent à travers un écartement des
valves de la Psorospermie. Ceux-ci grossissent et dans leur intérieur
s'organisent d'autres Psorospermies. J'avais donc confirmé les idées
de Lieberkiihn , mais je considérais les Psorospermies comme des
organismes à l'état parfait et j'attribuais au sarcode qui s'échappe la
signification d'une spore. C'est ce qui m'avait conduit à regarder les
Psorospermies comme une sorte de végétal, et il y a, en réalité, bien
des faits qui plaident en faveur de cette idée ; cependant, aujourd'hui,
la plupart des auteurs les considèrent comme des animaux.
LES MYXOSPORIDIES. ^37
Quoi qu'il en soit, il restait une lacune à combler : comment pren-
nent naissance les masses sarcodiques ? J'ai observé la formation de
ces masses sur les nageoires des Poissons, et particulièrement de la
Tanche. De tous nos Poissons d'eau douce , la Tanche est, on eflet,
celui qui présente le plus de ces parasites, et en toutes saisons. De
plus, les jeunes ont les nageoires minces et transparentes, de sorte
qu'elles sont favorables à l'observation. C'est en portant sous le
microscope les nageoires dorsale et caudale déjeunes Tanches qu'on
peut suivre les phénomènes. J'ai vu ainsi que, quand on rencontre ces
petits kystes qui se trouvent sur les lamelles branchiales, on est cer-
tain d'en rencontrer aussi dans les organes profonds. C'est un crité-
rium presque infaillible. Dans les nageoires, j'ai observé fréquemment
des petits corps amiboïdes de volume très variable, mêlés à des Pso -
rosperraies développées. J'ai suivi avec beaucoup de soin ces petites
Amibes , petites Myxosporidies à l'état naissant. Elles se meuvent
comme les Amibes les plus agiles , ÏAmœba diffiuens, par exemple :
en moins d'un quart-d'heure, j'ai pu tracer, sur l'une d'elles, neuf
changements de forme. J'ai vu aussi que la température ambiante a la
y^^^ FiG. 42. — Petite masse amiboïde sortie d'une Psorosperniie de la Tanche ; a-e quelques-
\ uns de S3S chan!»ements de forme successifs ; n, noyau (d'après Baibiani) .
plus grande influence sur leurs mouvements qui sont bien plus rapides
pendant les temps chauds que par le froid. Les pseudopodes sont
larges et obtus , lobés comme chez XAmceha diffiuens. J'ai observé
aussi un noyau dans ces petites masses amiboïdes , noyau très visible
quand les Amibes ne sont pas remplies de trop de globules graisseux,
comme cela leur arrive plus tard. On voit facilement le noyau au
moment où la petite masse sort de la spore. C'est le noyau dont
^38 LES SPOROZOAIRES.
Bûtschli a constaté l'existence dans l'intérieur de la Psorospermie. Il
n'y a pas de vésicule contractile et, à ce point de vue, ces corps
diffèrent des Amibes ordinaires
Tout en errant ainsi à travers les tissus de la nageoire, les petits
corps amiboïdes augmentent de volume en absorbant des sucs nutri-
tifs ; ils se pénètrent de globules graisseux , puis , ayant atteint un
certain volume , tendent à prendre une forme arrondie ou ovalaire ,
quelquefois irrégulière avec des expansions et des lobes , et s'entou-
rent d'une mince membrane d'enveloppe que l'on peut mettre on
évidence en ajoutant de l'eau à la préi)arati()n. Cette eau pénètre peu à
peu dans les tissus de la nageoire et la membrane devient visible , les
mouvements se ralentissent de plus en plus et, finalement, s'arrêtent :
la petite masse paraît , pour ainsi dire , figée sur place. Indépen-
damment de cette mince membrane propre, la petite masse s'enkyste
par condensation autour d'elle du tissu conjonctif de la nageoire, ainsi
qu'il arrive pour tous les corps étrangers qui pénètrent dans les
organes.
FiG 43. — Myxosporidies des nageoires delà Tanche avec des spores (Psorospermios*
en voie de développement n, petiie Myxosporidie contenant des noyaux; 6, état
plus avancé ; c, grosse Myxosporidie enkystée dans les liscsus de la nageoire et
contenant des spores mûres pour la plupart (d'après Balbiani)
A mesure que ces masses grossissent, on voit dans leur intérieur le
nombre des noyaux augmenter. Ils se multiplient par division succes-
sive ; j'ai vu des divisions fréquentes de ces noyaux , et , sur mes
dessins, jo trouve des figures qui montrent très nettement ces divisions.
A une phase plus avancée, ces petits noyaux condensent autour d'eux
LES MYXOSPORIDIES.
439
une portion de la substance plasmique et se transforment en globules
qui sont précisément les petits globules sur leïtquels ont porté les
observations de Lieberkiihn. Ils grossissent , prennent une forme
elliptique et à un de leurs pôles apparaissent deux corpuscules d'abord
très pâles , puis brillants , qui sont les rudiments des vésicules
polaires. Comment se produisent celles-ci? — J'avoue que je ne suis
pas arrivé à des résultats bien satisfaisants à ce sujet ; cependant, ii est
un détail que j'ai vérifié maintes fois. J'ai vu des éléments qui renfer-
maient trois globules granuleux dont un plus gros et deux plus petits ;
il est probable que le gros devient le noyau signalé par Biitschli dans
FiG. 44. — Trois états de développement des spores dans les Myxosporidies de la Tanche.
Les spores se développent deux à deux dans une pelitî masse de sarcode homogène, n-b.
et sont contenues à maturité dans une vésicule , c. On voit à rintérieiir de la spore, dans
a et b, les capsules polaires en voie de développement (d'après Balbiani).
le plasma intérieur de la Psorospermie complètement développée, et
y^^que les deux plus petites se transforment dans les corpuscules à
filament spiral J'ai observé aussi des Psorospermies incomplètement
développées, pâles, renfermant des éléments que je crois être des
capsules polaires en voie de formation : 1" deux vésicules sphériques ,
contenant chacune un petit globule central, placées dans la substance de
la Psorospermie, loin des pôles ; 2° deux petites vésicules semblables
placées Tune à côté de l'autre à un des pôles du corpuscule : 3^ deux
vésicules piriformes avec un petit globule central, tantôt éloignées
l'une de l'autre, tantôt rapprochées et situées à l'une des extrémités de la
Psorospermie. Ces vésicules étaient, à n'en pas douter, les petits organes
à filament spiral. Mais ce que je n'ai pu établir nettement, c'est leur
440
LES SPOROZOAIRES.
origine : proviennent-ils des noyaux préexistants dans les Psorosper-
mies en voie d'organisation dans la substance plasmique, ou d'une
formation libre dans cette substance ? C'est ce qui est encore incertain.
Plus récemment , Biitschli est arrivé à des faits très analogues à
ceux que j'avais observés dix-huit ans auparavant; c'est ce qui me
fait beaucoup regretter de ne pas avoir publié mes observations à
cette époque. Bûtschli donne les siennes comme nouvelles, et il en a,
en effet, le droit, puisque mes recherches étaient inédites ; je n'élève
donc aucune réclamation de priorité , mais je demande qu'il reste
acquis que, longtemps auparavant, j'avais fait des observations qui
confirment celles de Bûtschli.
FiG. 45. — Myxosporidies et Psorospermies de la vessie urinaire du Brochet, a , Myxospo
ridie remplie de granulations graisseuses , sans spores ; 6, Myxospcidie avec spores bien
développées ; c , d , très jeunes Myxosporidies ; e, /', forme la plus commune des spores
ou Psorospermies. L'une d'elles, /, présente ses filaments déroulés et ses capsules polaires
vides ; g, forme plus rare des spores avec deux capsules à chafiue pôle (d'après Balbiani).
Dans les Myxosporidies de la vessie urinaire du Brochet, les Pso-
rospermies ont une structure particulière qui diffère de celle que
nous avons décrite pour les Psorospermies des autres organes , les
nageoires, la vessie natatoire, les branchies. Ces Psorospermies ont la
LES MYXOSPORIDIES. U1
forme d'un fuseau avec un corpuscule polaire à chaque extrémité. Par
la potasse, on fait sortir de chaque vésicule le filament spiral qui
s'allonge dans l'axe de la Psorospermie , et les capsules se vident
( fig. 45, f). Dans la masse plasmique existe un noyau. Gomment se
forme cet organisme au sein de la Myxosporidie ? Bûtschli a fait à cet
égard des observations intéressantes. A l'état le plus jeune, c'est un
globule de sarcode avec un nombre variable de noyaux transparents,
ordinairement six ; bientôt il prend une forme allongée et se divise
en deux autres globules dans lesquels les noyaux se répartissent.
Chacune de ces deux masses devient l'origine d'une spore : c'est une
masse sporigène ou un sporoblaste. Chaque sporoblaste est ainsi
formé aux dépens de la masse sarcodique primitive et renferme trois
noyaux. Mais avant de se diviser, la masse commune s'était entourée
d'une mince membrane d'enveloppe et c'est dans l'intérieur de celle-ci
que la division a eu lieu. Puis, les deux sporoblastes s'allongent en
fuseau et les trois noyaux se disposent à la file, l'un au centre et les
deux autres aux extrémités.
Telle est la disposition qui conduit bientôt à l'organisation que l'on
trouve dans les spores mûres. Le noyau médian persiste et devient
celui de la Psorospermie ; quant aux deux autres, Biitschli inchnait
d'abord à croire qu'ils se transforment directement en capsules
/xDolaires, mais il a été obligé de renoncer à cette hypothèse, en obser-
vant d'autres faits. 11 a vu que les noyaux extrêmes disparaissent com-
plètement, mais, auparavant, il s'était produit, en arrière de chacun
d'eux, un petit globule brillant, d'abord sphérique, puis qui s'allonge,
formé probablement par une condensation locale de protoplasma.
Ce sont les rudiments des globules polaires qui paraissent donc prendre
naissance par suite d'une condensation locale de la substance proto-
plasmiquc. Bientôt ces globules se rapprochent des pôles, s'organisent
en corpuscules polaires proprement dits, avec le filament spiral dont
la formation n'a pas été observée.
Bûtschli a aussi examiné les Myxosporidies des branchies et il a vu
des faits analogues, mais qui s'éloignent parfois aussi des précédents.
445 LES SPOROZOAIRES.
Ainsi, il a vu des vésicules qui paraissaient échancrées ou déprimées
sur un point de la surface semblant correspondre à l'ouverture par
laquelle passe le filament spiral au moment de sa détente. Dans l'inté-
rieur de cette vésicule sont trois masses de sarcode disposées, deux
près de l'ouverture, et une plus en arrière. Il est probable que ces trois
masses représentent trois noyaux, et que le noyau situé en arrière
persiste pour constituer le noyau de la Psorospermie, tandis que les
deux masses antérieures représentent les deux noyaux qui, dans la
Psorospermie de la vessie urinaire du Brochet , sont situés aux extré-
mités, et qui disparaissent ; mais il n'a pas pu reconnaître quel est le
sort ultérieur de ces deux noyaux.
Dans d'autres vésicules, les capsules polaires paraissaient situées
à l'intérieur des deux noyaux antérieurs et se prolongeaient en un
filament plus ou moins long également placé dans le noyau. II y a donc
là des faits qui ne concordent pas, et il faut reconnaître, avec Biitschli,
que le sujet mérite de nouvelles investigations. Je tenais seulement à
constater ici la très grande analogie des faits que j'ai observés dix-huit
ans avant Biitschli avec ceux décrits dans le travail que cet auteur
a publié l'an dernier (1881) dans la Zeitschrift f. wiss. Zool.
La maturité acquise , ces petits éléments sont aptes à la repro-
duction. Bûtschli les a décrits comme des spores et je crois qu'il
a eu de sérieuses raisons pour le faire. En effet, quand la spore est
mûre, elle tend à se reproduire, et il en résulte la formation d'une nou-
velle petite masse plasmique ou Myxosporidie qui n'est autre que
le contenu primitif de la Psorospermie, contenu qui s'est échappé à l'état
d'Amibe. Je me suis attaché , dans mes anciennes études, à observer
la façon dont a lieu la sortie de ce globule sarcodique, et j'ai constaté
qu'à ce moment entre en jeu un mécanisme très singulier, destiné à
favoriser la sortie du globule.
La Psorospermie , en effet , montre alors une organisation fort
curieuse et dont on ne remarque aucune trace avant la maturité
complète. Chacune des deux valves présente sur son contour un
ruban élastique, ruban placé sur la ligne de suture des deux valves et
LES MYXOSPORIDIES.
U3
qui s'applique exactement contre le bord de la valve. Chaque ruban
est formé de deux parties qui s'articulent aux deux pôles du corpus-
cule et se prolongent en un ou deux filaments tantôt effilés, tantôt
élargis à leur extrémité (fig. 36, c?; 46, a, h, c.) Ces rubans sont
doués d'une remarquable élasticité, qui, seulement alors, entre en
jeu. Les pièces qui les composent sont si bien appliquées contre le
bord de la valve qu'il est . impossible de les voir avant ce moment.
Aucun auteur ne les a vues, et je suis certainement le premier à les
avoir observées en 1863. Bùtschli , lui-même , ne sait pas ce que je
veux décrire, tous ces faits lui ayant complètement échappé.
A
Fig. 46. — Psorospermies de la vessie natatoire de la Tanche montrant leur appareil
élastique détendu, a et i , Psorospermies réunies deux à deux par cet iippareil (état de
conjugaison?). Le nombre des capsules à filament spiral est de trois ou quatre dans
chaque spore et l'on voit à l'intérieur de celle-ci le plasma contracté eu boule; c, spore
isolée avec les filaments élastiques détendus , les capsules vides et le plasma en boule
(d'après Palbiani).
Au moment de la maturité, les filaments se détachent, les rubans
élastiques se détendent on s'enroulant ou en se recourbant et en-
traînent les valves qui s'entr'ouvent. Cette observation est très difficile,
et je ne me flatte même pas d'avoir absolument saisi le mécanisme de
cette déhiscence.
Il est évident que cet appareil représante un instrument de dissémi-
nation ; on peut le rapprocher de celui dont sont pourvues les spores
des Equiselum, appareil composé de quatre filaments ou élalères
qui enveloppent la spore en se recouvrant en croix à sa surface. Lors
de la maturité et sous l'influence de l'humidité, les quatre filaments se
U4 LES SPOROZOAIRES.
débandent comme de petits ressorts et projettent la spore à une
certaine distance. C'est avec cet appareil que les filaments élastiques
des Psorospermies présentent le plus d'analogie, et je ne vois rien
autre à quoi je puisse les comparer. Ici , l'appareil n'a pas pour but de
projeter la spore, mais de provoquer l'écartement des deux valves
pour permettre la sortie du globule amiboïde. Quant à celui-ci, nous
savons ce qu'il devient, nous savons qu'il grossit aux dépens des sucs
qui l'entourent et développe une nouvelle Mjxosporidie.
Cet appareil de déhiscence a encore un autre usage. En efiét, on
observe sur les Psorospermies bien mûres la réunion de deux de ces
corps par leurs filaments élastiques agissant à la manière de grappins
ou organes de rétention. Cet état de conjugaison s'accompagne de
phénomènes très curieux , évidemment en rapport avec la repro-
duction de ces corpuscules, car, à ce moment , on remarque que les
vésicules à filament spiral se sont accrues en nombre : on en compte
trois ou quatre (fig. 46, a, h,) au lieu de deux. Comment se forment-
elles ? Vous vous rappelez ces petits globules disposés de façon à peu
près symétrique, homogènes, brillants, ressemblant à des globules
graisseux (voir fig. 36 et suivantes), placés au-dessous des capsules à
filament : ce sont des capsules à l'état rudimentaire et qui ne se déve-
loppent qu'au moment de la maturation des spores. Chacune ren-
ferme alors un filament spiral comme les capsules anciennes. Ces
vésicules ne tardent pas à émettre leur filament pendant que les
Psorospermies se tiennent embrassées, et ces filaments sortent plus
ou moins droits ou contournés. Les Psorospermies s'étant détachées ,
il arrive parfois que les vésicules émettent leur filament spiral dans
l'intérieur même du corpuscule. J'étais, quand j'ai fait ces observations,
très porté à voir dans ces éléments des organes de fécondation, quel-
que chose comme des anthérozoïdes. Nous trouvons, en effet , ici
toutes les apparences d"un phénomène de reproduction sexuelle :
d'abord, rapprochement de deux individus, puis, présence d'un élément
femelle, le globule sarcodique devenant libre à ce moment, et, enfin,
des filaments que j'avais lieu de comparer à des anthérozoïdes. En un
LES MYXOSPORIDIES. . i45
A
mot , ce processus rappelle involontairement à l'observateur une
génération sexuelle cryptogamique. Mais ces interprétations, quoique
émises avec réserve, m'ont attiré , de la part de Leuckart et de
Biitschli, une critique sévère. Ces auteurs préfèrent les comparer à
des organes urticants. On peut leur répondre en leur demandant
quelle serait ici la signification physiologique des organes urticants,
qui sont des armes offensives et défensives. Quels seraient, chez ces
organismes, leur rôle et leur utilité? J'étais donc en droit de les
considérer comme des anthérozoïdes, aussi bien, si ce n'est mieux, que
Leuckart et Biitschli d'en faire des organes urticants. Nous avions,
je crois, autant de raisons, les observateurs allemands et moi, pour
soutenir notre interprétation. Dans tous les cas, les phénomènes dont
il s'agit méritent d'être étudiés de nouveau.
Je suis malheureusement obligé , faute de temps , de passer très
rapidement sur toutes ces questions ; très rapidement aussi sur la
comparaison à établir entre les Myxosporidies et les autres Sporo-
zoaires. Il est évident qu'il existe entre eux des points de ressemblance,
mais aussi des différences. Les points de ressemblance se trouvent
dans ces masses plasmiques qui représentent la forme de Grégarine
ordinaire et la masse plasmique des Psorospermies oviformes ou
Coccidies. Les Psorospermies elles-mêmes peuvent être considérées
comméles spores des Myxosporidies. Mais aussi il y a des différences
considérables, principalement dans la structure de ces spores, les
capsules à filament spiral n'ayant pas d'analogie chez les autres
Psorospermies, Ce sont des formes tout à fait spéciales, et il est
difficile d'y voir les homologues des corps falciformes. Cela est vrai
quand on les compare aux pseudonavicelles , mais ces différences
disparaissent en grande partie quand on compare aux spores des
Grégarines et des Coccidies les formes les plus dégradées des Myxospo-
ridies. En effet, toutes les Psorospermies d'un Poisson paraissent
appartenir à une même espèce, car on peut suivre la gradation des
formes. Cette espèce est représentée par des formes plus ou moins
parfaites, suivant les conditions de son développement. Dans un
10
<4ê
LES SPOROZOAIRES.
organe qui reçoit largement le contact de l'air, comme les branchies,
la vessie natatoire (qui, à certains moments, est remplie d'oxygène pur),
ces parasites sont dans de très bonnes conditions de développement :
c'est alors qu'ils acquièrent ces formes si compliquées que j'ai décrites.
Mais examinés dans des conditions moins bonnes, comme ils en trouvent
dans les organes profonds , le rein , le foie , la rate (PI. IV, fig. 1 et 2)
on constate une dégradation très manifeste de leurs formes. La pre-
mière est la disparition d'une des vésicules à filament spiral : il n'en
reste alors plus qu'une (fig. 3, A.); quelquefois elles disparaissent
toutes les deux et la Psorospermie se réduit à une coque contenant
une substance plasmique granuleuse, mais composée toujours de deux
valves (fig. 3, B.) Sous une forme encore plus réduite, les valves sont
réunies et il ne reste plus qu'une capsule d'une seule pièce. On trouve
alors toutes les gradations entre la Psorospermie la plus parfaite et
une simple enveloppe contenant une matière granuleuse, ce qui nous
conduit à la pseudonavicelle.
Fig. 47. — Formes dégradées de Psorospermies dans la rate , le foie et les reins de la
Tanche, a , b, c, Psorospermies conoïdes avec une ou deux capsules polaires ; d , e, f,
Psorospermies réduites aux deux valves de la coque, tantôt rapprochées, tantôt écartées;
en d, une des valves contient une capsule à filament spiral (d'après Balbiani).
Je crois donc qu'on peut établir une homologie entre ces éléments
qui présentent des différences si grandes quand on les envisage dans
les formes les plus parfaites. Certaines phases de la formation de ces
Psorospermies atrophiées rappellent presque complètement la forma-
LES MYXOSPORIDIES. 147
tioii des spores dans l'intérieur du kyste de certaines Coccidies.
On trouve parfois des vésicules avec quatre corps fusiformes qui
rappellent beaucoup les corpuscules falciformes des Coccidies.
D'ailleurs, les Sporozoaires, envisagés dans leur ensemble, présen-
tent des particularités d'organisation qui peuvent être portées très loin,
dans certains types, sans que les caractères de parenté disparaissent.
Ainsi, l'appareil de sporulation de certaines Grégarines (Gamocystis ,
Clepsidrina) présente des détails de structure très compliqués qui
n'existent pas chez d'autres espèces et chez les Coccidies, où le kyste
n'offre, par exemple, qu'un simple micropyle, sans que les liens de
parenté qui réunissent certaines formes aux autres soient rompus.
Malgré ces différences, il y a des analogies, et malgré ces analogies,
il y a des différences; aussi, si dans l'état actuel de nos connaissances,
les Myxosporidies peuvent être classées parmi les Sporozoaires, ce
n'est pas sans une certaine réserve, et il convient de les étudier
encore avant de les comparer d'une manière rigoureuse aux autres
types do cette famille.
Examinons maintenant ces organismes au point de vue des maladies
qu'ils produisent. Contrairement aux Grégarines et aux Coccidies ,
qui sont localisées dans certaines parties du corps de leur hôte, le foie,
le tube digestif, plus rarement dans les organes d'excrétion, le rein,
^|es tubes de Malpighi des Insectes, etc., les Myxosporidies se répandent
dans presque tous les organes, les plus profonds comme les plus super-
ficiels : la peau , où les Psorospermies ont été vues d'abord par Gluge,
dans les kystes cutanés de l'Epinoche, la rate, le rein, la vessie nata-
toire et même le cœur et l'ovaire. En un mot, les Myxosporidies sont
des parasites cosmopolites, tandis que les autres Sporozoaires sont
localisés. Ce cosmopolitisme, elles le partagent avec la dernière classe
qui nous reste à examiner, les Psorospermies des Insectes, auxquelles
on n'a pas encore donné de nom, mais que je crois devoir ranger
parmi les Sporozoaires : tels sont les corpuscules de la pébrine. On
trouve les Myxosporidies jusque dans les cellules des canalicules uri-
nifères, dans les jeunes follicules de Graaf, qu'elles transforment eu
U8 LES SPOROZOAIRES.
une poche remplie de Psorospermies. Gomme, en même temps , elles
se multiplient avec une activité prodigieuse , il en résulte que les
animaux ainsi infestés présentent des troubles graves et peuvent
même périr.
Certains états morbides des Poissons doivent sans doute être attri-
bués aux Myxosporidies, Tel est le cas de cette Merluche observée
par J. Millier, et qui était remarquable par une maigreur extraor-
dinaire. J'ai, pour ma part, rencontré souvent des Gardons, des
Tanches et d'autres Poissons que la présence de ces parasites avait
réduits à un état cachectique, caractérisé par la décoloration des tissus,
la destruction des globules sanguins rouges, l'augmentation des globules
blancs : c'était une véritable leucocythémie. Il n'est donc pas surpre-
nant que cette maladie puisse causer de grands ravages parmi les
Poissons, surtout les jeunes, qui en sont plus souvent affectés. Cepen-
dant, cette cause n'est pas indiquée parmi celles qui font périr les
Poissons. Cela tient d'ailleurs à une raison bien simple : quand la
maladie règne, on cherche d'abord, pour l'exphquer, ce qu'il y a de
plus gros, et le plus ordinairement ce sont les Helminthes, que Ton
accuse. C'est ce qui est arrivé lors de l'épidémie qui a sévi, il y a quel-
ques années, sur les Tanches, dans les étangs des Dombes ; c'étaient
des Ligules qui entravaient la digestion , et les Poissons mouraient
d'inanition. Mais on ne songe pas,. le plus souvent, aux causes mi-
croscopiques. Aujourd'hui, cependant, on pénètre davantage dans
l'intimité des tissus pour y rechercher les lésions qui expliquent les
phénomènes morbides. Pour moi, je crois que si l'on cherchait plus
souvent, on arriverait à trouver plus souvent aussi des lésions micros-
copiques , et l'on expliquerait la mortalité qui sévit sur les jeunes
Poissons, et particulièrement sur ceux qui vivent sur les fonds maré-
cageux et la vase. En effet , outre les espèces que j'ai déjà signalées
d'après mes propres travaux et d'après ceux d'autres observateurs , il
en est beaucoup d'autres qui renferment des Psorospermies, et il n'est
pour ainsi dire pas une seule espèce de Poisson où je n'aie trouvé
une Psorospermie d'une forme particuhère et spéciale. Par contre,
LES MYXOSPORIDIES. 449
jamais je n'en ai iroiivé sur les Salmonidés de nos bassins de
pisciculture du Collège de France , souvent atteints , en revanche ,
par un autre Protozoaire, un Inlusoire cilié parasite, Y Ichihyophtirius
multiflliis (1).
(1) A la fin de l'hiver de 1883, un autre Infusoire, un Flagellé d'espèce nouvelle, a fait
de grands ravages parmi nos jeunes alevins de Truite et de Saumon : c'est le Bodo necator,
dont M. Henneguy, préparateur du cours, a donné la description dans les Co.nptes rendus
de l'Acad. des sciences du 5 mars 1883. — Sur Y Ichthyophliriu^ multifiliis, voir la note
de M. Daniel Fouquet dans les Archives de Zoologie expérimentale^ t. v. 18"Ï6.
450 LES SPOROZO AIRES.
LES PSOROSPERMIES DES ARTICULES
ou MICROSPORIDIES
Il me reste à examiner un dernier groupe, une dernière famille de
Sporozoaires, mais j'avoue que je ne sais au jusle quel nom lui donner,
et pour vous faire comprendre mon embarras , il me suffira de vous
retracer l'historique de nos connaissances sur ce sujet.
En 1853, Leydig (Zeitschrift f. loiss. Zool., t. V) signala dans le
Coccus hesperidum , Insecte hémiptère bien connu des horticulteurs
et que l'on trouve dans toutes les serres , des corpuscules brillants ,
ovalaires , libres , très réfractaires aux réactifs chimiques , acide
acétique , soude caustique , etc. Il les avait rencontrés dans la cavité
du corps et, sans décrire chez eux aucune organisation, il les compai^a,
pour l'aspect, aux pseudonavicelles des Grégarines, et ne leur donna
pas de nom particulier.
De 1855 à 1863, il retrouva ces corpuscules chez beaucoup d'autres
Articulés, des Araignées, une Abeille, une Tipule des prés, des
Crustacés (Daphnia). Ces corpuscules, semblables aux précédents,
étaient répandus dans tous les organes du corps et présentaient la
même résistance aux réactifs. Leydig revient sur leur ressemblance
LES MIGROSPORIDIES. i^i
r
avec les pseudonavicelles ou les Psorospermies, c'est le terme dont il
se sert, car on doit se rappeler que Leydig et Lieberkiihn désignaient
sous le nom de Psorospermies les pseudonavicelles des Grégarines.
D'ailleurs Leydig considérait ces corpuscules comme des végétaux.
Pendant ce temps, d'autres auteurs les trouvaient dans les animaux
les plus différents : Hermann Munk, dans le tube génital de V Ascaris
mystax, un Ver nématoïde ; Bischoif , chez ces mêmes animaux , et
cet auteur commit même, à ce sujet, une erreur restée célèbre dans
la science, car, à un certain moment , il prit ces petits corps pour les
corpuscules séminaux des Nématoïdes. Une discussion importante
s'était alors élevée entre les naturalistes relativement aux éléments
fécondateurs des Nématoïdes : c'est dans cette discussion que BischolBF
intervint avec un fait faux en représentant les corps qui nous occupent
comme des corpuscules séminaux. Vlacovicli , professeur à Padoue,
les trouve chez un Reptile , le Coluher carhonarius et les signale
encore chez un Insecte orthoptère , le Grillus campesiris ou
Grillon des champs ; Lebert et Frey, chez un Insecte coléoptère,
VEmus olcns. Mais le fait le plus important fut la rencontre de ces
corpuscules chez les Vers à soie, alors décimés par une cruelle mala-
^-4i€ qui dévastait les magnanneries de l'Europe entière, la galtina des
Itahens , qu'on appelait en France pèbrine , maladie des petits , à
cause de la petite taille qu'atteignaient les individus malades , êtisie, et
plus récemment maladie corpiisculeuse (Pasteur).
Rien de plus différent que les opinions des auteurs sur la
nature de cette maladie, et ceux qui ont signalé la présence des
corpuscules chez le Ver à soie sont très nombreux : Gornalia, Filippi,
Ciccone, Vittadini, etc. On les appela alors corpuscules de Cornalia ou
corpuscules vibrants , en raison d'un mouvement d'oscillation très
remarquable dont ils sont animés et qui n'est qu'un mouvement
brownien. De tous côtés on se mit à les étudier : les Italiens les
considéraient comme résultant d'une métamorphose régressive des
cellules, et toile était aussi l'opinion de Chavannes , (de Lausanne),
qui les prenait pour les nucléoles des globules sanguins détruits.
432 LES SPOROZOAIRES.
Guérin-Méneville, qui avait été chargé par le gouvernement français
d'étudier la maladie, considéra les corpuscules comme des hèma-
tozoïdes parasites du sang ; Nsegeli , de Munich , en fit des Champi-
gnons schizomycètes , le genre Nosema , et ceux des Vers à soie
furent le Nosema bombycis. Pour Lebert, de Breslau, c'était aussi
un végétal, une Algue unicellulaire, le Panhisiophylon ovatum.
E. Hallier, d'Iéna, les désigne comme les stylospores d'un Champi-
gnon très commun, qu'on rencontre sur des plantes très diverses, le
Pleospora herbaru7n , opinion combattue par Gibelli , Maestri et
Colombo , qui nourrirent des Vers à soie avec des feuilles infectées
de Pleospora sans que ces Vers contractassent jamais la pébrine.
D'autre part, les corpuscules eux-mêmes n'ont jamais présenté de ger-
mination, et, cette observation négative , je puis la confirmer , car j'ai
eul'occasion de la faire : jamais les corpuscules ne germent comme
ils le feraient s'ils représentaient les spores d'un Champignon.
M. Pasteur a beaucoup varié dans son opinion sur ces corpuscules.
D'abord il les avait assimilés à des cellules cancéreuses , mais en 1866
{Comptes rendus de V Académie des Sciences), il les regardait comme
des productions ni animales ni végétales, incapables de se reproduire
et qu'il fallait ranger « parmi ces corps réguliers de formes que les
physiologistes distinguent sous le nom (Vorganites », et il cite comme
appartenant à cette classe les globules du sang , les globules du pus ,
les grains d'amidon et les spermatozoïdes. C'est là , certainement ,
une définition qu'un biologiste n'eût pas donnée.
En 1870 (Études sur la maladie des vers à soie), il se range à
l'opinion de Leydig et classe les corpuscules de la pébrine parmi les
Psorospermies. En faisant cette assimilation, Leydig avait dit lui-même
qu'il ne cédait qu'à une simple impression relativement à la ressem-
blance de ces êtres, et, en effet, il ne s'était pas assuré le moins du
monde de la nature psorospermique des corpuscules ( Miiller's Archiv
1863). Cependant, dès 1867, je publiais plusieurs Mémoires, d'abord dans
les Comptes rendus de r Académie des Sciences , puis un peu plus
étendus et accompagnés d'une planche dans le Journal de VAnatomie
LES MICROSPORIDIES. 453
de Ch, Robin , et j'apportais , je crois , la première démonstration de
la nature psorosperraiqiie de ces corps par des preuves tirées de
leur mode de développement absolument ignoré jusque-là. Néanmoins,
M, Pasteur , ses élèves et ses partisans continuent à attribuer la
découverte de la vraie nature des corpuscules pébrineux à Leydig qui
n'a fait que la soupçonner et n'en a pas donné la moindre preuve.
Je pourrais demander à M. Pasteur pourquoi il a attendu jusqu'en
1870, et jusqu'à ce que je sois venu confirmer l'idée de Leydig,
pour se ranger à l'opinion de l'auteur allemand ? — Et alors pourquoi
n'emploie-t-il pas le nom de Psorospermies et use-t-il constam-
ment du mot corpuscules qui n'a rien de scientifique et qu'il faut
bannir de la science ; mot qu'on était en droit d'employer quand
on n'avait pas de connaissances sur la nature de ces corps, mais qu'il
faut abandonner, aujourd'hui qu'on sait , grâce à mes observations,
que ce sont des Psorospermies. — Et encore ce dernier nom est-il
maintenant trop vague , puisqu'il s'applique à des Grégarines , aux
^Psorospermies des Poissons, aux Coccidies et aux Psorospermies
ut^'iculiformes des muscles. Il désigne aujourd'hui trop de choses pour
servir encore à désigner une chose nouvelle, les corpuscules des Vers
à soie malades. D'ailleurs, ceux-ci n'appartiennent à aucun des groupes
que nous avons étudiés ; il faut donc créer un autre terme , et je
propose, pour la première fois, le nom de Migrosporidies. La raison
qui m'a porté à créer cette nouvelle dénomination est fondée sur un
caractère physique, savoir, l'extrême petitesse de ces organismes.
-154 LES SPOROZO AIRES
II
Nous venons de voir combien les auteurs diffèrent d'opinion sur la
nature des corpuscules des Vers à soie malades de la pébrine, ainsi que de
ceux de beaucoup d'autres animaux. Insectes, Arachnides, Crustacés.
Nous devons ajouter au nombre de ces animaux un Ver cestoïde , le
Tœnia expansa des Ruminants, chez qui ils ont été vus par M. Monniez,
(Bull, scient, du département du Nord, 1879). Stein a été jusqu'à
les trouver chez les Infusoires , mais inconsciemment. Il représente
dans son grand ouvrage des Stentor Rœselii avec un noyau frag-
menté , tandis qu'il est ordinairement rubané (1). Les fragments sont
hypertrophiés sous l'influence des parasites, et bourrés do petits cor-
puscules tout à fait analogues, d'après les figures et les descriptions
de Stein, à des productions parasitaires. Et ces fragments, écrasés
sous le microscope , montraient ces corpuscules ovalaires , brillants ,
tout à fait semblables à ceux de la pébriiie. Stein pensait d'abord avoir
affaire à des spermatozoïdes , mais il a fini par reconnaître qu'il se
trouvait en face de parasites dont la nature lui était inconnue , mais
je ne doute pas que ce ne soit des Microsporidies.
Ces productions sont donc très répandues, mais c'est chez les Articulés
et surtout les Insectes qu'on les trouve le plus fréquemment, ce qui jus-
tifie le nom de Psoro.spermies des Insectes qu'on leur a donné quelque-
fois. Nous avons vu que ce nom de Psorospermies est devenu trop vague
aujourd'hui , car il s'applique à plusieurs groupes de Sporozoaires et à
leurs corps reproducteurs. Aujourd'hui donc , je pense que le besoin
de leur coordination systématique se fait sentir et qu'il convient d'ap-
porter un peu d'ordre dans la classification de ces êtres. Ainsi , nous
avons désigné les uns , avec Leuckart, sous le nom de Coccidies;
(1) Der Organismus der Infusionsfhiere.. 2" partie, ISG"?, pi. VIII, fig. 13 etl i
LES MICROSPORIDIES. -155
r
Bûtschli a désigné sous celui de Myxosporidies les Psorospermies des
Poissons; j'ai proposé précédemment le nom de Sarcosporidies pour
les Psorospermies des muscles, et pour justifier celui de Microspori-
DiEs pour les parasites psorospermiques des Insectes, je me base, pour
établir cette désignation , sur l'extrême petitesse de ces organismes ,
qui sont les plus petits de tous les Sporozoaires, car ils ne mesurent
pas plus de 4 [X de long sur 2 [x de large. Vlacovich a calculé le volume
d'un seul de ces corpuscules et a trouvé 67 mille millionièmes de milli-
mètre cube : 0"""000000067, c'est-à-dire que pour occuper l'espace d'un
millimètre cube il faudrait plus de quatorze millions de ces organismes.
Si on 'es compare aux autres Sporozoaires, par exemple aux Coccidies,
on trouve que celles-ci sont de véritables colosses, car les spores du
Coccidium ovifornie du Lapin, par exemple, ont une longueur de 18 {a
sur 9 IX de largeur.
Cette taille si minime rend très difficile l'observation de la structure
intime de ces productions. Elles sont certainement formées d'une
membrane d'enveloppe et d'un contenu , bien qu'il soit impossible de
les distinguer à cause de la très faible différence de leur pouvoir
réfringent, mais au moment de la reproduction, le contenu s'échappe
et , alors , on peut reconnaître la présence de la membrane qui forme
un petit sac vide à double contour.
La surface de ces spores est absolument lisse et saris détails de
structure , même sous le plus fort grossissement. Leydig , avec un
grossissement considérable , a cru reconnaître une ligne saillante
allant d'un pôle à l'autT'e du corpuscule. J'avais cru aussi , dans
le principe , reconnaître cette ligne, et j'en avais conclu que ces
Psorospermies présentaient une structure bivalve comme celles des
Poissons. Aujourd'hui, je crois que j'ai été victime d'une erreur
d'optique, d'autant plus que, quand la spore s'est vidée , ce n'est pas
par l'écartement des valves , mais par un orifice qui s'ouvre à l'un
des pôles.
Quelques auteurs ont signalé la présence d'un noyau dans les
Psorospermies de certains Arthropodes. Leydig l'a décrit chez celles
156 LES SPOROZOAIRES.
du Daphnia rectirostris. Munk , chez les Psorospermies de Y Ascaris
wystax , a vu aussi une tache claire qu'il suppose un noyau. Mais ces
faits sont très douteux.
M. Pasteur distingue, chez le Ver à soie , plusieurs variétés de
corpuscules. D'abord, des corpuscules ovoïdes , brillants , homogènes ,
qui ne présentent rien de bien appréciable dans leur intérieur. Il les
considère même comme des organismes caducs , décrépits et inca-
pables de reproduction. Puis, des corpuscules en forme de gourde,
étranglés au milieu , ou de poire , beaucoup plus pâles , formés d'une
enveloppe à double contour et d'un contenu dans lequel sont deux ou
trois petites granulations , ou même davantage , qu'il appelle des
granulins. Nous verrons quel rôle il leur fait jouer. Ces corpuscules
piriforraes, pâles, sarcodiques, sont pour lui des organismes jeunes et
seuls capables de se multiplier. Nous reviendrons sur ce sujet.
J'ai observé aussi des corpuscules piriformes associés à d'autres et
qui paraissaient présenter quelque chose comme un no3'au , mais en
les examinant de plus près , on reconnaît une simple vacuole placée
vers l'une des extrémités ou vers les deux extrémités (PI. V,fig. 1, ô, c.)
Je ne considère pas ces corpuscules comme des formes parfaites mais
comme des spores en voie de développement; du reste, je n'ai jamais
vu trace de noyau. On pourrait cependant, par analogie, conclure à
l'existence de ce noyau , car on sait combien ce petit élément est dif-
ficile à distinguer dans les spores beaucoup plus volumineuses des
Goccidies et des Grégarines.
Quant à l'action qu'exercent les substances chimiques sur ces
corpuscules, tous les auteurs sont d'accord pour reconnaître l'extrême
résistance que ceux-ci présentent, même aux réactifs les plus concen-
trés. Leydig, le premier, a signalé cette résistance. D'après Vlacovich,
quand on fait subir à ces corps un traitement par des acides, puis par
une solution alcoolique d'iode, ils prendraient une coloration violette,
d'où Vlacovich a conclu que leur enveloppe, au moins, est formée par
une substance analogue à la cellulose végétale, mais le fait n'a pas été
confirmé. M. Pasteur a reconnu aussi l'extrême résistance aux agents
LES MICROSPORIDIES. -157
chimiques que présentent les corpuscules ovoïdes brillants qu'il consi-
dère comme des formes âgées et caduques, tandis que les corps
piriformes, jeunes et prolifiques, sont plus facilement attaquables par
les réactifs. Il a vu que l'eau iodée contracte leur contenu et leur
donne un aspect vacuolaire ou granuleux.
Tels sont les principaux caractères de ces Microsporidies quand on
les examine en dehors de l'organisme de l'Insecte. Voyons maintenant
comment elles se comportent en présence des tissus de l'animal
vivant.
La meilleure méthode pour suivre le développement des Microspo-
ridies du Ver à soie consiste à faire ingérer des corpuscules à des
Vers bien sains. Il y a pour cela un moyen fort simple. C'est de délayer
dans de l'eau des spores prises dans un papillon de Ver à soie corpus-
culeux que l'on broie dans un mortier et dont on fait une bouillie avec
p laquelle on badigeonne des feuilles de mûrier. On présente celles-ci
aux Vers sains qui les acceptent assez bien. Au bout de très peu de
jours les Vers à soie sont infestés. On trouve d'abord les corpuscules
dans l'intestin. Ingérés avec les feuilles de mûrier, ils sont , en effet ,
d'abord en contact avec la paroi de l'intestin. Cette paroi est consti-
tuée, à l'intérieur, par une cuticule extrêmement fine , anhisto , sans
solution de continuité. Sous la cuticule est la couche épaisse des
cellules épithéliahîs , recouverte elle-même de deux couches muscu-
laires, l'une à fibres transversales , l'autre à fibres longitudinales.
Enfin vient la membrane séreuse qui tapisse l'intestin au dehors. Au
bout de quelques jours , les corpuscules ont franchi la cuticule et
on les trouve dans les cellules épithéliales et même dans les tuniques
musculaires.
Pour faire cette expérience, il faut opérer sur des Vers très jeunes
et ayant, au plus, quelques millimètres de long, sans quoi on ne pour-
rait qu'avec beaucoup de peine examiner le tube digestif dans toute
sa longueur. Dans ces conditions, même, je n'ai pas pu découvrir le
mécanisme de la pénétration des corpuscules à travers la cuticule.
i|;;g LES SPOROZOAIRES.
Mais en examinant ce qu'ils sont devenus dans les cellules épithéliales,
et mieux encore, dans les tuniques musculaires, j'ai aperçu des petites
masses sarcodiques, de volume très variable, ordinairement allongées
dans la direction des fibres longitudinales. Les plus petites dépassent à
peine le volume d'un corpuscule ; d'autres sont plus ou moins volu-
mineuses , mais toujours dirigées dans le sens longitudinal , dans
l'interstice des fibres musculaires. Ces petites masses sarcodiques sont
la matrice des corpuscules et l'on peut les comparer aux Myxosporidies
des Poissons. En effet , on voit d'abord apparaître dans ces masses
sarcodiques , quand elles ont pris une certaine dimension en absorbant
les sucs nutritifs ambiants, de petits globules pâles qui grossissent et
se transforment en corps ovalaires ou piriformes , mais toujours plus
larges que les corpuscules mûrs. Ce sont les jeunes spores. Dans ces
spores, on voit se former une ou deux grandes vacuoles pâles, puis,
les spores se condensent , prennent plus de consistance , les vacuoles
s'effacent, et tout le sarcode disparaît , absorbé par les éléments qui se
sont formés dans son sein. 11 ne reste alors qu'un petit amas de spores
mûres qui s'éparpillent dans tous les sens , en raison de ce que la
masse sarcodique disparue ne peut plus les retenir. Ils vont donc se
développer ailleurs en d'autres masses sarcodiques, et c'est ainsi
que l'organisme tout entier du Ver se remplit de proche en proche de
Microsporidies.
LES MICROSPORIDIES. 159
III
Comment naissent ces petites masses sarcodiques ouMicrosporidies?
Dans mes premières recherches, en 1866,j'avais cru que les corpus-
cules, au contact des tissus du Ver, subissaient comme une sorte de
ramollissement et se transformaient en un petit globule de sarcode homo-
gène qui prenait ensuite la forme d'une petite amibe. Celle-ci allait en
grossissant et, parvenue à une certaine dimension, donnait naissance,
par génération endogène, h des corpuscules qui recommençaient le
cycle des phénomènes. Mais j'ai observé plus récemment sur l'Atiacus
Pernyi que les Microsporidies ne se forment pas de cette manière, mais
Wr un procédé qui présente beaucoup d'analogie avec celui qui produit
les Myxosporodies des Poissons. Nous avons vu que celles-ci ne sont
que le contenu sarcodique de la spore qui s'échappe sous forme d'A-
mibe, grossit aux dépens des tissus ambiants et forme ces masses
gélatineuses dans lesquelles se produisent de nouvelles spores. Ce sont
les mêmes faits que j'ai observés, il y a deux ans, pour les Microspo-
ridies des Insectes. Les spores s'ouvrent non pas par l'écartement de
deux valves, mais elles se percent par un bout et le contenu s'échappe
sous la forme d'un petit globule qui se meut par des mouvements ami-
boïdes. Comment a lieu l'ouverture de la spore? Par dissolution locale
de la membrane d'enveloppe ou par un micropyle préformé ? La peti-
tesse de ces éléments rend l'observation du processus trop difficile
pour qu'on puisse répondre à cette question. Après la sortie du contenu
l'enveloppe de la spore se présente comme une membrane à double
contour très net (PI. V, fig. 2).
On pourrait objecter, avec quelque apparence de raison, que j'ai pu
confondre ces spores de Microsporidies avec des spores de Schizomy-
cètes, de Bacillus, par exemple, qui ont un mode de germination tout
<60 LES SPOROZOAIRES.
à fait analogue. Chez certains Bacillus, en effet, les spores, au mo-
ment de germer, s'ouvrent aussi, par une extrémité et le contenu
s'échappe ; mais il y a des caractères qui permettent de distinguer les
spores des Bacillus et celles des Microsporidies : d'abord, le volume.
Les spores do Bacillus sont beaucoup plus petites et les plus volumi-
neuses, celles du Bacillus ou Clostridium amylobactcr, ne mesurent
que 2 [X à 2, 5 }i de long sur 1 ijl de large. De plus, dans la spore de
Microsporidie , le contenu sort comme une petite masse irrégulière,
amiboïde , tandis que dans la spore de Bacillus , le contenu afiecte au
moment de sa sortie la forme d'un bâtonnet cylindrique ; celui-ci bientôt
s'allonge et se divise en nombreux articles qui tantôt se séparent les
uns dos autres, tantôt restent contigus et forment un filament plus ou
moins long.
D'ailleurs, je n'ai jamais observé de Schizomycète, Bacillus ou autre,
chez les AUacus Pernyi même les plus malades de la pébrine , et
jamais je n'ai trouvé, chez cette espèce, de coïncidence des parasites
de cette dernière maladie avec les parasites de la flacherie.
Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que, d'après les phénomènes
de leur reproduction et de leur développement, les parasites de la
pébrine, maladie engendrée précisément par l'abondance de la pro-
duction des corpuscules, sont de véritables Psorospermies, comme j'ai
essayé de l'établir dès 1866. Mes observations sont donc les premières
qui aient donné une base certaine à l'opinion de Leydig, et M. Pasteur
les pouvait juger autrement qu'en disant que j'ai fait connaître le premier
en France la manière de voir de l'observateur allemand (^^i^c/es sur la
maladie des vers à soie, t. I, p. 30). M. Pasteur a d'ailleurs cherché
aussi à étudier le développement des corpuscules de la pébrine et est
arrivé à des résultats bien difierents. L'exposition n'en est même pas
facile k comprendre et déroute les biologistes qui y cherchent des
analogies avec les phénomènes que présentent les organismes connus.
Pour M. Pasteur, les corpuscules ovoïdes, brillants, qu'on rencontre
par milliers dans les Vers à soie pébrineux seraient, comme nous l'avons
dit antérieurement, des formes caduques, décrépites et incapables de
LES MICROSPORIDIES. m
t
se reproduire ; il les compare aux globules rouges du sang dos Verté-
brés , aux globules du pus, et les désigne sous le nom à'organiies. Et
à ce propos, je dois vous donner quelques explications sur ce terme
à'organiies que l'on rencontre quelquefois dans différents ouvrages
où il est pris dans des acceptions très diverses. 11 a été créé par Serres,
en 1842, pour désigner les parties de l'embryon qui se réunissent pour
former un organe chez l'adulte : par exemple, les trois pièces qui com-
posent l'os iliaque ou celles qui forment les autres os. Tel est le sens
attribué par Serres à ce terme, et c'est toujours ainsi qu'on l'entend en
anatomie comparée et en embryologie. Mais, plus tard, on a désigné
sous ce nom tantôt les globules du sang, tantôt les éléments anato-
miques en général (1). C'était déjà inutile, mais M. Pasteur lui donne
encore des significations nouvelles et l'applique aux globules du sang
et du pus, aux grains d'amidon, aux spermatozoïdes, aux corpuscules
des Vers à soiepébrineux, c'est-à-dire aux choses les plus hétéroclites.
'C'est donc là un mot qu'on doit rejeter de la science, à moins de le
restreindre au sens pour lequel Serres l'avait créé. — Mais revenons
à notre sujet.
Les corpuscules seuls capables de se reproduire, d'après M. Pasteur,
sont ceux qu'il appelle cellules et corpuscules piriformes; les pre-
miers sont arrondis, les seconds en l'orme de poire ou de gourde.
Ces derniers sont pâles, ternes, « sarcodiques « ; ils se détruisent faci-
lement par les réactifs, l'eau iodée, par exemple, qui les contracte et
fait apparaître , dans leur intérieur, une ou plusieurs granulations
mûriformes que M. Pasteur désigne sous le nom de granulins ou de
nucléoles, et qu'il considère comme les germes des corpuscules. Quant
aux éléments qu'il appelle cellules, on ne sait trop pourquoi, car il y a
dans toute cette description un abus de termes évident, ils représen-
tent des formes encore plus jeunes. Ces cellules produisent aussi des
granulins et ceux-ci se transforment dans la cellule mère en autant de
(1) Milne Edwards, Leçons sur la physiolo<jie et t' anatomie comparée de l'homme et
des animaux, 185"— 1881.
11
462 LES SPOROZOAIRES.
corpuscules nouveaux qui, devenus libres à l'état sarcodique, se multi-
plient par scission transversale et prennent enfin l'aspect de corpus-
cules ovoïdes, brillants, caducs.
M. Pasteur paraît admettre aussi que , dans certaines conditions, les
granulins, au lieu de se développer dans l'intérieur du corpuscule mère,
s'échappent par un orifice de la paroi et c'est dans les tissus du Ver que
s'opère leur transformation en corpuscules bien développés. Quelle
est la nature de ces granulins ? M. Pasteur ne le dit pas : il les appelle
aussi quelquefois nucléoles, ce qui ne rend pas sa description plus
claire, — au contraire. Comment s'opère cette transformation des gra-
nulins, soit dans les cellules mères, soit dans l'organisme du Ver, après
qu'ils sont mis en liberté ? Par un simple gonflement du granulin ou
par un dépôt de matière à sa surface. — Ce qui manque surtout pour
l'intelligence de ces phénomènes, ce sont des termes de comparaison
permettant de les rattacher à des phénomènes analogues qui se produi-
sent chez d'autres organismes. On ne sait, en efiet, quel est le mode de
développement observé chez d'autres êtres vivants, auquel on puisse
comparer ce que M. Pasteur a décrit ; tout au plus peut-on rapprocher
ces faits de ce que certains auteurs ont observé chez quelques Proto-
zoaires. On se rappelle que Stein a vu s'échapper du corps de certains
Flagellés enkystés des granules qu'il considère comme des spores et
qui se développent au dehors en nouveaux Flagellés. On aurait vu
aussi, do l'intérieur de quelques Rhizopodes, sortir de petites spores,
se développant en nouveaux indiviflus. Mais, outre que ces faits sont
encore très problématiques, les Microsporidies ne ressemblent en rien
à des Flagellés, non plus qu'à des Rhizopodes.
Les faits décrits par M. Pasteur s'éclairent, au contraire , d'un nou-
veau jour, quand on les interpréta à la lumière de mes observations.
En efi"et , ces corpuscules pâles , sphériques ou piriformes , qui , pour
M, Pasteur, sont la forme fertile et reproductrice du parasite, sont mes
corpuscules en voie de développement. C'est sous cette forme qu'on
les voit apparaître d'abord dans les masses de sarcode, et, une fois
mûrs, ils deviennent les corpuscules ovoïdes brillants. Ceux-ci repré-
LES MICROSPORIDIES. i(i3
sentent un état de maturation complète et non de décrépitude. Quant
aux granulins, quelle est leur signification? — Il est probable que
M. Pasteur a attaché une très grande importance à des éléments qui
sont loin déjouer le rôle qu'il leur a attribué. Sans doute ces granulins
ne sont autre chose que les granulations graisseuses qui se trouvent en
si grand nombre dans les masses sarcodiques formant la matrice des
spores chez tous les Sporozoaires . granulations graisseuses que l'on
voit aussi dans les jeunes spores. M. Pasteur leur a donc attribué une
importance exagérée.
Il décrit aussi une multiplication par division spontanée et su].pose
qu'avant de passer à l'état d'organismes caducs et décrépits, les cor-
puscules se multiplient par scissiparité. Or, j'ai publié un travail spécial
pour montrer quelle est la source de l'erreur commise par M. Pasteur
à ce sujet. J'ai montré (Comptes rendus de V Académie des Sciences,
1866) que ce que M. Pasteur a décrit comme une division est une
"~~coaloscence de deux corpuscules , ce qui résulte de leur mode de
développement au sein des masses plasmiques dans lesquelles des
corpuscules restent souvent accolés. Du reste , cette multiplication
des spores par scissiparité ne s'observe dans aucun autre groupe de
Sporozoaires.
Je crois qu'il est inutile de m'arrêter plus longtemps sur les obser-
vations de M. Pasteur, que je pense pouvoir caractériser d'un seul mot
en disant que leur auteur y prouve combien il est peu familier avec
les recherches de la biologie. Mais avec cette réserve , je rends
justice à ses travaux qui ont rendu aux sériciculteurs un réel service
en leur permettant de reconnaître une graine saine d'une graine
malade.
Quand la spore a Iranchi le tube digestif du Ver à soie, car c'est tou-
jours par là qu'elle s'introduit dans l'animal, le chemin lui est ouvert
pour pénétrer dans tous les organes, môme les plus éloignés du point
d'entrée. C'est ainsi que les parasites arrivent dans les glandes sérici-
gèneS; dont ils distendent les cellules et en forment des tumeurs toutes
iU
LES SPOROZOAIRES.
remplies de spores et de masses psorospermiques. (Fig. 48). Les vais-
seaux de Malpighi, les parois intestinales (Fig. 49), le corps graisseux,
tous les organes, en en mot, de la chenille, sont gorgés de corpuscules.
Pendant l'état de chrysalide, l'envahissement se continue et se propage
aux organes nouveaux qui appartiennent en propre au papillon, les
pattes, les ailes, les antennes, etc. — Le parasite pénètre jusque dans
la profondeur des organes de la reproduction, dans les faisceaux sper-
matiques, les gaines ovigères , les ovules (PI. V, fig. 5, 6, 7), où il va
infecter d'avance les nouvelles générations.
FlG. 48. — Portion delà glande séricigène
d'un Ver à soie envahi pai* djs Micro-
sporidies (d'après Balbiani).
Fig. 49 — Portion de Testomac d'une
chenille de Bombyx neuslria contenant
des Microsporidies à divers états de
développement (d'après Balbiani)
Ce n'est pas seulement chez le Ver à soie du mûrier que ces
corpuscules donnent lieu à une maladie très grave, qui a porté un très
grand préjudice h l'éducation de ces utiles insectes ; cette maladie
commence aussi à envahir les Eombycides nouveaux que l'on élève
comme succédanés du Ver à soie du mûrier. L'espèce qui remplit
peut-être le mieux ce rôle est YAitacus Pernyi. C'est une belle
chenille qui a l'avantage de se nourrir des feuilles de nos chênes
LES MICROSPORIDIES.
<6o
indigènes : son alimentation n'entraîne donc aucune dépense. Ses
cocons sont énormes et fournissent la soie la plus belle, la plus solide
après celle du Ver à soie ordinaire. On en fabrique déjà de très belles
étoffes, en grande quantité. VAtiacus Pernyi est complètement accli-
maté en Espagne et en Italie, et bien près de l'être aussi en France (1).
Malheureusement , cette chenille commence à être envahie par la
pébrine, que je crois avoir été le premier h signaler dans cette espèce
où je l'ai étudiée d'une manière assez approfondie. Les Microsporidies
qui donnent naissance à la maladie sont tout à fait semblables à celles
qu'on trouve chez le Bombyx du mûrier, seulement elles présentent
une particularité curieuse au point de vue pathologique : les parasites
restent toujours confinés dans l'estomac et ne vont jamais au-delà ,
même dans les organes les plus voisins. La présence des corpuscules
dans les cellules épithéliales de l'estomac donne lieu à une hypertro-
]phie de cette couche : le protoplosma des cellules disparaît presque
complètement et celles-ci sont réduites presque à la membrane d'en-
veloppe remplie de masses de parasites. (PL V, fig. 4).
FiG. 50. — Cellules vitellines d'un œuf
de Bombyx rrori renfermant des Micro-
sporidies. On voit , au centre de la
grande cellule , un seul noyau sphé-
rique et quatre noyaux dans la petite
cellule (d'après Balbianij.
Y\Q 51 . — Coupe de la paroi de l'estomac
d'un jeune Ver à soie montrant les
cellules épithéliales et la tunique mus-
culaire remplies de Microsporidies (d'a-
près Balbiani).
J'ai trouvé cette même localisation stomacale chez d'autres Insectes
d'ordres très différents , une Sauterelle, le Decticus griseus , par
(l; Voyez Balbiani , Rapport iwr la Sériciculture nouvelle, dans les Rapports du Jury
international de V Exposition universelle de ]8'78.
-166 LES SPOROZOAIRES.
exemple (1). Les espèces sauvages sont souvent victimes d'épidé-
mies de pébrine , mais , comme elles vivent isolément , la marche
de la maladie est beaucoup plus lente que chez les Vers à soie ,
qui sont accumulés par milliers dans les magnaneries. On peut ,
d'ailleurs, communiquer la pébrine h d'autres Insectes en leur faisant
absorber des spores de Microsporidies av(^c les aliments, et il suffit
quelquefois, pour les infecter, d'un seul repas. Il y a , du reste, une
espèce qui s'infecte encore plus vite que le Ver à soie , c'est le
Bombyx neustria, vulgairement appelé la Livrée. Les excréments
des Vers à soie , souillés de spores , mis en contact avec les feuilles
fournies aux chenilles de cette espèce, suffisent pour infecter celle«;-ci
(fig. 48). D'autres espèces sont, au contraire, plus résistantes à l'infec-
tion ou môme paraissent absolument réfractaires. Ainsi, je n'ai jamais
réussi à communiquer la pébrine à un autre Bombycide, le Liparis
chri/sorrhœa, vulgairement Cul-brun.' Chez ces espèces , les corpus-
cules ne traversent jamais la cuticule qui double intérieurement
l'estomac , par conséquent , n'apparaissent pas même dans les cellules
épithéliales sous-jacentes. J'ai observé les mêmes résultats pour les
larves de Mouches, de Fourrais, chez les Vers de farine ou larves du
Tenebrio molitor. On avait eu l'idée, à un certain moment, d'utiliser
les corpuscules de la pébrine pour détruire le Phylloxéra, en répan-
dant dans les vignes les litières des magnaneries. Mais il aurait fallu
s'assurer d'abord si le Phylloxéra appartient à la catégorie des
animaux aptes à contracter la pébrine, et, de plus, trouver un
moyen de lui faire absorber des corpuscules solides, à lui qui passe
sa vie le suçoir enfoncé dans les racines de la vigne. Puis , comment
aurait -on pu distribuer les corpuscules dans toute la terre d'un
vignoble? — Mais hâtons-nous d'ajouter que cette* idée paraît aban-
donnée. Elle était, du reste, jugée d'avance, car depuis longtemps on
(1) J'ai constaté récemment (1883), chez le Ver à soie du mûrier, une forme de pébrine
caractérisée aussi par le développement exclusif des Microsporidies dans les cellules
épithéliales de l'estomac. Voyez, sur ces parasites, chez VAtlacas Pemyi, ma Note dans
les Comptes rendus du 4 décembre 1882.
LES MICROSPORIDIES. 167
se sert , dans les pays où l'on élève les Vers à soie, des litières des
magnaneries pour fumer les vignobles,, et cette pratique n'a eu aucune
influence sur le Phylloxéra , puisque c'est précisément dans cette
région que le Phylloxéra a fait sa première apparition: les départements
du Gard, de Vaucluse, de l'Hérault.
Voulez-vous avoir une idée de la marche rapide de la maladie
psorospermique des Vers à soie, en France, et des ruines qu'elle y a
causées ? Il vous suffira de savoir qu'elle a débuté dans le département
de Vaucluse en 1845, et qu'en 1846 elle avait déjà envahi l'Hérault, le
Gard et la Drôme ; en 1849, l'Ardèche et l'Isère, et, en 1851, toutes les
Cévennes, c'est-à-dire la région où l'on élève le plus de Vers à soie. A
cette époque, tout ce pays était complètement ruiné et il ne restait
plus une seule magnanerie. En 1856, la production de la soie était
tombée au quart de son chiffre ordinaire. En 1854, l'Italie était envahie
-4)ar la pébrine et bientôt elle le fut d'un bout à l'autre.
Quant aux pertes occasionnées par la pébrine, M. de Quatrefages, en
1867, les estimait, pour la sériciculture française seule, à un milliard
au moins , depuis le début de la maladie en 1854 , c'est-à-dire pendant
une période de treize ans (1).
Cependant, depuis douze ou quinze ans, grâce à la méthode de
grainage cellulaire appliquée à des graines reconnues saines par le
microscope, méthode propagée par M. Pasteur, l'état des choses s'est
amélioré. Depuis l'emploi de cette méthode, qui s'est promptement gé-
néralisée en France, en Italie, en Allemagne, et même au Japon, l'in-
dustrie séricicole tend à se relever. C'est ainsi que nos excellentes
races jaunes, qui fournissaient la plus belle soie du monde entier, sont
en grande partie reconstituées et l'importation étrangère a diminué.
En effet, en 1869, les graines du Japon étaient importées pour 70 7o
pour l'approvisionnement des éducateurs français ; aujourd'hui, la pro-
portion n'est plus que de 20 °/o- Malheureusement, ces résultats tendent
(l) Rapports du Jury international de l'Exposition universelle de 1861, t. XII, 1868,
p. 429.
168 LES SPOROZO AIRES.
à être contrebalancés par le développement d'une autre grave maladie,
Idiflacherie, dont la nature est plus obscure et qu'il est plus difficile de
prévenir par les moyens prophylactiques.
Aces causes de dépérissement pour la sériciculture il faut, d'ailleurs,
en ajouter d'autres qui proviennent de conditions économiques nou-
velles pour l'industrie en France. D'abord, Taugmentation des frais
d'éducation. Ces frais montent aujourd'hui à 115 francs par once de
graine (de 25 à 30 grammes), pour la feuille de mûrier et la main-
d'œuvre, tandis qu'autrefois ces dépenses ne s'élevaient qu'à 85 francs.
Cette différence constitue une perte sèche même avec la production
moyenne de 19 kilog. de cocons par once de graine qu'on récoltait
autrefois. Pour équilibrer les frais, il faudrait que cette production
s'élevât à 23 kil. au moins.
11 y a malheureusement encore à ajouter la concurrence des soies
d'Orient, concurrence très active depuis l'ouverture du canal de Suez
qui facilite l'importation de ces marchandises nouvelles Puis, la dimi-
nution de la consommation de la soie : en effet, pour compenser la
perte sur la production , les fabricants surchargent la soie de matières
chimiques afin d'augmenter son poids , à ce point que pour une partie
de soie il y a quelquefois 40 parties de surcharge chimique. Il en
résulte que les étoffes de soie ainsi traitées se détruisent toutes seules,
même sur les rayons des magasins. Aussi le public s'en dégoûte et
préfère la laine et le coton, qui sont plus durables et plus solides.
Mais nous ne pouvons insister plus longtemps sur ces considérations
d'ordre économique que l'on trouvera traitées avec détails dans divers
ouvrages spéciaux et notamment dans l'excellent rapport de
M. E. Maillot sur V Exposition sèricicole de 1878.
NOTE ADDITIONNELLE.
169
NOTE ADDITIONNELLE
RELATIVE AUX RÉACTIONS MICROCHIMIQU^
DES SPOROZO AIRES.
L'impression de ce volume était presque terminée , lorsque je reçus
de M. le Professeur Vlacovich , de Padoue , une lettre dans laquelle
il me signala quelques inexactitudes que j'avais commises en parlant,
dans mes leçons sur les Sporozoaires , publiées dans le Journal de
Micrographie , de ses expériences sur les propriétés microchimiques
des corpuscules des Vers à soie. Ces faits étant rapportés sans chan-
gement dans le présent volume , je m'empresse de rectifier, dans
cette Note additionnelle , le passage concernant les observations de
M. Vlacovich.
Il y est dit que ce savant avait constaté que les corpuscules
prenaient une coloration violette après avoir été traités successive-
ment par les acides et une solution alcoolique d'iode , mais que le fait
n'avait pas été confirmé (voyez p. 156;. En réalité , pour obtenir cette
coloration, il faut, d'après M. Vlacovich, procéder de la manière
suivante : Les corpuscules sont placés d'abord pendant 48 heures dans
une solution concentrée de soude ou de potasse (26''/o de soude ou
32 °/o de potasse ) ; ils sont traités ensuite par une solution aqueuse
saturée d'iode ou une solution diluée d'iode dans l'iodure de potassium,
puis enfin par un acide minéral dilué ou un acide organique concentré,
tel que l'acide acétique cristallisable. En suivant les indications
de M. Vlacovich , j'ai pu effectivement me convaincre que les cor-
puscules prennent , sous 1 influence de ce traitement , une coloration
lie de vin ou même violette bien accentuée. M. Vlacovich me fait de
170 LES SPOROZOAiRES.
plus remarquer que cette coloration n'est pas attribuée par lui, comme
je le lui fais dire , à ce que la membrane d'enveloppe du corpuscule
est formée par une substance analogue à la cellulose végétale , mais à
l'existence d'une substance particulière imprégnant la membrane et
peut-être même le contenu , d'où elle sort en partie pour se répandre
par exosmose dans le liquide environnant. M. Vlacovich pense que
cette substance est la disamiline de Naegeli (1). L'opinion de l'hono-
rable professeur de Padoue sur le siège périphérique de la coloration
violette des corpuscules des Vers à soie ne me paraît pas devoir être
acceptée sans réserve. Si la question est difficile à trancher en raison
de ia petitesse de ces organismes et de l'impossibilité , au moins dans
les conditions ordinaires , d'y distinguer une enveloppe et un contenu ,
les observations faites sur d'autres Sporozoaires semblent démontrer
que c'est le contenu qui, sous l'action des réactifs , prend la coloration
violette. Ainsi, Kloss , chez le Klossia helicina , et Biitschli , chez la
GregatHna Blatlarum, ont constaté qu après le traitement par l'iode et
l'acide sulfurique, les granulations de l'endoplasme prennent une teinte
vineuse ou violacée , tandis que la membrane d'enveloppe n'offre rien
de semblable. Biitschli en conclut que les granulations endoplasraiques
sont formées par une substance plus ou moins analogue à la substance
amyloïde, ainsi que je l'ai rapporté dans le texte (p. 20) (2). J'ai pu
confirmer ces observations sur des Klossia qui se trouvaient dans
des Hélices rapportées dernièrement des Pyrénées. Je me suis assuré
que la coloration violette ne s'observe que sur les individus chez
lesquels le travail de sporulation n'a pas encore commencé , et que ,
dès que le contenu s'apprête à se diviser en sphères granuleuses ou
sporoblastes , la coloration cesse de se manifester. J'ai d'ailleurs
obtenu quelquefois celle-ci en employant seulement la potasse et
l'iode, sans addition d'acide. Mais, quel que soit l'état de développement
(1) Vlacovich, Sui corpu^coli oscillanti del Bombice del gelso , p 22 (Extrait des
Alti deW Istutito veneto di scienze, leltere ed arti, vol. XI . ser. III, 1861 ).
(2^ C'est par erreur que le travail de Biitschli est mentionné dans le texte comme se
trouvant dans l'Archiv f. rrùkr. Anal. 1876 ; il faut lire : Archiv f. Anal. u. Physiol. 1810.
NOTE ADDITIONNELLE. ^^^
de ces parasites , jamais l'enveloppe ne se colore ou elle prend seule-
ment une couleur jaune ou brune suivant le degré de concentration de
la solution iodée. Vlacovich a obtenu les mêmes résultats sur les
Psorospermies oviformes du foie du Lapin , où il a vu également le
contenu seul prendre, .«•ous l'influonce des réactifs, une teinte violette,
tandis que l'enveloppe restait incolore (1).
Dans la lettre qu'il m'a fait l'honneur de m'adresser, M. le professeur
Vlacovich revendique contre M. Pasteur la priorité de la distinction
des corpuscules des Vers à soie en corpuscules pâles et corpuscules
brillants {CorpuscoU pallidi e lucidi). Mais il rattache ces variations
dans les caractères optiques des corpuscules à des différences dans
leur structure et leur composition intime , sur lesquelles il me paraît
inutile d'insister, tandis que nous avons vu qu'elles se rapportent en
réalité à des états de développement différents ; les corpuscules brillants
représentant l'état de maturité complète, et les corpuscules pâles des
formes incomplètement développées. La cause de ces différences
d'aspect des corpuscules devait échapper à M. Vlacovich dans l'igno-
rance où il se trouvait des phénomènes de reproduction de ces
organismes : il croit , en effet , à leur multiplication par division et
admet , en outre, comme une simple hypothèse , leur reproduction par
des germes minimes qui se forment dans l'intérieur des corpuscules
adultes. A cet égard . ses idées ne sont donc pas plus exactes que
celles de M. Pasteur, et pour cette raison il est inutile d'insister sur la
réclamation qu'il élève contre ce dernier.
(1) Loç. cit., p. 14
FIN
TABLE DES MATIÈRES.
Pages.
Avant- Propos V
I. Les Grêgarines 1
L Généralités , historique 1
IL Structure intime et histologie 15
III. Classification 27
IV. Développement 30
V. Formation et émission des spores 45
II. Les Psorospermies oviformes ou Goccidies 69
I. Historique et classification 69
IL Accroissement et reproduction 74
HT. Développement et transmission 89
III. Les Psorospermies utricdliformes ou Sargosporidies. 106
I. Historique et organisation , 106
H. S)avco!i^ondie:i exlernes {Amœbidium parasîtïcum) . 116
IV. Les Psorospermies des Poissons ou Myxosporidies 120
I. Historique 120
IL Organisation. Forme des spores 125
HI. Développement 135
V. Les Psorospermies des Articulés ou Microsporidies . 150
I. Historique 150
IL Structure. Forme des spores 154
III. Développement. Considérations sur la pébrine 159
Note additionnelle 169
39772
TABLE DES FIGURES DANS LE TEXTE.
Pages.
Fig. i . — Gregarina giganiea ( d'après E . van Beneden ) 8
Fig. 2. — Géplialin de Geneiorhynchus Monnieri (d'après
A. Schneider)... 8
Fig. 3. — Céphalin de Hoplorhynchus oligacanthus — Bo-
thryopsis histrio — Dufouria agilis (d'après
A.Schneider) 11
Fig. 4. — CZeps/rfrm« 5/ai/arttm (d'après A. Schneider).... 13
Fig. 5. — Figures schématiques des quatre types de structure
des Grégarines (d'après A.Schneider) 18
Fig. 6. — Premières phases de l'enkystement de deux indi-
vidus conjugués de Clepsidrina Blatiaruin
( d'après Biitschli) 35
Fig. 7. — Deux phases plus avancées de l'enkystement
(d'après Bùtschli) 36
Fig. 8. — Formation des spores chez le Siylorynchus ohlon-
gaius [ d'après A. Schneider) 41
Fig. 9. — Kyste bien développé de Clepsidrina Blattarum
(d'après Biitschli) 42
Fig. 10. — Portion très grossie du bord d'un kyste au même
degré de développement (d'après Biitschli ) 43
Fig. 11. — Deux phases plus avancées de l'enkystement ( d'a-
près Biitschli ) 47
Fig. 12. — Kyste mûr de Clepsidrina Blaliarum ( d'après
Bùtschli) 48
ne TABLE DES FIGURES DANS LE TEXTE.
Pages
Fig. 13. — Portion basilaire renflée d'un sporoducte évaginé
( d'après Biitschli ) 49
Fig. 14. — Kyste du Camocystis tenax en voie d'émission des
spores ( d'après A. Schneider ) 51
Fig. 15. — Pseudonavicelles du Monocystis du Lombric à
trois stades différents du développement et
spore mûre de Clepsidrina Blatiarum ( d'après
Bûtschli) 53
Fig. 16. — Premières phases du développement de la Gréga-
rine géante du Homard [Porospora giganiea
Schn.) ( d'après E. van Beneden ) 59
Fig. 17. — Transformation de la pseudofilaire en jeune Gré-
garine ( d'après E. van Beneden ) 60
Fig. 18. — Dernières phases du développement de laGrégarine
géante ( d'après E . van Beneden ) 61
Fig. 18*'* — Développement du Clepsidrina Blattarum (d'après
BùtschU) 66
Fig. 19. — Oi^lhospora propria , du Trilon cristatus (d'après
A. Schneider) 76
Fig. 20. — Eime7Ha nova, du G^omem (d'après A. Schneider). 77
Fig. 21. — Eimer'ia falciformis , de la Souris (d'après Eimer). 78
Fig. 22. — Cyclospora glomericola (d'après A. Schneider)... 81
Fig. 23. — Isospora rara, de la Limace grise (d'après A.
Schneider) 83
Fig. 24. — Coccidium oviforme dans les cellules épithéliales
des conduits hépatiques ( d'après Balbiani ) 84
Fig. 25. — Coupe d'un foie de Lapin envahi pai' le Coccidium-
oviforme ( d'après Balbiani ) 84
TABLE DES FIGURES DANS LE TEXTE. 477
Pages.
Fig, 26. — Klossia helicina de V Hélix hortensis (d'après
Kloss) 99
Fig. 27. — Coccidium oviforme du foie du Lapin (d'après
Balbiani) 104
Fig. P8. — Tubes psorospermiques des muscles de Ja Souris
(figure de Miescher, reproduite d après Siebold). 107
Fig. 29. — Tube psorospermique du diaphragme du Porc ,
dont l'enveloppe est rompue sur un point
( d'après Manz ) 109
Fig. 30. — Psorospermies des muscles du Porc ( d'après
Leuckart ) 110
Fig; 31. — Psorospermies utriculiformes de l'Otarie (Olaria
californiana ) ( d'après Balbiani ) 111
Fig. 32. — Amœhidium parasiticum (d'après Cienkowski) . 117
Fig. 33 — Aûtœbidium parasilicum. — Zoospores libres et
enkystées ( d'après Cienkowski ) 117
Fig. 34. — Amœbidium parasiticum. - Spores enkystées en
voie de segmentation ( d'après Cienkowski) 117
Fig. 35. — Jeunes Amœbidium libres (d'après Cienkowski).. 117
Fig. 36. — Psorospermies de la Tanche ( d'après Balbiani ) 131
Fig. 37. — Psorospermies du Brochet (d'après Balbiani) 132
Fig. 38. — Psorospermies de la Perohe (d'après Balbiani)... 133
Fig. 39. — Psorospermies de l'Ablette (d'après Balbiani) \33
Fig. 40. — Psorospermies de V Acetina cernua (d'après
Balbiani) 133
Fig. 41. — Psorospermies de la Lotte (d'après Balbiani) 133
Fig. 42. — Petite masse amiboïde sortie d'une Psorospermie
de la Tanche ( d'après Balbiani) 137
12
478 TABLE DES FIGURES DANS LE TEXTE.
Pages.
Fig. 43. — Myxosporidies des nageoires de la Tanche avec des
spores ( Psorospermies ) en voie de développe-
ment (d'après Balbiani ) 138
Fig. 44. — Trois états de développement des spores dans les
Myxosporidies de la Tanche (d'api es Balbiani). 139
Fig. 45. — Myxosporidies et Psorospermies de la vessie uri-
naire du Brochet ( d'après Balbiani ) 140
Fig. 46. — Psorospermies de la vessie natatoire de la Tanche
montrant leur appareil élastique détendu ( d'à
près Balbiani ) 133
Fig. 47. — Formes dégradées de Psorospermies dans la rate,
le foie et les reins de la Tanche (d'après
Balbiani) 146
Portion de la glande séricigène d'un Ver à soie
envahi par les Microsporidies (d'après Balbiani). 164
Portion de l'estomac d'une chenille de Boinbyx
neustria contenant des Microsporidies à divers
états de développement ( d'après Balbiani ) 164
Cellules vitellines d'un œuf de Bombyx mort ren-
fermant des Microsporidies (d'après Balbiani). . 165
Coupe de la paroi de l'estomac d'un jeune Ver à
soie montrant les cellules épithéliales et la
tunique musculaire remplies de Microsporidies
( d'après Balbiani ) 165
Fig.
48.
Fig.
49.
Fig.
50.
Fig.
51.
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G. Balbiani , del.
EXPLICATION DES PLANCHES. 479
EXPLICATION DES PLANCHES.
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Planche I.
FiG. 1. — Kyste de Monocystis du testicule du Lombric.
FiG. 2. — Division du contenu d'un kyste en deux masses ovoïdes, au
début de la formation des pseudonavicelles.
FiG. 3. — Kyste dont le contenu , resté indivis , s'est recouvert à sa
surface d'une couche de petits globules clairs ou spo-
roblastes.
FiG. 4. — Stade plus avancé d'un kyste semblable à celui représenté
fig. 2. Chacune des deux masses ovoïdes intérieures
s'est recouverte d'une couche de sporoblastes.
Fig. 5. — Kyste dont le contenu s'est divisé en quatre segments
inégaux qui ont produit chacun une couche superficielle
de sporoblastes.
Fig. 6. — Le contenu s'est presque en entier résolu en sporoblastes
et ne renferme plus que quelques amas de la substance
granuleuse primitive.
Fig. 7, — Les sporoblastes commencent à se transformer au centre
du kyste en spores naviculaires ( pseudonavicelles ) ,
tandis qu'à la surface ils présentent encore leur forme
sphérique primitive.
Fig. 8. — Gros kyste rompu par l'efiFet de la compression ; il laisse
échapper son contenu formé de pseudonavicelles presque
. mûres et de quelques masses granuleuses non transfor-
mées en spores.
180 LES SPOROZOAIRES.
Planche II.
FiG. A. — Spores simples et concrètes du Pileocephalus chinensis
FiG. B. — Spores de Porospora gigantea.
FiG. a. — Spores du Gamocystis tenax ; — b, an Hoplorhynchus
oligacanthus , — c, du Hyalospora roscoviana; — d, de
YAcanthocephalus Dujardini; — e, f, spore et chapelet
de spores du Clepsidrina Blatiarum.
FiG. 1. — Macrospores du Monocystis du Lombric.
FiG. 2. — Diverses anomalies de forme des macrospores du môme.
FiG. 3. — Microspores du Monocystis.
FiG. 4. — Spores du Dufouria agilis.
FiG. 5. — Spores du Gonospora Terehellae.
FiG. 6. — Spores de YUrospora Nemertis.
FiG. 7. — Dernières phases du développement des pseudonavicelles
du Monocystis du Lombric.
Toutes ces figures sont repioduites d'après Aimé Schneider, sauf la
fig. e et la fig. 7, qui le sont d'après Biitschli.
EXPLICATION DES PLANCHES. 481
Planche III.
FiG. i. — Coupe pratiquée près de la surface du rein d'un Hélix
hortensis, montrant en K , K, des Klossia helicina
à divers stades d'évolution. C , cellules épithéliales
du rein renfermant des concrétions d'urate d'ammo-
niaque.
FiG. 2. — Portion plus grossie d'une coupe du même organe. K, K,
Klossia helicina renfermés dans les cellules épithéliales
considérablement dilatées. G , G , cellules épithéliales
saines avec les concrétions uratiques intérieures.
FiG. 3. — Gellule rénale fortement grossie , contenant trois jeunes
Klossia. On aperçoit le noyau de la cellule placé vers
son extrémité étirée en pédoncule.
FiG. 4. - Klossia dont le contenu s'est divisé en un grand nombre
de sporoblastes sphériques.
FiG. 5. — Transformation des- sporoblastes en spores; chacune de
celles-ci présente quatre corpuscules falciformes et le
nucléus de reliquat.
FiG. 6 — Une spore isolée.
FiG. 7. — Spore volumineuse renfermant , par exception , huit cor-
puscules falciformes au lieu de quatre , plus le nucléus
de reliquat.
FiG. 8. — Corpuscules falciformes observés à l'état de liberté dans la
substance du rein où ils se meuvent par des contractions
énergiques qui en modifient constamment la forme.
Chaque corpuscule présente vers son milieu un noyau
arrondi clair.
-182 LES SPOROZOAIRES.
FiG. 9. — Portion de l'artère mésentérique d'une Tanche dont les
ramifications portent des kystes développés aux dépens
de la tunique conjonctive du vaisseau et renfermant
dans leur intérieur des Myxosporidies à divers degrés
de développement. Les kystes sont sessiles ou plus ou
moins longuement pédoncules. Le contenu est formé
tantôt par les parasites seulement, tantôt par une
substance granuleuse, colorée en brun par de l'héma-
toïdine , au milieu de laquelle se trouvent des Myxo-
sporidies.
EXPLICATION DES PLANCHES. -183
/l
Planche IV.
FiG. 1. — Portion de l'artère splénique d'une Tanche, portant sur ses
nombreuses ramifications des corpuscules de Malpighi
dont la plupart renferment des Myxosporidies.
FiG. 2. — Deux corpuscules de Malpighi de la rate d'une Tanche,
vus à un plus fort grossissement et présentant dans leur
intérieur des Myxosporidies. Parmi celles-ci , on aperçoit
des formes bien développées , ovalaires , à deux capsules
polaires, telles qu'on les observe chez ce Poisson; les
autres sont des formes dégradées , généralement piri-
formes , ne renfermant souvent qu'une seule capsule ou
en étant dépourvues.
FiG. 3. — Formes diverses , très grossies, des spores contenues dans
les corpuscules de Malpighi. A , spores renfermant une
ou deux capsules polaires et une masse plasmique rem-
plissant plus ou moins la cavité de la spore. B , spores
réduites à leur coque bivalve, tantôt fermée, tantôt
ouverte. G , spores incomplètement développées , à l'état
de petites masses plasmiques amiboïdes ou de vésicules
granuleuses.
484 LES SPOROZOAIRES.
Planche V,
FiG. L. — Microsporidies du Ver à soie (Microsporidium Boynbycis),
vulgairement : corpuscules vibrants ou de pébrine —
a, spores à l'état de maturité parfaite; b, spores in-
complètement développées ; c, formes anormales des
spores.
FiG. 2. — Spores laissant échapper le plasma intérieur sous forme
d'une petite masse amiboïde.
FiG. 3. — Développement des spores dans la masse sarcodique repré-
sentant l'état végétal if ou d'accroissement do la Micro-
sporidie.
FiG. 4. — Deux cellules épithéliales de l'estomac d'une chenille
à'Aitacus (Saiurnia) Pernyi, envahies par des Micro-
sporidies ; a, cellule au début de l'invasion; b, cellule
entièrement remplie d'amas de spores.
FiG. 5. — Faisceau spermatique d'un Ver à soie au cinquième âge,
présentant des Microsporidies sous la membrane d'en-
veloppe et entre les filaments séminaux.
Fio. 6. — Follicule du testicule d'un Ver à soie bien développé ,
contenant des amas de Microsporidies mêlés aux sper-
matoblastes intérieurs.
FiG. 7. — Portion d'une gaîne ovarique d'un Ver à soie adulte. On
aperçoit des Microsporidies dans un ovule et les cellules
vitellogènes correspondantes , ainsi que dans la tunique
épithéliale.
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